L'effondrement de l'immeuble de la place d'Armes à Annaba, samedi dernier, qui a causé la mort à 7 personnes (un couple avec ses deux enfants, une femme enceinte de 7 mois et sa petite fille) va-t-il être un cas de jurisprudence ? En rendant public un communiqué le lendemain de la tragédie dans lequel il est indiqué qu'une enquête judiciaire “précise et approfondie” a été ouverte sur l'explosion, le procureur général près la cour d'Annaba sera très attendu sur les résultats. Cette “première” ne peut susciter que de l'espoir de voir les choses changer. Pour beaucoup, c'est surtout une chance pour la justice de redorer le blason bien terni dans notre pays, même si le doute persiste sur l'aboutissement de cette démarche. Qui est responsable de cette tragédie ? Quelles sont les causes réelles de ce qui s'est passé ? Les doigts accusateurs pointent Sonelgaz pour négligence. C'est en tout cas l'avis des riverains qui affirment qu'une fuite de gaz avait été signalée à l'entreprise citée depuis plusieurs semaines. Face au “mutisme” de Sonelgaz, il semble que le “coupable” est tout désigné. Toutefois, rien n'est aussi évident que cela et il faut aussi voir ailleurs. L'entreprise étatique ne peut à elle seule porter le chapeau. D'ailleurs, certains incombent cette tragédie pas seulement au problème du gaz, mais aussi à la vétusté des maisons. Le fait que l'effondrement était survenu au moment même où de fortes pluies tombaient sur Annaba ne peut être une fâcheuse coïncidence. La réaction des habitants de la place d'Armes en est la meilleure illustration. Tous ou presque criaient à qui voulaient les entendre qu'ils seront les prochaines victimes tôt ou tard. Pour eux, chaque hiver est synonyme de risques majeurs, et à sa fin, ils poussent tous un ouf de soulagement en attendant de revivre cette situation quelques mois après. La colère des habitants était ainsi bien perceptible depuis samedi matin et l'émeute a d'ailleurs été évitée de justesse. D'aucuns expliquent que si les victimes avaient été enterrées le soir même (presque en cachette), c'était surtout pour éviter tout incident. C'est dire l'urgence de remédier au plus vite à ce problème de vieux bâti avant qu'il ne soit trop tard. Les autorités locales ont été souvent interpellées sur cet état de fait, et cela depuis plusieurs années, mais rien n'a été fait. L'attitude de “responsable mais pas coupable” est ainsi appliquée à merveille et rien n'indique que cela va changer. “Tout le monde s'en lavera les mains comme à chaque fois et encore une fois on va devoir accepter notre sort et implorer que Dieu ait pitié de nous”, criait une femme âgée hier, pas loin des décombres de l'immeuble effondré. La justice va-t-elle lui redonner espoir ? Salim Koudil