C'est le prix d'un développement économique effréné. En Asie, la pollution atmosphérique est devenue un véritable fléau, qui a causé la mort de 2,1 millions de personnes en 2010, selon une vaste étude sur la charge mondiale des maladies publiée le vendredi 14 décembre dans l'hebdomadaire médical britannique The Lancet. Parmi les 67 facteurs de risque étudiés, la pollution de l'air extérieur se situe au quatrième rang de la mortalité en Asie de l'Est (Chine principalement), où elle a contribué à 1,2 million de décès en 2010, et en sixième place en Asie du Sud (Inde, Pakistan, Bangladesh ou Sri Lanka), où elle en a provoqué 712 000. Ce sont aussi, pour utiliser un indicateur de l'Organisation mondiale de la santé, 52 millions d'«années de vie corrigées de l'incapacité» (disability-adjusted life years en anglais) qui ont été perdues en Asie – soit la somme des années de vie potentielles perdues en raison d'une mortalité prématurée et des années productives perdues en raison d'incapacités. Le chiffre des victimes de la pollution de l'air s'élève aujourd'hui à 3,2 millions de personnes sur le globe, contre 800 000 en 2000. De sorte que le phénomène se classe pour la première fois dans les dix premières causes de décès au monde. Elle contribue également à la hausse des taux d'accidents vasculaires cérébraux et de crises cardiaques. Surtout, si les chiffres de la pollution atmosphérique étaient combinés avec ceux de la pollution de l'air intérieur, causée en grande partie par la cuisine au charbon ou au bois, la mauvaise qualité de l'air se positionnerait au deuxième rang des maladies mortelles au monde, derrière seulement l'hypertension artérielle, précise le rapport. Pollution des véhicules En cause ? La pollution des véhicules tout d'abord. Les voitures et camions rejettent de nombreux gaz toxiques, au premier rang desquels le dioxyde d'azote. Les moteurs diesel émettent par ailleurs des particules fines qui favorisent ou aggravent les maladies pulmonaires. Ces rejets s'avèrent en augmentation rapide en raison de la très forte poussée des ventes de voitures en Asie depuis environ cinq ans. En 2011, la Chine a ainsi enregistré le quart des ventes d'automobiles au monde (19 millions), tandis que l'Inde a fait son entrée dans les dix pays où il s'en écoule le plus (3,3 millions). Autres facteurs de pollution : la construction et l'industrie, qui fonctionnent en grande partie au charbon dans cette région du monde. La Chine tire par exemple plus de 70% de son énergie de la combustion du charbon, ce qui en fait le premier émetteur mondial de gaz à effet de serre et un pays particulièrement exposé aux particules fines. «Il existe des preuves flagrantes qui nous montrent qu'il est urgent d'agir pour réduire les émissions car personne, en particulier les enfants, les personnes âgées et les pauvres, ne peut échapper à un air toxique», estime Anumita Roychowdhury, responsable des recherches sur la pollution de l'air au Centre for Science and Environment, organisation sise à New Delhi. Le centre recommande que les normes nationales sur la qualité de l'air deviennent juridiquement contraignantes dans toute l'Inde. La concentration en particules fines dans l'atmosphère s'avère en effet bien au-dessus des limites légales de 100 microgrammes par mètre cube, et peuvent même grimper à près de 1 000 microgrammes pendant certaines festivités. Surtout, ajoute l'organisme, l'Inde doit contrôler, puis réduire, l'explosion du nombre de véhicules en multipliant les transports en commun et les transports non motorisés. Des carburants de meilleure qualité pourraient également réduire l'impact sanitaire de la motorisation.