Le hadj, produit “out going” qui se traduit par une sortie de citoyens et de devises du pays, est subventionné, alors que l'hôtellerie nationale, censée recevoir des touristes appelés à apporter, entre autres, des devises et les dépenser dans le pays, vient d'être taxée. La loi de finances complémentaire 2008 vient de retenir le principe de l'imposition de l'activité hôtelière nationale pour renforcer le financement des collectivités locales. Ainsi, la taxe de séjour se voit élargie à l'ensemble des communes. ?tabli par nuitée et par personne, son montant varie entre 50 et 60 dinars sans excéder les 100 dinars algériens par famille. Pour les hôtels classés, elle est de 200 dinars pour les 3 étoiles, 400 dinars pour les 4 étoiles et 600 dinars pour les 5 étoiles. Du coup, en passant une semaine dans un établissement hôtelier algérien de 3 étoiles, à entendre normes locales donc démuni de toutes les commodités, un couple paiera, en guise de taxes de séjour, la somme de 2 800 dinars algériens, ce qui représente le prix producteur de deux jours dans un 4 étoiles tunisien en basse saison. Quand l'hôtel algérien est un “4 étoiles”, le surcoût est multiplié par deux. Cette mesure prise isolée du contexte économique national peut paraître normale. Sauf que cette taxation du produit touristique national, pour renforcer les moyens de financement des collectivités locales, a été précédée auparavant par une décision qui ne répond à aucune logique, si ce n'est celle du populisme. En effet, le gouvernement sortant a décidé de subventionner, pour cette année, le produit hadj faisant supporter à la collectivité la moitié de la majoration des surcoûts de cette campagne. ? chaque forfait hadj, le Trésor public apporte en concours définitif la somme de 35 000 dinars. Ainsi, pour un nombre de 30 000 hadjis, la cagnotte est de 1 050 000 000 DA ! Cette subvention s'avère être en contradiction avec et les préceptes religieux et les bases d'une économie saine. Côté religieux, le hadj, cinquième pilier de l'Islam, est prescrit uniquement pour ceux qui en ont les moyens. En d'autres termes, y sont exclus, théologiquement parlant, tous ceux qui recourent à l'assistance et l'assistanat pour l'accomplir. Côté économique, les ?tats nations continuent à utiliser, dans un environnement économique mondial de plus en plus ouvert, les rares opportunités toujours possibles en matière de protectionnisme pour décourager les importations. Or, le hadj est un produit qu'importe l'Algérie, annuellement, pour ses citoyens. ? l'instar de tout produit touristique, la consommation du hadj se fait en dehors du pays du consommateur. C'est l'exception touristique ! ? ce stade, l'Algérie vient de subventionner l'importation d'un produit qui n'est pas de première nécessité, favorisant la sortie de fortes sommes de devises. En parallèle, elle vient de taxer, donc rendre moins compétitif, le produit de l'hôtellerie nationale. Situation difficile à expliquer et dont la première retombée sera l'accentuation du processus de clochardisation du parc hôtelier déjà assimilable, en grande partie, à des lieux de prostitution. Le gouvernement a le droit d'assumer sa mission de régulateur à travers différents leviers, dont la fiscalité. L'actuel a le mérite de recourir aux leviers fiscaux et monétaires au lieu des actions populistes. Seulement, pour le tourisme, en face d'un ?tat devenu soucieux d'assumer ses prérogatives, point de contre- poids issu du secteur. La seule question qui a mobilisé, à ce jour, les représentants de la corporation est celle relative à la distribution du quota hadj entre les agences de voyages. ? cela s'ajoute l'absence dans le paysage médiatique d'une presse spécialisée à même de niveler par le haut le débat sur les grands dossiers. Mourad KEZZAR