Les “belgicistes” devaient descendre hier en force dans la rue pour faire aboutir le gouvernement de coalition qui doit respecter l'unité du royaume, mise à mal par cinq mois de discussions sans résultat, sur fond de conflit exacerbé entre les communautés flamande et wallonne. Cette marche pour l'unité était destinée à exprimer l'attachement des Belges à leur pays et leur souhait de continuer à vivre ensemble dans un seul pays uni, ont déclaré ceux qui espéraient voir déferler les marcheurs. Le roi, symbole par excellence de l'unité de la Belgique, était sorti de sa réserve pour essayer d'accélérer la formation du gouvernement. C'est qu'au fil de la crise, les signes de division entre les six millions de Flamands néerlandophones et les 4,5 millions de Wallons francophones se sont accumulés. Les cérémonies du Jour du roi, un événement majeur, ont été perturbées par des séparatistes flamands qui ont crié, en flamand, “que la Belgique crève” à l'arrivée du prince Philippe à la cathédrale Saints Michel et Gudule. “Vive la Belgique”, ont répondu les francophones. “Aimons-nous les uns les autres et prions pour notre pays, dans sa diversité et son unité”, a prié l'archevêque, lors de la messe, le clou de la cérémonie. Sur le plan politique, la tension s'est intensifiée, les francophones n'ont pas digéré la décision du ministre de l'Intérieur de Flandre de ne pas confirmer l'élection de trois bourgmestres francophones élus dans des communes de la périphérie de Bruxelles à majorité francophone, en Flandre. Les francophones ont alors quitté les pourparlers engagés en vue de former un gouvernement de coalition dit de “l'orange bleue” (chrétiens-démocrates et libéraux de Flandre et de Wallonie), qui traînent depuis cinq mois. Mais, ils se disent prêts à revenir à la table des négociations. La perspective d'une scission de la Belgique, bien qu'évoquée ouvertement, reste un cauchemar auquel personne ne pense sérieusement. Le petit pays est la capitale de l'Europe et de l'Otan. Alors, les Belges font de l'humour sur leur scission. Ainsi, les journaux ont commencé à spéculer sur la disparition des Diables rouges, l'équipe nationale de football, qui pourrait être remplacée par deux formations : les Lions de Flandre et les Coqs de Wallonie. Les constitutionnalistes suivent de près le feuilleton à rebondissement de la Belgique, se demandant si ce n'est pas la fin de l'Etat nation. La marche de l'unité a été colorée par ce qui fait la Belgique dans l'imaginaire : les frites et la bière sous les oripeaux noir, jaune, rouge, le drapeau national. D. B.