Les Etats-Unis ont durci leur position face au régime en Syrie en l'accusant pour la première fois aussi clairement d'avoir eu recours aux armes chimiques dans sa guerre contre les rebelles et en promettant une aide militaire aux insurgés. La Russie, alliée indéfectible du régime de Bachar Al-Assad, a immédiatement vendredi volé au secours de son protégé en jugeant «pas convaincantes» les accusations américaines et en estimant nuisibles aux efforts de paix la décision américaine d'accroître l'aide aux rebelles. Le pouvoir à Damas n'a pas encore réagi aux accusations américaines mais il avait lui-même accusé en mars les rebelles d'avoir eu recours à des armes chimiques dans une région d'Alep (nord) et refusé une enquête de l'ONU sur l'ensemble du territoire syrien. «Après un examen approfondi, la communauté du renseignement (américaine) estime que le régime Assad a utilisé maintes fois des armes chimiques, dont le gaz sarin, à échelle réduite contre l'opposition dans l'année écoulée», a dit jeudi le conseiller adjoint de sécurité nationale du président Barack Obama. «100 à 150 personnes ont péri» dans ces attaques. Selon Ben Rhodes, M. Obama «a affirmé que le recours à des armes chimiques changerait son équation, et c'est le cas». «Le président a augmenté l'étendue de l'aide non-létale à l'opposition civile, et autorisé l'augmentation de notre aide» à la direction des opérations militaires rebelles alors que Washington s'est jusqu'ici refusé à franchir l'étape de la livraison d'armes. Il a ajouté que la Maison Blanche n'était pas encore parvenue à une décision sur l'imposition ou pas d'une zone d'exclusion aérienne, une demande de l'opposition syrienne pour contrer la puissance de force aérienne du régime. Mais selon le Wall Street Journal, les responsables militaires américains ont proposé de mettre en place une petite zone d'exclusion aérienne qui couvrirait les camps d'entraînements des combattants de l'opposition. La zone s'avancerait d'environ 40 km à l'intérieur de la Syrie et serait en fait surveillée par des avions volant en Jordanie et armés de missiles air-air. Une autre mesure proposée pour aider la rébellion prévoit la livraison de petites armes dont des armes anti-chars, écrit le New York Times. Dans un communiqué de son bureau aux Etats-Unis, l'opposition syrienne a salué «l'augmentation de l'aide américaine qui comprend un soutien militaire direct». Le secrétaire général de l'Otan Anders Fogh Rasmussem a jugé «urgent que le régime syrien laisse l'ONU enquêter sur l'usage d'armes chimiques», qualifiant un tel recours de «totalement inacceptable» et de «violation du droit international». La France avait déjà dit être certaine de l'utilisation d'armes chimiques en Syrie et Londres a dit hier, vendredi, partager «l'analyse» américaine. Dans le camp opposé, le conseiller diplomatique du Kremlin Iouri Ouchakov a déclaré: «Nous le dirons clairement, ce qui a été présenté par les Américains ne nous semble pas convaincant». Il a ajouté qu'une décision américaine d'accroître l'aide aux rebelles «compliquera» les efforts de paix, alors que Washington et Moscou tente, avec beaucoup de difficultés, depuis plusieurs semaines de réunir une conférence internationale sur la Syrie. Ces déclarations et réactions font ressurgir les divisions internationales sur le conflit en Syrie pour lequel aucune solution n'est en vue malgré les violences et atrocités commises et qui ont fait plus de 93 000 morts depuis mars 2011 selon l'ONU. En Turquie, des pays soutenant l'opposition devaient discuter vendredi avec le chef d'état-major de l'Armée syrienne libre (ASL), Sélim Idriss, d'une «mise en œuvre concrète» de l'aide à la rébellion, une réunion qui était prévue avant les dernières accusations américaines. Et à Beyrouth, Hassan Nasrallah, le chef du mouvement chiite libanais Hezbollah dont l'engagement militaire au côté du régime syrien a permis des succès sur le terrain face aux rebelles, doit prononcer un discours dans l'après-midi. Forte de ses succès, dont la prise de la ville clé de Qousseir, l'armée était engagée vendredi dans des combats à Alep (nord) où elle veut écraser la rébellion. La participation du Hezbollah chiite au conflit a exacerbé les tensions confessionnelles en Syrie, pays à majorité sunnite, mais aussi au Liban voisin où le chef de l'opposition, le sunnite Saad Hariri, a accusé le Hezbollah d'être porteur d'un projet «destructeur».