Du côté de l'histoire du pays comme dans son actualité, il y a une profusion d'indicateurs qui conduisent à croire que le pire habite tout autant le passé que l'avenir. Pour la consommation intra-muros des USA, le slogan “Freedom for Irak” a fait florès. On sait le peu de rapport qu'entretiennent ordinairement avec la réalité les formules de cet acabit, soigneusement construites à l'intention des foules par des experts en psychologie des masses. On sait tout particulièrement à quel point est illusoire celle qu'ont clamée à gorge déployée G.I.'s, Marines et Tommies en abordant la terre irakienne pour s'autoconvaincre de leur rôle de libérateurs. Aujourd'hui, si les Anglo-Américains estiment que leur mission est accomplie ou sur le point de l'être, une telle conviction n'engage vraiment qu'eux seuls. En fait, la chute du régime de Saddam, qui intervient en épilogue provisoire à une longue série d'escales balisant quinze siècles d'une histoire tumultueuse, ne signifie pas, loin s'en faut, un retour du peuple irakien à la liberté. D'abord parce que les forces de la coalition sont là, que tout indique qu'elles n'ont nulle intention d'écourter leur présence et que, quoi qu'on en dise, elles n'ont pas d'autre nom que celui de conquérants. Ensuite, parce que la démocratie à l'américaine qui pourrait être mise en place à court ou à moyen terme n'aura pas, à l'évidence, pour corollaire d'être ressentie comme une libération par les anciens sujets du dictateur de Tikrit et de son clan. Enfin, parce que, du côté de l'histoire du pays comme dans son actualité, il y a une profusion d'indicateurs qui conduisent à croire que le pire réside autant dans le passé que dans l'avenir. Il est difficile, au vu de l'agitation exaltée qui règne à Karbala, de ne pas songer à ces scènes d'hystérie qui, en 1979, ont accueilli à Téhéran un certain Khomeyni. Et, dans la foulée du souvenir, nous dire que la noirceur des dernières décennies du XXe siècle en Algérie ne sont pas sans rapport avec cet événement. M. A.