Le ministre syrien de l'Information Omrane al-Zohbi a accusé samedi dernier les autorités turques d'agir de façon « terroriste » contre le peuple turc, et a appelé le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan à démissionner. « Les revendications du peuple turc ne méritent pas toute cette violence et si Erdogan est incapable d'user de moyens non violents, il doit démissionner », a déclaré le ministre syrien, cité par la télévision officielle. Voilà ce que l'on appelle rendre la monnaie. En effet, si l'on se fie aux images inattendues et impressionnantes qui ont fait le tour de la planète : rues bondées de manifestants, affrontements violents, foules traversant le pont du Bosphore à pied au petit matin..., on serait tenté de se demander « ce qui se passe dans ce pays qui a pourtant vu ces dernières années un miracle économique que beaucoup lui envient ; dont le parti au pouvoir, l'AKP, est parvenu à se faire reconduire avec pratiquement 50% des voix ; qui est acclamé dans les forums internationaux ; et qui semblait en passe de régler le plus épineux dossier politique, la question kurde ? », se questionne un analyste. Et pourtant, les protestations écologiques paisibles de la dernière semaine de mai à Istanbul s'étaient transformées vendredi et samedi en manifestations politiques massives contre la politique du Premier ministre Tayip Erdogan. Le prétexte de ce changement, c'était la dispersion cruelle par la police de la protestation écologique sur la place Taksim le 28 mai. Les manifestants demandaient de supprimer les plans de la reconstruction du parc de Gezi, un des rares îlots verts dans le centre de la ville. La police a utilisé contre les manifestants des canons à eau et le gaz lacrymogène. Après cela, la vague de protestations s'est levée dans tout le pays et a embrassé la capitale - Ankara, puis Izmir, Bodroum, Konju, la région touristique d'Antalya. L'opposition s'est jointe aux manifestants. Un scénario semblable à celui du soulèvement tunisien. Maintenant, le principal slogan est d'arrêter l'islamisation de la Turquie. Le Premier ministre Erdogan est accusé de conservatisme religieux, du style autoritaire et on exige la démission de tout le gouvernement. À la fin de la journée, le 1er juin, le nombre de personnes arrêtées a atteint un millier. Le chef du ministère de l'Intérieur Mouammer Guler a déclaré que les revendications étaient enregistrées dans 48 provinces du pays. A Ankara, les manifestants ont jeté des pierres et des cocktails Molotov sur le bureau du Premier ministre. Dans toutes les villes, ils tentent de détruire les bureaux du Parti islamiste de la justice et du développement, au pouvoir dans le pays. Selon les déclarations du chef du Centre des études orientales de l'Académie diplomatique auprès du ministère des Affaires étrangères de Russie Andreï Volodin : « En dehors des problèmes écologiques, en dehors de la crise syrienne, qui affaiblit la Turquie de l'intérieur, et le problème kurde, en Turquie, le chômage grandit très vite. Particulièrement le chômage parmi les jeunes. Cela me rappelle très fortement les révolutions arabes de 2011- 2012». Situation qui aboutira sans doute au slogan : « Dégage ! » Attendons pour voir.