En campagne électorale en mars 2007, le candidat Nicolas Sarkozy avait promis aux enfants de harkis une “discrimination doublement positive”, estimant qu'ils avaient été victimes d'une “double discrimination”. “Si je suis élu, je m'engage à faire pour vous une discrimination positive, doublement positive, la discrimination positive “plus, plus”. Vous êtes, vous les enfants de harkis, les premières personnes vers qui nous devons engager une politique de discrimination positive", avait-il promis lors d'un meeting évoquant la mise en place de “politiques individualisées” en matière de formation, d'accès à l'emploi ou au logement, ainsi que des “concours spécifiques d'accès à l'emploi public” ou “une politique particulière d'accès aux fonctions et postes politiques”. De retour d'Alger où il a effectué une visite d'Etat en décembre, le président Sarkozy recevait immédiatement des associations de “rapatriés”. “Il est légitime et juste que (les harkis) reçoivent l'hommage solennel de la nation”, déclarait-il. Les harkis forment aujourd'hui en France une communauté — descendants compris — de quelque 400 000 personnes. Traduisant en actes les promesses de M. Sarkozy, le Sénat vient d'adopter en première lecture un projet de loi réservant 10 000 emplois aux enfants de harkis. Le projet de loi, présenté par le secrétaire d'Etat aux Anciens combattants Jean-Marie Bockel, et adopté en première lecture par le Sénat le 15 avril, élargit le champ des bénéficiaires prioritaires des “emplois réservés” de la fonction publique aux militaires et anciens militaires. Selon l'article L.394 et L.396, les emplois réservés sont “accessibles sans condition d'âge, aux enfants des personnes mentionnées aux articles 1 et 6 de la loi du 11 juin 1994 relative aux rapatriés anciens membres des formations supplétives et assimilés ou victimes de la captivité en Algérie”. Ces dispositions ont soulevé l'indignation de l'association SOS Racisme qui y voit une relance du “scandale de la discrimination positive par catégorie ethnique et ethno-politique” et un “rétablissement des méthodes de l'époque coloniale”. Pour Samuel Thomas, vice-président de SOS Racisme, “la discrimination ‘positive' par catégorie ethnique et ethno-politique vient d'être relancée”. “Ainsi, l'enfant d'Algérien victime de discrimination sera employé si son père était politiquement et militairement du côté de la France”, écrit-il dans un communiqué. “Il ne faut pas accepter les discriminations et chercher à les compenser, au contraire, il faut combattre les discriminations dont sont victimes les enfants de harkis, comme on doit combattre les discriminations dont sont victimes tous les enfants d'immigrés”, ajoute-t-il. “La division au sein des populations victimes de discrimination raciale va ainsi être mise en place à la demande du président de la République. Nous assistons au rétablissement de méthodes de l'époque coloniale”, affirme-t-il. Le président Sarkozy avait annoncé, le 5 décembre, la mise en place de mesures spécifiques pour les “enfants de harkis” et notamment “une politique particulière d'accès à la fonction publique”. Les harkis ont été, pendant la guerre d'Algérie (1954-1962), les supplétifs musulmans de l'armée française. Après les accords d'Evian (mars 1962), plusieurs dizaines de milliers d'entre eux ont été assassinés par le FLN, des dizaines de milliers d'autres rejoignant la France pour y être souvent parqués dans des camps de transit. Le projet de loi sera soumis en première lecture à l'Assemblée le 14 mai. De paris Yacine Kenzy