Cette formation est destinée aux cadres de la santé en Algérie pour les initier aux nouvelles techniques de gouvernance de la santé et de la gestion hospitalière. Vue sous un angle purement humanitaire, la vie n'a certes pas de prix, mais la gestion moderne lui attribue un coût et les gestionnaires le veulent le moins onéreux possible. L'économie touche ainsi tous les secteurs y compris la santé, que les nouveaux managers veulent gérer de manière efficace tout en étant parcimonieux dans les dépenses et en assurant bien entendu un niveau de soins appréciable aux malades. La médecine moderne telle que conçue par les économistes de la santé ne se base plus sur l'empirisme, mais sur la preuve, c'est pourquoi les protocoles de prise en charge des maladies commencent à être standardisés, au grand dam des praticiens qui tiennent pour leur part à la socio-médecine. Cette dernière privilégie la prise en charge des malades au cas par cas et non la standardisation des actes de soins où le praticien devient une sorte “d'ouvrier sur une chaîne de montage” et dont le rôle se limitera à administrer des soins arrêtés par l'administration dans un souci d'économie. Les gestionnaires refusent pour leur part d'être considérés comme voulant transformer le médecin en robot tenu de respecter les protocoles de soins car, affirment-ils, seules les techniques de soins ayant prouvé leur efficacité seront retenues et généralisées. Ils invoquent pour cela les budgets non extensibles et avec lesquels il faut soigner de plus en plus de malades, la santé étant devenue un droit pour tous. L'économie de la santé devient une nécessité d'autant que les caisses d'assurance enregistrent des trous financiers qu'il faut combler pour rééquilibrer leurs comptes, sans quoi elles seraient asphyxiées. Dans les pays occidentaux, l'économie de la santé est une spécialité enseignée à l'université et ceux qui embrassent une telle carrière définissent les schémas thérapeutiques les plus efficaces et les moins ruineux. C'est pourquoi l'Ecole supérieure algérienne des affaires (Asaa) a décidé de lancer une formation de mastère en gouvernance de la santé et du management hospitalier. Cette formation, destinée aux directeurs des centres hospitalo-universitaires (CHU), aux responsables des départements de la santé et de la sécurité sociale, permettra aux responsables de la santé en Algérie de travailler selon les modes de gestion moderne pour diminuer la facture de la prise en charge des malades. Avant de lancer cette formation, les responsables de l'Asaa ont organisé, hier, un congrès sur le sujet au siège de l'école, à Mohammedia à Alger. Des spécialistes algériens et français ont saisi cette occasion pour échanger leur expérience et engager une coopération pour aboutir à des règles de gestion parcimonieuse et ne sanctionnant pas le malade. “Nous avons des projets de coopération entre l'Algérie et la France, sur différents aspects de la santé, comme la réforme des régimes de sécurité sociale, la réforme hospitalière, la gestion hospitalière et celle des caisses de sécurité sociale”, affirme Karim Laribi, chargé de la coopération internationale à la haute autorité de la santé en France. Il estime que cette formation vient à point nommé pour donner un savoir et un savoir-faire en matière de gouvernance et de gestion hospitalière aux responsables du secteur. Pour sa part, le professeur Dominique Bertrand, spécialiste en santé publique et enseignant d'économie de la santé à l'université Paris VII : “Il s'agit avant tout d'organiser la santé et la protection sociale pour réduire le déficit des assurances sociales tout en protégeant mieux les malades.” Bruno Ponson, le directeur de l'Ecole supérieure algérienne des affaires, annonce que le début de la formation aura lieu dès la rentrée universitaire prochaine. Il estime que cela permettra aux gestionnaires algériens d'avoir une vision économique dans le secteur de la santé et cela sans toucher à la qualité des soins dont bénéficieront les malades. En somme, l'économie de la santé tente d'allier efficacité et bonne gestion des budgets alloués au secteur. Saïd Ibrahim