Il a baissé ; il a grimpé ; il est redescendu. Les Algériens devraient donc suivre les tribulations du prix des hydrocarbures pour savoir de quoi leur menu sera fait dans quelques mois, dans quelques semaines… Et beaucoup le font déjà. La déclaration du Chef du gouvernement sur “le danger” d'un baril à soixante-dix dollars sonne comme un BMS. Il aura donc suffi de quelques journées de déprime boursière pour que le gouvernement s'inquiète et nous alarme. Pourtant, jusqu'en 2008, nous avons vécu avec des budgets conçus sur la base de dix-neuf dollars le baril. Le différentiel était versé dans un fonds de régulation des dépenses publiques. Apparemment, ce fonds n'est qu'un complément de recettes budgétaires, régulièrement sollicité pour combler des déficits budgétaires qui dépassent les 20% du PIB et des réévaluations de projets qui, pour le programme 2005-2009 par exemple, sont estimées à quarante milliards de dollars. Aux déficits budgétaires programmés, aux réévaluations systématiques, à la non-maîtrise des importations, s'ajoutaient les improvisations des programmes spéciaux Sud et Hauts-Plateaux. Il semble donc que le matelas de précaution a été consommé au même titre que les recettes mobilisées par le budget. Le gouvernement a probablement tablé sur un baril volant irrésistiblement vers les 200 dollars, comme le prédisait notre ministre de l'Energie. Si la situation financière ainsi schématisée est proche de la réalité, on comprend que le pouvoir se démène comme il peut pour réduire les dégâts. Finalement, malgré le slogan de “l'après-pétrole”, le pays est plus que jamais géré en Etat rentier. Pire, tout se passe comme s'il était devenu ingérable à moins de cent dollars le baril. En pire parce qu'il y a eu une inflation budgétaire due à l'amélioration du train de vie de l'Etat, à l'augmentation substantielle des plus gros salaires et indemnités de la Fonction publique, à un soutien des prix élargi à de nouveaux produits qui, en plus de profiter aux bas revenus, profite injustement aux plus élevés et est source de spéculations. C'est donc dans ce contexte de doute sur l'avenir financier, d'incertitude sur le contexte international et de ce que certains appellent “une dérive dépensière” que se conçoit le programme quinquennal 2009-2014. Qui n'est pas un programme quinquennal 2009- 2013 ou 2010-2014 (ce qui correspondrait à cinq exercices budgétaires), mais un programme quinquennal 2009-2014 ; autant dire avril 2009-avril 2014. Soirée après soirée, secteur après secteur, il prend forme. Et ressemble étrangement à un bilan où s'inscrit tout ce qui aurait dû être réalisé dans les programmes précédents et qui n'a pas été fait : de l'eau pour les Hauts-Plateaux, l'assainissement du secteur de la santé, la modernisation de l'université, le développement du rail… Dans cette atmosphère d'appréhension devant une conjoncture économique et des finances incertaines où l'envie de rattraper un bilan déficitaire semble le disputer à l'ambition d'entamer enfin une relance maîtrisée, le pouvoir veut tout faire en quelques mois. Quelques mois qui doivent aussi, et surtout, servir à imposer le statu quo politique. M. H. [email protected]