Trois séances ont été programmées à quelques jours d'intervalle, les 29 et 30 mai, et le 3 juin. Le juge Workman a indiqué que le tribunal a reporté d'autres affaires afin de hâter l'examen du dossier de livraison de l'ex-milliardaire en détention depuis 13 mois. Abdelmoumen Rafik Khelifa a pris la parole brièvement, pour la première fois jeudi dernier, devant le tribunal de Westminster à Londres, au cours d'une audience formelle portant sur la détermination des dates des auditions portant sur l'examen du fond de la demande de son extradition vers l'Algérie. L'ex-milliardaire s'est exprimé par vidéoconférence, à partir du lieu de sa détention au sud de la capitale britannique. Il a prié le juge Timothy Workman de hâter le traitement de son affaire. “Cela fait longtemps que je suis en prison. C'est difficile pour moi”, lui a-t-il dit. “M. Khelifa n'en peut plus”, avait observé Ben Branden, quelques instants auparavant. L'avocat de l'ex-golden boy réagissait à l'annonce par le magistrat, en début de séance, de rendez-vous fixés pour les 29 et 30 mai, qui, à son avis, sont lointains. “Mon client n'est pas en mesure de faire une demande de liberté provisoire. À cet égard, il veut que cette affaire soit traitée de manière urgente”, a encore fait savoir le représentant du patron déchu. M. Khelifa ne peut pas bénéficier de la liberté provisoire, car sa mise en détention est intervenue dans le cadre de l'examen de son transfert en France, à la demande de la justice de ce pays. Il est sous les verrous depuis le mois de mars 2007. “Il se distingue par une bonne conduite et n'a pas d'antécédents judiciaires ni dans son pays ni ailleurs”, a martelé Me Branden, dans l'intention de sensibiliser le président du tribunal sur le sort de son client. “Nous allons encore tenter d'arranger d'autres rendez-vous, mais je ne pense pas que nous trouvions des dates plus proches”, a répliqué le juge Workman, après la consultation de l'une de ses adjointes. Il a révélé que le tribunal a dû reporter le traitement d'autres affaires pour faire traiter celle-ci en priorité. Le magistrat a fait une unique concession en fixant la date d'une troisième audience très rapprochée des précédentes. Elle aura lieu le 3 juin. Dans sa plaidoirie, Me Branden a rejeté sur les autorités algériennes une partie de la responsabilité des lenteurs dans le traitement de la demande d'extradition. “On nous a transmis des volumes de matériaux (documents) dont les deux tiers n'étaient pas traduits de l'arabe à l'anglais”, a-t-il indiqué. Il a également accablé la justice britannique pour avoir négligé d'informer M. Khelifa sur les rebondissements le concernant. “Son appel – contre la décision de son transfert en France, ndlr – a été gelé sans qu'il soit informé à temps de la cause exacte. Ce n'est qu'à la fin de janvier qu'il a été avisé que la priorité avait été donnée à la demande de son extradition en Algérie”, a commenté le défenseur. Avant les audiences du 29 et du 30 mai ainsi que du 3 juin, les avocats de la défense et de la partie civile auront des entrevues avec le juge Workman pour la prestation et l'échange des documents en rapport avec l'examen du fond de la demande de livraison. D'ores et déjà, les représentants de Khelifa, Ben Branden et l'avocate principale, Anna Rothwell – absente au tribunal jeudi – affûtent leurs armes. Les relents du complot politique, l'absence de garanties pour un procès équitable de leur client en Algérie et leurs doutes concernant la pratique des droits de l'Homme dans ce pays seront au centre de leur stratégie de défense durant les auditions. De leur côté, les avocats de la partie algérienne comptent exploiter les faits graves d'escroquerie, retenus contre l'ex-milliardaire, pour persuader le juge de la justesse de son extradition. L'Algérie a marqué un premier point, suite à la validation par le tribunal de Westminster de sa demande de livraison, en dépit des critiques exprimées par la défense de M. Khelifa. De Londres : SAMIA LOKMANE-KHELIL