“J'ai provoqué cette conférence de presse pour dénoncer les graves infractions de Rachid Bouraoui, le séquestre judiciaire”. C'est ce qu'a déclaré, hier, Abdelghani Djerrar, le représentant des associés des sociétés Tonic, aux journalistes en les invitant à examiner attentivement “le dossier” préparé à leur intention. Un dossier qui contient plusieurs documents, notamment des lettres transmises récemment par M. Djerrar, au nom des 9 actionnaires du complexe industriel, au ministre de la Justice et au doyen des juges d'instruction et un courrier transmis par le directeur manager de la firme Sarens Algérie, un certain Hamid Batata, à Rachid Bouraoui, lui manifestant son “intérêt” pour le matériel de levage “avec option ferme d'acquisition, soit par une cession pure et simple”, ainsi que les statuts de la société Verdi SPA de transport, où MM. Bouraoui et Batata figurent parmi les “actionnaires” de l'entité. Lors de la conférence, M. Djerrar a révélé que la perspective de la prochaine vente de certains équipements de Tonic “a fait naître des appétits immodérés”. Il a toutefois précisé que depuis la mi-décembre 2007, les responsables des 11 sociétés Tonic chargés de la gestion des matériels roulants étaient “harcelés” par M. Batata, qui les avait informés que “tout le parc roulant allait être vendu”, alors que les gestionnaires l'ignoraient encore. Pour Abdelghani Djerrar, M. Bouraoui a “outrepassé ses prérogatives en s'immisçant dans des questions de vente d'actifs qui ne dépendent pas de son mandat”, “a tenté de s'entendre avec un candidat acquéreur et violé son obligation de respect du secret professionnel” et “essayé de réaliser une vente dans le cadre d'une transaction de gré à gré avec un associé”. M. Djerrar a, par ailleurs, informé avoir initié “une enquête” sur cet acheteur, qui s'est avéré être “l'associé et l'ami de M. Bouraoui”. Le représentant de Tonic a, en outre, affirmé que M. Bouraoui se fait passer pour “l'administrateur judiciaire”, usant même d'un cachet, et a procédé au changement de la compagnie d'assurances, portant son choix sur la Caat. “Nous dénonçons ces graves infractions, car nous ne nous sentons plus protégés : on ne peut pas assurer un groupe comme Tonic avec une note de couverture provisoire de la Caat”. Cette situation lui a fait dire plus loin qu'il y a “des gens derrière le séquestre qui cherchent à démanteler le complexe”. “M. Bouraoui est le liquidateur de Khalifa graphisme, il se comporte comme un liquidateur à Tonic”, a-t-il fini par lâcher. “Le groupe dérange” L'affaire Tonic Emballage est en instruction judiciaire depuis la fin de l'année 2005, après que le groupe privé s'est trouvé en difficulté de trésorerie. La dette contractée auprès de la Banque algérienne de développement rural (Badr) est de plus de 74 milliards de dinars. Hier, M. Djerrar a rejeté l'idée selon laquelle le complexe serait dans une situation catastrophique. La preuve, a-t-il dit, les actifs du groupe se chiffrent à 115 milliards de dinars “sans le good will” et “dépassent de très loin les engagements de la banque”, qui sont de plus de 83 milliards de dinars (74 milliards de dinars + 9 milliards de dinars d'intérêt de 2005 à ce jour). Seulement, a-t-il fait remarquer, les choses sont en train de se dégrader au lieu de se redresser. Si l'on en croit ses déclarations, outre les tentatives du séquestre de vendre “au rabais” le matériel du complexe, M. Bouraoui a recruté 2 personnes, alors que ses prérogatives ne le lui permettent pas, et n'a plus remis les pieds dans son bureau, depuis le 9 janvier dernier. Par ailleurs, la production de carton ondulé serait en nette baisse, passant de 4 000 à 5 000 tonnes/mois en 2004-2005 à 1 000 tonnes/mois actuellement. “Le groupe Tonic dérange”, a commenté M. Djerrar, en raison de “sa réussite” sur le marché et de ses prix de revient. À titre d'exemple, “le prix de revient du papier est le moins cher dans le pourtour méditerranéen”, a-t-il déclaré, signalant que “Tonic le produit entre 18 000 et 22 000 DA la tonne contre 500 à 600 euros la tonne en Europe”. Présent à la conférence de presse, l'avocat du groupe, Me Zeraia, a informé que “rien n'a été notifié par le juge d'instruction”. Il a, cependant, rappelé que ce dernier avait répondu aux premières requêtes des associés de Tonic, qui avaient remis en cause avant le premier séquestre judiciaire, en observant : “On pensait que le second séquestre allait améliorer la situation.” Pour l'avocat, l'affaire “commerciale” de Tonic ne peut “durer continuellement”, d'autant que le juge d'instruction “voit seulement le côté pénal”. Mais, c'est à ce même juge que revient la décision de mettre fin à cette affaire, de remplacer ou de maintenir M. Bouraoui à son poste. La démarche actuelle de Tonic et de son avocat s'inscrit dans ce cadre : interpeller de nouveau les instances judiciaires, en particulier le juge d'instruction, et leur demander d'instruire à la fois “une enquête judiciaire” sur M. Bouraoui et un “audit pour répertorier tous les dégâts commis par chacun des deux séquestres judiciaires”. H. Ameyar