Les Algériens sont surtout préoccupés par la montée de la hausse des prix, l'inégal accès au logement et à l'emploi. Ils observent non sans ironie les “changements dans la continuité” dans un système qui peine à se réformer. L'Algérie est en crise. C'est ce que laisse entendre le nouveau Chef du gouvernement dans son discours à l'ouverture du congrès du RND. Notre pays est toujours gravement dépendant des seules ressources pétrolières y compris pour garantir notre alimentation importée. Des jeunes acculés au désespoir sont contraints au suicide à travers les mers. La criminalité et les fléaux sociaux se propagent à travers le pays y compris dans nos villages les plus reculés pendant que certains sont attelés à accumuler des richesses acquises. La bureaucratie est pesante. Elle ne s'adapte pas toujours et efficacement au service du citoyen et ne réalise pas la nécessité cruciale de faciliter l'investissement pour la création de richesses et surtout d'emplois si nécessaires face au poids pesant du chômage sur la société… Sans le pétrole, notre nourriture quotidienne ne pourra être assurée car elle dépend de coûteuses importations et que même les salaires des fonctionnaires ne pourraient être versés. Nous devons rompre avec le mythe de l'aisance financière et réaliser ce que dépense aujourd'hui l'Etat représentant des recettes pétrolières supérieures à 60 dollars… Tout ne va pas bien, conclut le Chef du gouvernement. Pourtant, l'Algérie a une embellie financière sans précédent depuis l'Indépendance. Elle accumule plus de 110 milliards de dollars de réserves en devises et pourrait dépasser la barre des 150 milliards de dollars. L'Algérie est près d'engranger environ 40 milliards de dollars de recettes tirées des exportations de pétrole et de gaz le 1er semestre. Le surplus accumulé au sein de la caisse de régulation dépasse les 3 700 milliards de dinars. L'Algérie va vers de nouveaux excédents financiers. Mais pourquoi l'Algérie est en crise en dépit de la poursuite de l'embellie financière. Le Chef du gouvernement a pointé du doigt les carences du système bancaire reflétées par l'incapacité à traduire les liquidités dont il dispose en projets créateurs d'emplois et de richesses, les limites de l'administration dans la promotion des investissements, les insuffisances dans la régulation, dans l'application de la loi pour tous. Mais Ouyahia ne dit pas tout. Il ne dit pas que l'Algérie va mal en raison de la nature du système politique actuel qui est générateur d'immobilisme et de panne économique et sociale. Ce système n'est pas apte à apporter des réponses aux maux sociaux et économiques pour incompétence d'une partie des centres de décision ou pour des conflits d'intérêts. Pour une autre raison également : les responsables ne sont comptables ni de leurs actions ni de leurs dépenses auprès de la population. En un mot, la gestion gouvernementale n'est pas soumise à une évaluation objective, précise et en fonction d'objectifs mesurables. Les responsables se maintiennent non pas pour avoir obtenu de bons résultats, mais pour des considérations politiques, claniques. Au plan économique, l'Algérie n'a pas encore de stratégie claire en matière de développement. Les hésitations à lancer un programme national de mise à niveau de grande ampleur pour pérenniser l'appareil de production local face à la menace de l'ouverture plus grande du marché et la concurrence de l'importation, constituent un indice de ces tergiversations. Parallèlement, la mise en œuvre d'une stratégie de développement des exportations hors hydrocarbures souffre de l'absence d'une volonté politique de lever les entraves à l'acte d'exportation et des lenteurs à asseoir une politique de diversification de l'économie nationale. Montée de la hausse des prix à la nomination d'un nouveau Chef du gouvernement et les recettes exceptionnelles enregistrées au cours des six premiers mois, la montée de l'inflation constitue un fait saillant de la conjoncture du 1er semestre. La hausse des prix, 5% au cours des cinq premiers mois, connaît des seuils jamais atteints depuis de nombreuses années. Elle est liée à la crise alimentaire mondiale, mais aussi à la croissance importante des dépenses publiques. Elle révèle une fragilité : l'incapacité de l'offre locale en particulier les besoins nationaux en céréales et en lait. Cette dépendance alimentaire a été favorisée par une politique de soutien agricole insuffisante, ou orientée vers la recherche de l'amélioration des rendements et l'intégration à l'industrie agroalimentaire. Quant à l'assainissement du commerce extérieur, la chasse aux barons de la drogue, il est très difficile de croire à ce discours. Tant d'enquêtes ont été menées, le résultat a été soit nul à l'issue des investigations, soit débouchant sur la condamnation des lampistes. N. RYad