Vénéré en Occident, le quatorzième dalaï-lama est en France pour une visite de douze jours. Il a l'habitude d'y séjourner, mais cette fois-ci, sa dixième visite ne suscite que controverses. Elle a lieu en plein déroulement des jeux Olympiques de Pékin. Les Chinois, qui accusent l'hôte de la France de vouloir saboter leurs jeux, ont sommé le président français d'éviter cet empêcheur de tourner en rond au Tibet. Et Nicolas Sarkozy s'est plié, zappant de son agenda toute rencontre avec le chef spirituel du bouddhisme. Par ailleurs, malgré les critiques de l'opposition française et d'une bonne partie de l'opinion française, le président français s'est rendu, après beaucoup d'atermoiement, à l'ouverture des jeux Olympiques, prétextant qu'il préside l'Union européenne et qu'il ne fallait pas sacrifier le courant d'affaires franco-chinois. Il devait ainsi se réjouir, la veille de l'arrivée du dalaï-Lama à Paris, de l'accord intervenu entre EDF et le groupe électricien chinois Guangdong Nuclear Power Group pour la construction de deux réacteurs EPR. Du reste, le dalaï-lama, lui-même, joue à l'apaisement, déclarant que la coïncidence de son séjour français et l'organisation des jeux de Pékin est purement fortuite, soulignant qu'il a été programmé bien avant les émeutes de mars au Tibet et le parcours chahuté de la flamme olympique à Paris. Le prix Nobel de la paix, qui dit limiter délibérément sa visite en France à sa dimension spirituelle, parle “de trêve olympique”, considérant lui-même qu'une rencontre avec Sarkozy aurait été une provocation. La prudence de Sarkozy n'est pas du goût des militants de la cause tibétaine, y compris des plus modérés, pour qui la visite du dalaï-lama aurait été une bonne occasion de faire entendre “la voix réprimée du Tibet”. Ils rappellent que le dalaï-lama a été reçu par le président Mitterrand en 1993 et, depuis un an, malgré la colère de Pékin, par George Bush, Angela Merkel ou Gordon Brown. Donc pas de tapis rouge pour le dalaï-Lama, une seule rencontre à caractère politique est prévue au Sénat, aujourd'hui, avec les parlementaires de l'association France-Tibet. Mais le président français, qui affectionne les provocations et mélange sphères privée et publique dans sa fonction présidentielle, a chargé son épouse de rencontrer le dalaï-Lama à la clôture de la visite du chef du bouddhisme. Le Parti socialiste a rebondi sur le subterfuge, dénonçant “la mise en scène”. Pour lui, Carla Bruni-Sarkozy est investie d'une mission diplomatique. Dans un communiqué, les socialistes ont déclaré “choquante”, la mise en scène autour de l'épouse du président, qui ne jouit d'aucune légitimité démocratique et qui participe au grand imbroglio de Nicolas Sarkozy sur la question chinoise. pour conclure : “La diplomatie sarkozyste n'a plus aucune cohérence et affaiblit la France.” D. B.