Plusieurs organisations mondiales ont relevé la nouvelle reculade des pays riches concernant ce dossier lourd. L'avenir de la planète est en jeu, mais ce sont les premiers pollueurs qui doivent donner l'exemple. “Nous en sommes encore loin”, estiment ActionAid et Global Climate Initiative. Les pays les plus riches de la planète ont décidé, comme l'a ainsi voulu Washington depuis des années, d'associer les 200 pays membres des Nations unies en vue d'atteindre les objectifs de réduction de 50% des gaz à effet de serre d'ici 2050, et de la définition ultérieure, pays par pays, d'objectifs à moyen terme. Ils ont également décidé de mettre en place un groupe de travail qui plancherait sur l'après-protocole de Kyoto qui doit expirer en 2012, les pourparlers des Nations unies sur ce dossier devant aboutir lors d'un sommet à Copenhague en décembre 2009. Ce sont les principales décisions annoncées hier à Hokkaido au deuxième jour du sommet du G8 consacré à l'économie mondiale et au réchauffement climatique. Si l'Union européenne a favorablement accueilli cet accord, le considérant comme “une nouvelle vision partagée”, les Etats-Unis ont à nouveau fui leurs responsabilités. Le président Bush n'a pas hésité hier à conditionner l'accord américain par “la disponibilité” de la Chine et de l'Inde à réduire leurs émissions de gaz et, par conséquent, à limiter leur processus de développement en cours. D'ailleurs, Washington a obtenu qu'une date précise ne soit pas mentionnée pour les objectifs à réaliser à moyen terme, avant 2050. Le président américain a obtenu gain de cause en gommant du texte soumis par la présidence japonaise la date de 2025, de même qu'a disparu de la version finale toute évocation d'une traduction ultérieure de ces engagements à moyen terme en objectifs contraignants. Bush aurait seulement accepté de stabiliser ses émissions en 2025, et non de les réduire. Pour un pays responsable de plus de 30% de la pollution planétaire, il serait scandaleux, et c'est le moins qu'on puisse dire, d'évoquer le prétexte fallacieux de pays émergents dont les économies connaissent un boom impressionnant, pour éloigner encore davantage la perspective de s'impliquer comme il se doit dans la lutte contre le réchauffement climatique. Mais au-delà de la Chine et de l'Inde, le droit au développement et à la prospérité partagée est revendiqué par tous les pays marginalisés qui veulent, eux aussi, profiter des effets positifs de la mondialisation. En fait, si certains considèrent que le sommet de Hokkaido a permis de marquer une nouvelle étape dans la lutte contre les changements climatiques, ce n'est pas l'avis d'associations. L'actionAid de Grande-Bretagne a immédiatement réagi en affirmant, dans un communiqué rendu public à Hokkaido, que “lorsque le G8 dit que le climat concerne toutes les économies dans le monde, ils pensent bien entendu à la Chine et à l'Inde et refusent de reconnaître que le réchauffement du climat est un problème qu'ils ont eux-mêmes créé”.Cette association rappelle que la conférence de Bali de 2007 avait estimé que les pays riches devaient à eux seuls réduire entre 25% à 40% de dioxyde de carbone. Sur ce point, ActionAid déplore que cet objectif n'ait pas été mentionné dans la déclaration du G8. Pour cette association, l'usage du biocarburant, même s'il est jugé scientifiquement écologique, pourrait avoir de graves conséquences sociales avec l'appauvrissement de quelque 260 millions de personnes à travers le monde. De son côté, l'organisation suisse WWF, Global Climate Initiative va plus loin. Pour elle, l'objectif annoncé d'atteindre les 50% de moins de dioxyde de carbone est nettement insuffisant vu la gravité de la situation. Dans une conférence de presse tenue hier matin au centre international des médias, M. Kim Carstensen, directeur de WWF, a appelé le G8, responsable, selon son organisation, de plus de 62% d'émissions de gaz à effet de serre, à réduire les gaz carboniques à hauteur de 25% à 40% par an, et considéré que les autres pays doivent poursuivre un objectif de 10% à 15% par an afin d'éviter la catastrophe écologique. Si le Japon a mis en place une politique écologique en plantant plus de 20 millions d'arbres ces dernières années en optant pour les énergies renouvelables, marquant ainsi sa position de leader dans la lutte contre les changements climatiques, ce n'est pas le cas des autres pays industrialisés. La crise de la consommation dans le monde, les politiques de délocalisation permettant aux multinationales de tirer profit des productions à moindres frais, le droit de toutes les nations au développement et le refus des pays riches de céder sur l'émission des gaz carboniques constituent aujourd'hui une situation complexe, qui dépasse certes le G8 mais dont les premières résolutions effectives doivent impérativement venir de lui. Au cas échéant, c'est toute la planète qui en pâtira. S. T.