Neuf banques espagnoles dégradées par Standard and Poor's. Le secteur bancaire espagnol inquiète de plus en plus les dirigeants européens, qui considèrent ce dernier comme le prochain talon d'Achille de la zone euro. Pourtant, Madrid assure pouvoir faire face à la situation sans aide extérieure. L'Espagne n'a besoin d'aucun type d'aide extérieure pour sauver son secteur bancaire. Si Luis de Guindos, ministre espagnol de l'Economie, a ressenti la nécessité, lundi 21 mai, de souligner la capacité de son pays à surmonter seul ses difficultés. De plus en plus de monde s'inquiète de ce nouveau grand corps malade européen, écrit Sébastien Seibt. Poursuivant, l'auteur assure que l'agence de notation a jeté, le 17 mai, un grand froid en dégradant la note de 16 établissements bancaires espagnols. François Hollande, le nouveau président français, avait appelé, dès le lendemain, à l'activation d'un «mécanisme de solidarité européenne» pour assainir les comptes des banques espagnoles. Enfin, Bruxelles a exhorté Madrid à lancer au plus vite un audit de son secteur financier et le Premier ministre, Mariano Rajoy, a mandaté en fin de semaine des «experts indépendants» à cette fin. Toujours plus de créances douteuses Le secteur bancaire espagnol semble, en effet, être entré dans une phase critique de son existence. «À l'heure actuelle, 60% des créances immobilières détenues par les banques sont douteuses», résume pour France 24 Pascal de Lima, économiste spécialiste du secteur bancaire et enseignant à Sciences-po Paris. Ce sont donc plus de 180 milliards d'euros — prêtés durant les années d'euphorie immobilière (2000-2007) — dont les établissements financiers espagnols risquent de ne jamais revoir la couleur. Et c'est la faute à l'explosion de la bulle immobilière en Espagne en 2007. «Depuis lors, les prix de la pierre baissent et la récession dans laquelle le pays s'enfonce aggrave la situation», explique Danielle Schweisguth, spécialiste de l'Espagne à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). En 2012, la quatrième économie européenne devrait voir son PIB chuter de près de 2% (1,7% selon les dernières projections du gouvernement publiées ce lundi). Une contraction qui risque d'«augmenter encore le nombre de ménages en difficulté qui ne peuvent plus payer leur crédit immobilier», craint Pascal de Lima. Les banques risquent donc de devoir augmenter encore leurs provisions pour faire face à d'éventuels impayés. «Tout cet argent que les banques espagnoles mettent de côté, elles ne le prêtent pas aux entreprises et aux ménages, ce qui fragilise davantage encore l'économie», souligne Pascal de Lima qui estime que l'Espagne est entrée dans un cercle vicieux dont il est difficile de sortir. Cartouche de la dernière chance La marge de manœuvre pour sauver le soldat bancaire est très mince. Les principales fusions dans le secteur ont déjà eu lieu, et ce, depuis 2007. «Cela n'a visiblement pas suffi à le rendre solide», note Pascal de Lima. Par ailleurs, si le gouvernement a nationalisé, il y a deux semaines, Bankia, «Madrid n'a pas les ressources nécessaires pour nationaliser toutes les banques en difficulté», fait remarquer le spécialiste. Reste la perspective d'un soutien financier international comme celui dont bénéficient la Grèce, l'Irlande et le Portugal. Un tel plan — qui pourrait atteindre 300 milliards d'euros — risque cependant de vider les caisses du Mécanisme européen de stabilité financière. Or, la situation n'exigerait pas encore de griller cette cartouche de la dernière chance, selon Pascal de Lima. Ce spécialiste préfère que la Banque centrale européenne joue les pompiers... en espérant que les banques espagnoles résistent le temps de sortir de la récession.