Dernier voyage à Paris d'un ministre pour préparer la visite d'Etat du président Sarkozy début décembre à Alger. Le chef de la diplomatie a été longuement reçu par son homologue qui a dû différer ce rendez-vous initialement prévu mercredi, en raison de la situation au Liban où Bernard Kouchner a été contraint de prolonger son séjour. Entre les deux ministres, la question libanaise a d'ailleurs pris sa part des discussions largement consacrées à l'avenir de la relation bilatérale. “Nous voulons faire de cette relation une relation stratégique” et de l'Algérie un “partenaire de premier choix”, a dit M. Kouchner. Première décision, la convention de coopération arrivée à terme a été modifiée pour la rendre “beaucoup plus ambitieuse” parce que la “volonté politique existe” en Algérie où “les moyens le permettent aussi”. À titre d'illustration, M. Medelci a cité la mise en place d'un dispositif d'accompagnement des PME “pour produire ensemble et distribuer ensemble”. Dans ce cadre, l'Algérie s'est engagée à faciliter la délivrance des visas de long séjour aux hommes d'affaires français. De l'autre côté, l'ambassade de France à Alger a amélioré les conditions de travail de ses employés. Les effets pour les visas de circulation seront visibles dès le début de l'année prochaine. L'idéal, a dit le ministre algérien, est de revenir à 1989 lorsqu'il n'y avait pas de visa entre les deux pays. Ce qui permettait à un million d'Algériens de se rendre chaque année en France. L'Algérie ne compte pas renoncer. Dans le contexte de la mondialisation, elle conçoit mal que les marchandises circulent librement et pas les personnes. Autre exemple de coopération : l'énergie. Dans ce domaine, l'Algérie travaille à la “globalisation” de sa relation. Il ne s'agit pas de continuer à vendre des hydrocarbures, mais à obtenir en échange des énergies renouvelables, comme le nucléaire. Le projet apparaît d'autant plus réalisable que M. Sarkozy s'attache à développer le partenariat Nord-Sud dans le cadre de l'Union méditerranéenne. Un projet sur lequel l'Algérie n'émet “aucune réserve de principe”, selon M. Medelci qui note a contrario le peu d'empressement des autres pays de l'UE à suivre la France sur ce terrain. Serpent de mer de la diplomatie algérienne, le Sahara occidental. La question ne pouvait être éludée alors que le président français a semblé appuyer la thèse marocaine. Surprise. “Nos points de vue ne sont pas aussi divergents qu'il y paraît”, a affirmé M. Medelci. Face aux journalistes, la question de la mémoire s'est inévitablement imposée. “L'Algérie est un grand pays, c'est un pays ami, nous voulons en faire un pays frère”, a affirmé M. Kouchner. Interrogé sur la notion de “pardon” alors que l'Algérie demande à la France de reconnaître les “crimes” commis durant les 132 ans de la colonisation, M. Kouchner a répondu que “le temps n'est ni à la repentance ni à l'acrimonie”. “Il ne faut offenser personne. Certains sont capables de l'entendre, d'autres non. Laissez le temps offrir son temps, non pas du pardon, mais du passé. Ni pour les uns ni pour les autres, le pardon est un mot qui s'impose”, a-t-il estimé. Il a rappelé que la France “était divisée” pendant la colonisation et que lui-même se trouvait du côté de ceux qui considéraient l'indépendance de l'Algérie “comme indispensable, nécessaire et évidente”. “Nous avons eu des divergences et des fracas, maintenant construisons ensemble”, a-t-il plaidé. Alors, l'Algérie a-t-elle renoncé à l'exigence ? Pas du tout. La réponse de M. Medelci indique qu'il n'en est rien ! Y. K.