Les vacances d'été n'ont pas les mêmes connotations pour tout le monde. Si elles sont synonymes de repos et de détente pour certains, pour les enfants issus de milieux défavorisés, elles riment plutôt avec labeur, sueur et dépassement de soi. En ces journées caniculaires de septembre coïncident avec le début du mois de Ramadhan, ces derniers sont par dizaines, voire davantage, à s'essayer à de petits boulots conjoncturels dans une vaine tentative de contribuer aux défenses familiales en cette période très particulière de l'année. À Mila, comme dans la plupart des agglomérations de cette wilaya de l'intérieur, les petits débrouillards investissent les rues à des moments de pointe afin d'exercer leur petit commerce de rue. On les retrouve invariablement devant les deux marchés de la ville, en face de la mosquée Moubarek El-Mili, à proximité du jardin public du centre et à la gare routière. Ils proposent à la cantonade aux passants toutes sortes de produits, fruits et légumes de saison, bouquets d'herbes aromatiques, confiseries traditionnelles, galettes d'orge, pièces de poteries domestiques, pain boulanger et pleins d'autres produits. Ce sont pour la plupart des écoliers ou des collégiens que les dures conditions de vie ont poussés tôt au travail. Une virée effectuée le week-end dernier, sur les lieux nous a permis de faire une découverte des plus inattendues. Figurez-vous, tous les petits vendeurs et vendeuses de galettes d'orge qui s'installent en face de la mosquée Moubarek El-Mili, une dizaine environ, sont tous des élèves de cinquième année primaire. Ils habitent tous à Bin Ladjenain, au vieux Mila et fréquentent tous la même école, celle de Mila Lakdima. Interrogés sur le pourquoi de cette activité, Slimane, Kheireddine, Safa et Maroua (sœurs jumelles) sont unanimes : “On veut aider nos familles et nous acheter des vêtements pour la rentrée scolaire.” Mais ceux-ci ne sont pas les seuls à vouloir aider leurs familles en pratiquant ce commerce. L'environnement du jardin public est investi par des grappes d'adolescents qui font dans la revente du pain boulanger. Le but est le même “permettre à ma famille de mieux manger le soir”, nous dira Hocine, du haut de ses 15 ans. Au moment où la rue de Grarem foisonne de jeunes vendeurs de petit-lait “l'ben”, dont certains viennent de loin, à l'image de Radouane, futur collégien, qui vient chaque jour de la localité de Boufouh, à l'ouest de Mila, pour écouler son produit domestique en ville. Et si l'on s'amuse à faire de la sorte dans l'énumération, on risque de s'étendre beaucoup, car de quelque côté que le regard se tourne, à Mila Centre, c'est le même spectacle d'enfants qui crient à tue-tête toutes sortes de produits. Aussi, les autorités sont-elles appelées à revoir les dispositifs d'aide aux pauvres mis en place. Lesquels n'ont pas l'air de bien marcher. Sinon, comment expliquer cette situation d'extrême besoin, où des fillettes de 11 ans sont obligées de contribuer aux dépenses familiales ? K. BOUABDELLAH