Imperturbable et apparemment bien préparé à cette éventualité, le Premier ministre algérien n'a pas cédé à la pression des responsables et du public marocains dans une salle surchauffée, en affirmant que “l'Algérie a toujours défendu depuis son indépendance les causes justes et les mouvements de libération nationale”. Ne reculant devant rien, les officiels marocains, menés par leur chef du gouvernement, Abbas El Fassi, ont vainement tenté de forcer la main à Abdelaziz Belkhadem à l'occasion d'un meeting populaire de commémoration du cinquantenaire de la conférence de Tanger. Comme il fallait s'y attendre, le ministre d'Etat marocain et dirigeant socialiste Mohamed El Yazghi a voulu provoquer le Premier ministre algérien en appelant “les dirigeants maghrébins, particulièrement le président algérien Abdelaziz Bouteflika, à soutenir le projet marocain pour sortir le dossier du Sahara de l'impasse”. Voilà un appel vide de sens, car l'intervenant connaît parfaitement la position inamovible d'Alger sur la question depuis le début du conflit du Sahara occidental. Prompt, Abdelaziz Belkhadem rétorquera : “L'Algérie a toujours défendu depuis son indépendance les causes justes et les mouvements de libération nationale, au Mozambique, en Angola et même dans son voisinage.” Malgré la pression de l'assistance, préparée pour l'occasion, qui scandait “Le Sahara est marocain” pour l'interrompre, le patron du FLN fera comprendre à son auditoire qu'il ne s'agit que d'une question de principe en lançant : “Voulez-vous que l'Algérie renonce à ses principes ?” Pour clore ce sujet de discorde entre Alger et Rabat, il dira : “L'histoire dira qui est le responsable du blocage.” Revenant sur l'affaire des frontières terrestres fermées entre les deux pays, Abdelaziz Belkhadem fera remarquer : “Même avec une frontière fermée, le volume des échanges commerciaux entre Alger et Rabat est supérieur à celui réalisé par l'Algérie avec les autres pays du Maghreb.” Contraint d'intervenir pour demander à la salle de respecter “l'intervention de M. Belkhadem”, sans pour autant lâcher prise, son homologue marocain, Abbas El Fassi affirmera que “la question du Sahara est sacrée au Maroc”, avant d'ajouter : “On ne va pas la résoudre dans cette salle, mais avec justice, objectivité et calme.” Quant à la concrétisation de l'Union du Maghreb arabe, il estimera que “l'heure a sonné”. “Il faut rattraper le retard pris et mettre fin au gel de l'UMA”, clamera le chef du parti Istiqlal. À signaler que cette rencontre des partis politiques maghrébins a été sanctionnée par un communiqué commun dans lequel il est indiqué que les participants ont décidé de se réunir à Tripoli en 2009 et “d'intensifier leur coordination sur toutes les affaires intéressant le Maghreb arabe”. Ce document met en exergue “l'importance de la réalisation d'un Magheb uni dans un espace ouvert permettant la liberté de circulation des personnes et des biens”. Auparavant, Belkhadem avait déclaré que “le corps maghrébin n'est pas mort”, en rappelant que “des réunions ministérielles se tiennent régulièrement, et la pièce manquante, c'est un sommet des chefs d'Etat”, pour appuyer la position du secrétaire général de l'UMA, le Tunisien Habib Benyahia, qui avait appelé à la tenue, “dans les plus brefs délais”, du 7e sommet des chefs d'Etat du Maghreb. K. ABDELKAMEL