Le gouvernement français a demandé l'inscription au Sénat le 23 janvier de la proposition de loi sanctionnant la négation de tous les génocides dont celui des Arméniens de 1915, à l'origine d'une crise diplomatique entre Ankara et Paris, a-t-on appris lundi auprès du groupe de l'UMP (majorité au pouvoir) au Sénat. Cette date devra encore être confirmée lors de la prochaine conférence des présidents de la Chambre haute du Parlement français qui décide de l'ordre du jour du sénat et qui se tiendra le 17 janvier. L'Assemblée nationale a adopté le 22 décembre cette proposition de loi de la députée Valérie Boyer qui prévoit de punir d'un an de prison et de 45 000 euros d'amende la négation d'un génocide reconnu par la loi française. Le chef de file des sénateurs socialistes François Rebsamen avait demandé dès le 23 décembre l'inscription du texte «dans les plus brefs délais». Une proposition de loi avait été votée en 2006 par l'Assemblée nationale, mais rejetée par le Sénat le 2 mai 2011 alors à majorité de droite. Pour le ministre chargé des relations avec le Parlement, Patrick Ollier, «cette fois, l'adoption du texte par le Sénat semble plus certaine, puisqu'un consensus existe». «Même si ce texte est porteur de soupçons électoralistes, rien ne serait pire aujourd'hui que de l'enterrer, suscitant ainsi la déception de la communauté arménienne, après avoir soulevé l'indignation et la colère de la communauté turque», a déclaré François Rebsamen. A l'Assemblée nationale, le texte avait été adopté à une très large majorité malgré des voix discordantes à gauche comme à droite. Au sein du gouvernement français, le chef de la diplomatie, Alain Juppé, avait alors qualifié la proposition de loi de pas opportune. Suite au vote de cette proposition de loi, le 22 décembre, à l'Assemblée nationale, le Premier ministre turc a ordonné la suspension des visites bilatérales, le rappel pour consultations de l'ambassadeur de Turquie en France, et déclaré que les exercices militaires communs avec la France, pourtant alliés au sein de l'Otan et toutes les activités militaires avec ce pays sont annulés pour protester contre l'adoption de ce texte. La Turquie a également menacé la France de sanctions économiques. «Ce vote qui a eu lieu en France, une France où vivent environ cinq millions de musulmans, a clairement montré à quel point le racisme, la discrimination et l'islamophobie ont atteint des dimensions dangereuses en France et en Europe», a asséné le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, accusant la France de jouer sur «la haine du musulman et du Turc» pour des gains électoraux. Le génocide arménien de 1915 aurait fait 1,5 million de morts, selon les Arméniens. La Turquie reconnaît que jusqu'à 500 000 Arméniens sont morts pendant des combats et leur déportation, mais non pas par une volonté d'extermination.