Ce jeune avocat de Tizi Ouzou est un des fondateurs du Mouvement pour l'autonomie de la Kabylie (MAK) et fait partie du collectif des avocats des victimes du Printemps noir. Liberté : Deux années après les évènements d'avril 2001, où se situent les urgences du mouvement citoyen de Kabylie ? Me Salah Hannoun : L'urgen-ce, aujourd'hui, est de parIer des détenus. Pour nous, il s'agit de détenus politiques, en détention arbitraire. Sur quelle base ? Sur la base de la Déclaration des droits de l'Homme de 1948, du Protocole des droits civils et politiques de 1967 et de la Constitution algérienne, les deux premiers textes ayant été ratifiés par l'Algérie. Donc, l'Algérie est sommée, par ses obligations contractuelles, conventionnelles de donner un prolongement concret à ces notions et dispositions, contenues dans ces textes. Bélaïd Abrika, Rachid AIlouache, Tahar Alik et les autres détenus, sont actuellement en détention, parce qu'ils ont eu à émettre des opinions politiques, à s'exprimer publiquement, à remettre en cause politiquement le système politique. Mais, ce sont aussi des militants, qui n'ont pas utilisé la violence ni prôné l'usage de la violence. Aujourd'hui (dimanche 6 avril, ndlr), la décision est tombée, pour ce qui est de Tahar Alik, délégué d'Azazga, il a été condamné à une année de prison ferme. Que reproche-t-on aux personnes arrêtées en général ? C'est toujours la même chose : atteinte à l'ordre public, incitation à l'attroupement, destruction des biens publics, outrage à fonctionnaire, etc. Comme le dit si bien ma consœur Me Khalfoun, on a photocopié le code pénal et on l'a placé dans les dossiers. On inculpe, on met en détention, sous mandat de dépôt, après on cherche les preuves. En général, il n'y a aucune preuve. Combien de délégués sont actuellement en détention ? Il y en a vingt-quatre : dix à la maison d'arrêt de Bouira, neuf à la maison d'arrêt de Béjaïa et cinq à la maison d'arrêt de Tizi Ouzou. Que pouvez-vous nous dire sur leurs conditions de détention ? En général, les conditions de détention sont bonnes, par rapport aux conditions générales. Bien sûr, ce n'est pas le luxe. Mais nous avons eu à constater des écarts, de la part de certains gardiens, dans les trois prisons, au début et maintenant. Comme nous avons eu à constater de la compréhension, de la part d'autres gardiens, qui se sentent concernés par ce qui se passe. Vous avez parlé d'écarts de la part de certains gardiens. Qu'en est-il au juste ? Avez-vous porté plainte ? Il y a eu Bélaïd Abrika qui a été tabassé à la maison d'arrêt de Tizi Ouzou. Dimanche dernier (30 mars 2003, ndlr), Tahar Alik a été roué de coups, quand ils sont venus le prendre pour le procès. Lui et Lyès Makhlouf ont été placés dans la malle de la voiture. Donc, comme je le disais, il y a eu certains écarts que nous avons eu à dénoncer, publiquement ou au niveau des parquets. Il a été question de déposer une plainte judiciaire contre les agents qui avaient frappé Abrika et une autre plainte contre le ministre de l'Intérieur, parce qu'il avait tenu des propos mensongers à l'encontre des détenus. C'est un travail qu'il y a lieu de faire effectivement et sur lequel se penche, actuellement, le collectif des avocats. H. A.