En déclarant hier lors de sa visite dans la capitale espagnole : “il est évident que pour le Maroc, Ceuta et Melilla sont marocains”, le ministre marocain de l'Economie et des Finances, Salaheddine Mezouar, a remis au goût du jour le différend opposant l'Espagne au Maroc sur ces deux enclaves occupées par Madrid et revendiquées régulièrement par Rabat. Mais, il y a lieu de faire remarquer que, cette fois-ci, les dirigeants marocains ne semblent pas avoir l'intention de raviver la tension dans l'immédiat. C'est ce qui ressort des déclarations du ministre marocain, qui s'exprimait au cours d'une rencontre avec des responsables économiques et politiques espagnols ouverte à la presse. Ce dernier, après avoir indiqué que les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla dans le nord du Maroc sont, aux yeux de Rabat, “évidemment” marocaines, n'a pas manqué d'ajouter que le Maroc ne “va pas faire monter la pression” sur ce thème alors que l'Espagne est un “pays ami” pour le royaume chérifien et “le temps va gérer cette question”. Faisant preuve de beaucoup de diplomatie, il a déclaré : “Je crois que le bon sens va finir par gagner. La frontière va continuer à exister dans le futur? Je ne le crois pas”. En d'autres termes, Rabat semble avoir opté pour la diplomatie pour régler ce différend séculaire entre les deux pays. En effet, le Maroc considère les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla comme “occupées” et faisant partie de son territoire, alors que l'Espagne refuse toute discussion sur ces villes où elle exerce sa souveraineté depuis, respectivement, 1580 et 1496. La tension est montée d'un cran au début du mois de novembre 2007, à l'occasion d'une visite du roi d'Espagne Juan Carlos, dans les deux enclaves. Il en avait résulté une vive tension entre Madrid et Rabat, marquée par le rappel de l'ambassadeur marocain en Espagne pendant plusieurs semaines. Les visites des officiels espagnols à Ceuta et Melilla sont vues par le Maroc comme une volonté de l'Espagne de vouloir confirmer sa souveraineté sur les deux villes. Depuis, le calme semble revenu dans les rapports hispano-marocains, mais à la moindre occasion, les responsables des deux pays ne ratent pas l'opportunité de rappeler leurs positions sur la question. Ainsi, au cours de sa dernière visite au Maroc, au début du mois de juillet courant, le chef du gouvernement espagnol, José Luis Rodriguez Zapatero, avait tenu à réaffirmer ses vues sur les deux enclaves mais de manière privée et discrète, selon la presse espagnole citant des sources diplomatiques. Madrid n'aurait donc nullement l'intention de “restituer” Ceuta et Melilla à Rabat. En revanche, Mohammed VI, ne désespère pas de récupérer un jour ces deux enclaves. Leur statut et leur avenir demeurent un enjeu capital, que ce soit pour le Maroc ou pour l'Espagne. C'est dire que le conflit est bien parti pour durer dans le temps. K. ABDELKAMEL