Boulevard Souidani-Boudjemaâ, ex-Colonne Voirol, à El-Mouradia. 14 heures. En ce jeudi 29 novembre, l'affiche du Front des forces socialistes (FFS), portant le numéro 9, flotte allègrement au-dessus du quartier général du parti. Il pleut à torrents. Tout semble tranquille à première vue. Une fois au cœur du siège du parti d'Aït Ahmed, une ambiance électrique règne dans les couloirs. Difficile de connaître les premiers pronostics à cette heure-ci, d'autant que les premiers sondages de 13h étaient timides. On parle déjà des contraintes, des dépassements, voire même des cas de figure de fraude dans certaines localités. “Normalement, vous avez reçu une copie de ce qui s'est passé à Aïn Torki, wilaya de Aïn Defla. Nous avons envoyé à toutes les rédactions une lettre de recours et de retrait des candidats”, nous annonce d'emblée, Rachid Chaïbi, ex-chef de cabinet. En effet, il s'agit d'une lettre de contestation, dont nous avons obtenu une copie, datée du 29 novembre adressée au wali de Aïn Defla. Les représentants des cinq partis, FFS, RND, FNA, HMS et RCD expliquent l'incident, à savoir la disparition de 1 249 bulletins de vote, et annoncent le retrait des candidats. La cellule de sondage chargée de collecter les informations et prendre la température au téléphone est installée à l'étage supérieur du siège. Les coordinateurs de wilaya sont en contact permanent avec M. Chaïbi qui venait de voter à Makouda, alors que le premier secrétaire, Karim Tabbou, a voté au village Aït Boutou à Tizi Ouzou. Les yeux rivés sur l'écran, tout le monde suit en live les interventions du ministre de l'Intérieur, Noureddine Yazid Zerhouni à la Télévision nationale, ainsi que des flashes d'information ponctuels. Les premiers taux de participation tombent. Le taux est faible, comme il fallait s'y attendre, il n'a pas encore atteint les 30%, notamment dans la capitale qui a enregistré à peine 8%. Des commentaires vont bon train, on parle de vices de procédure, d'incidents de Dellys (Boumerdès) et d'El-Hamri (Oran), ainsi que du boycott des Algérois. “Comme dirait Mohamed Harbi : la démocratie doit être une ambiance. Malheureusement, ce n'est pas le cas, il y a eu des dépassements”, commente un ex-secrétaire du parti. À la clôture du scrutin prolongé d'une heure dans une quinzaine de wilayas, le ministre de l'Intérieur annonce un taux final de participation de 43,26% pour les APW et de 43,96% pour les APC. Il est 20h. Premier commentaire de Tabbou qui s'en prend directement, et sans retenue, au ministre de l'Intérieur. Il déclarera tout de go que le taux participation est légèrement plus élevé, comparé aux précédentes élections. Il signalera que plusieurs citoyens ont assumé leur responsabilité en accomplissant leur devoir, tandis que la plupart d'entre eux ont perdu confiance et ne croient plus à l'acte de voter. Continuant sur sa lancée, il accuse ouvertement Zerhouni, d'être “responsable de la fraude instituée”. Aux yeux de Tabbou, il s'agit d'une fraude à grande échelle. “À Khenchela, dans la commune de M'hamel, les bulletins de vote du FFS ont été déposés à partir de 17h et ce, après que les représentants du parti se sont battus. À Aghrib, des enveloppes préparées par certains partis ont été distribuées aux citoyens. À El-Oued, le député Daâdoua a insulté les candidats du FFS et a entravé le travail des observateurs. Plus de 100 personnes ont doublement voté à la commune de Krekra, wilaya de Skikda… sans parler de la couleur bleue claire des bulletins du RND APW”, remarque-t-il. Tabbou clôture son bilan avec une touche de dérision : “Nous gardons l'espoir d'être classés avant-dernier, soit après tous les partis et les candidats indépendants.” Nabila Afroun