Depuis samedi dernier, Alger a un nouvel archevêque. Il s'agit du père Ghaleb Moussa Abdallah Baderb désigné par le pape Benoît XVI, en remplacement de Mgr Henri Teissier. Ce dernier, en poste depuis 1988, voit ainsi sa démission enfin acceptée après avoir été en suspens depuis 2004. Le nouvel archevêque Ghaleb Moussa Abdallah Bader, 57 ans, était jusqu'à présent prêtre au tribunal ecclésiastique d'Amman, en Jordanie. Dans sa biographie, il est indiqué que ce chrétien du royaume hachémite a passé la majorité de son parcours dans les pays du Moyen-Orient, soit dans son pays d'origine à Damas (Syrie), ou encore à Jérusalem. Parmi ses “œuvres”, le père Ghaleb a, entre autres, participé, de 1981 à 1986, à la traduction en arabe du “Code de droit canonique”. On a surtout noté que pendant 5 ans (de 1996 à 2001), il fut consultant au Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux. Un statut qui a dû peser lourd dans le choix du pape, étant donné l'image qui est donnée médiatiquement (chez nous et à l'étranger) de l'Algérie. Représentant l'Eglise catholique, Monseigneur Teissier a été à chaque fois interpellé sur la situation des chrétiens en Algérie. Même s'il est répété souvent que “l'évangélisation n'est pas le fait de l'Eglise d'Algérie”, il est tout de même monté au créneau pour “dénoncer” une certaine pression que certains de ses coreligionnaires auraient subie. Ainsi, le 26 février dernier, il avait été reçu, avec d'autres évêques, par le ministre des Affaires religieuses et des Waqfs, Bouabdallah Ghoulamallah, auquel il avait remis une lettre exprimant ses inquiétudes face aux tracasseries qui ciblent l'Eglise. Juste avant, il avait déclaré dans une interview parue le 18 février sur les colonnes du quotidien du Vatican, L'Osservatore Romano : “Les catholiques, du point de vue de leur comportement, ne peuvent pas être assimilés à ces nouveaux groupes évangéliques, et les autorités algériennes le savent bien.” Une prise de position qui ne pouvait surprendre de la part d'une personne qui n'avait jamais hésité à monter au créneau lorsque les évènements le lui imposaient. Depuis qu'il avait remplacé en 1988 le cardinal Duval, Monseigneur Teissier s'est déployé sur plusieurs registres aux quatre coins du pays. Tous ceux qui l'ont connu ne tarissent pas d'éloges sur ses qualités humaines et les grands efforts qu'il avait déployés dans l'espoir de promulguer la fraternité entre les chrétiens et les musulmans, et même entre les musulmans. Ses prises de position, même aux pires moments des menaces pesant sur les étrangers, et surtout après l'assassinat des moines de Tibhirine en 1996, lors de la décennie noire, n'ont toujours pas été oubliées. Du coup, son départ sera sans aucun doute regretté par plus d'un. Ce Lyonnais de naissance, et Algérien de nationalité (depuis 1966), aura fait, de l'avis de tout le monde, un travail colossal. Il quitte un poste qui devenait vraisemblablement de plus en plus harassant pour un homme de près de 79 ans. Les derniers “couacs” sur les vagues d'évangélisation que subirait l'Algérie, et les réactions des autorités algériennes ont sans aucun doute accéléré son départ. Son remplaçant, le père Ghaleb Moussa Abdallah Baderb, aura la lourde tâche de gérer ce chaud dossier qu'est l'évangélisation en Algérie et qui semble prendre des proportions de plus en plus grandes. Nous n'omettrons pas de noter que la dernière sortie officielle de Monseigneur Teissier a été effectuée samedi passé lors de l'ouverture du séminaire sur l'Emir Abdelkader, un homme avec qui il a beaucoup de points en commun. Il avait indiqué que les motivations religieuses et les droits de l'Homme, sur lesquels a insisté l'Emir, donnaient une base solide à la relation interreligieuse. Des principes qui, selon lui, “proposent deux directions de réflexion susceptibles de conforter une approche pacifiée entre christianisme et islam : l'exaltation de Dieu et la compassion pour ses créatures”. Un message d'actualité… carrément d'urgence. Salim KOUDIL