Condoleezza Rice est à Tbilissi puis se rendra à Moscou. La colère de Washington contre la Russie, c'est pour sauver le président géorgien dont l'offensive sur l'Ossétie du Sud et l'Abkhazie s'est retournée contre lui. Moscou est resté inflexible et le plan franco-européen n'est qu'un retour à la situation avant le coup de force de Saakachvili. Même la menace de fermer la porte de l'OMC à la Russie est improductive. D'aucuns s'interrogent en tout cas sur les bénéfices que pourrait tirer Moscou d'une entrée à l'OMC, sauf à figurer dans un cénacle mondial de plus. ?conomiquement, la Russie ne perdrait pas grand-chose à rester dehors parce que ses plus grosses exportations sont l'énergie et les matières premières, dont la demande flambe dans le monde entier et qui bénéficie de faibles droits de douane dans de nombreux pays. Du reste, la France en tant que présidente de l'UE, doit bientôt proposer un nouveau projet de résolution au Conseil de sécurité. Le texte comporte également l'obligation, pour la Géorgie, de lever son veto à la candidature russe à l'OMC. Aujourd'hui, dans la plupart des capitales occidentales, soutien de la Géorgie, il est murmuré qu'en décidant l'assaut contre l'Ossétie du Sud et l'Abkhazie, le président géorgien “a joué à quitte ou double et a perdu”. “Une catastrophe s'est abattue sur la Géorgie”, a révélé un quotidien de la droite française, soulignant : “Les images romantiques des présidents d'Europe centrale et orientale, faisant corps avec le président Saakachvili face à l'agression russe, diffusées en boucle par la télévision géorgienne, ne parviennent pas à cacher cette réalité essentielle” ! Ce petit pays du sud du Caucase, qui, depuis 1991, a fait le choix de se mettre sous le parapluie occidental, a subi en quelques jours une véritable déroute politique, militaire, morale, économique et stratégique. Pourtant l'armée géorgienne a connu une très grande modernisation, avalant des sommes considérables, 1 milliard de dollars l'année dernière. En décidant un assaut contre la capitale des séparatistes ossètes, dans des circonstances qui restent très mystérieuses, Saakachvili a mis “en péril le rêve d'Occident de la Géorgie”, commentent les journaux européens. Les pertes humaine et matérielles sont immenses et l'espoir de récupérer l'Abkhazie et l'Ossétie du Sud s'est envolé en fumée, de même que celui de rejoindre l'Otan dans un proche avenir, les pays européens étant très divisés sur le sujet malgré les pressions des ?tats-Unis. La presse de Tbilissi s'interroge : “Qui a pris la responsabilité de lancer l'attaque contre Tskhinvali (capitale de l'Ossétie) ?... Quoi qu'on pense du comportement impérial de la Russie, de son agressivité, il est indéniable que le président géorgien porte la responsabilité du déclenchement des opérations. Il devra répondre à des questions qui jusqu'ici avaient été mises de côté, car l'unité nationale prévalait face au danger russe”. Certains à Tbilissi craignent que la colère, nourrie d'une déception envers l'Occident, n'explose, acculant Saakachvili au départ. D'où ces précipitations dans les capitales occidentales, en premier chef les ?tats-Unis, qui pensaient pénétrer facilement dans l'arrière-cour de la Russie où le climat est à la satisfaction. Moscou menace même de ne plus reconnaître l'intangibilité des frontières de la Géorgie, établissant un line avec la proclamation unilatérale de l'indépendance du Kosovo, une province de la Serbie. D. B.