C'est aujourd'hui que le tribunal correctionnel de Tiaret rendra son verdict dans le procès de K. Habiba, mêlée à une affaire de culte depuis le 29 mars dernier et jugée la semaine dernière par la même instance dont le représentant du ministère public avait requis la peine de trois ans de prison ferme. Une affaire qui a, durant toute la semaine, fait couler beaucoup d'encre. Néanmoins, les impressions des uns et les commentaires des autres se sont illustrés par un débat unique et inédit. “Le désordre n'a aucune raison d'exister normalement dans la mesure où il s'agit d'une affaire pour le moins ordinaire, jugée par une instance judiciaire qui ne fait que se soumettre aux lois de la République”, affirmera le procureur général que nous avons pu aborder à l'issue de la visite de Zerhouni à Tiaret, avant-hier. Notre interlocuteur s'est résolu à lever les énigmes entourant cette question en précisant que, dans le cas de Habiba ou d'autres, les réactions ne doivent pas être travesties et assimilées comme une interdiction au droit de culte. “Pour être clair, je vous cite l'exemple de ces musulmans jugés pour quête illégale de fonds sachant qu'ils ne disposaient d'aucune autorisation de le faire”, ajoutera-t-il, en mettant en relief ce que stipule la loi concernant les associations. Pour l'un des plus anciens avocats du barreau de Tiaret, la question a été amplifiée par des forces occultes qui visent la division des Algériens. “La question des libertés de conscience et de pratique de culte se veut un droit inaliénable que nous devons tous défendre avec une ferme concentration”, soutiendra-t-il. S'agissant de l'affaire de Habiba, ce dernier qui estime n'être pas au courant du dossier en détail, se contentera de dire que “la justice, au-delà d'une répression de principe, est tenue de défendre le citoyen contre toute forme d'asservissement et d'iniquité quelle que soit son obédience confessionnelle”. “La question indispensable actuellement n'est pas de réprimer les gens pour la pratique de culte, mais de se mettre au diapason des valeurs universelles de justice, de paix, de l'amour et de la tolérance ainsi que de la solidarité. Il est temps de bannir ces intentions indécentes qui sont en porte-à-faux avec la liberté de conscience”, soutiendra à son tour un autre avocat qui nous révélera avoir visité un pays arabe où il a eu l'aubaine de côtoyer plusieurs personnes de différentes religions vivant en communauté. “Rappelons-nous que le Calife Omar Ibn Khettab, après une de ses prières à El-Qods, avait exhorté les fidèles musulmans à prendre soin de l'Eglise catholique et de la synagogue des juifs”, relatera-t-il en affirmant que le procès de Habiba devrait se dérouler dans un contexte séparé de la religion et avec un chef d'inculpation propre à ce dossier. Et d'enchaîner : “Concernant l'avocate de la défense de Habiba, que nous avons contactée par téléphone, elle s'est abstenue de toute déclaration avant la connaissance du verdict. “Pour l'heure, je me concentre sur le procès de ma cliente, mais je suis prête à débattre du sujet après la sentence du tribunal que je souhaite être clémente”, nous dira Me Khelfoun hier. Toutefois, un jeune homme, converti lui aussi au christianisme, nous a fait part de son indignation en affirmant que “la traque” aux personnes chrétiennes ne date pas d'aujourd'hui, mais qu'elle s'est intensifiée ces derniers temps. “Depuis quelque temps déjà, les pouvoirs publics et les services de sécurité n'ont pas cessé de se coller à nos trousses et nous harceler perpétuellement parce que nous sommes investis d'une religion autre que l'islam”. Il nous révélera aussi que plus d'une soixantaine de personnes, dont des cadres et des intellectuels, ayant embrassé le christianisme, vivent à Tiaret mais sont contraintes à vivre dans l'anonymat. Au passage, ce dernier nous avouera que la communauté chrétienne est constituée un peu partout à travers l'Ouest algérien à l'instar de certaines autres régions du pays. R. SALEM