C'est parce que le regretté Cheikh H'ssissen a beaucoup donné pour la culture algérienne que l'auteur et journaliste Abdelkader Bendamèche lui a consacré un ouvrage, publié récemment aux éditions ENAG. Dans une rencontre réalisée avec Cheikh H'Ssissen était un fervent admirateur de la chanson châabi. Originaire d'un village situé entre Tizi Ameur et Boumehni, Cheikh H'sissen est né le 8 décembre 1929 à la Casbah d'Alger. Il y passe, d'ailleurs, toute son enfance. Son frère jumeau meurt, le laissant ainsi seul. Gâté et choyé à la fois, il suit son cursus scolaire à Ben Aknoun où il décroche son Certificat d'études primaires. La Seconde Guerre mondiale con-traint H'ssissen à recourir à des petits métiers, comme vendeur de journaux. Il décide de mettre fin à ses études pour subvenir aux besoins de sa famille. Son oncle maternel arrive à lui trouver une place stable au sein d'une teinturerie en 1949. H'ssissen se plaisait à fredonner certaines complaintes et mélodies. « Son penchant pour la mélodie devenait de plus en plus marqué. La chaude ambiance de la Casbah des années quarante y était pour beaucoup. Comment rester insensible aux sons des instruments de musique tels que la derbouka, la mandoline, le mandole et le violon qui fusaient de toutes parts, aux arômes de thé à la menthe, aux senteurs de jasmin qui embaumaient les rues », lit-on en page 21.Ainsi H'Ssissen a eu cette chan-ce de baigner dans un univers où la musique était omniprésente au quotidien. Ayant des prédispositions certaines pour la musique, il intègre l'ensemble musical dirigé par Cheikh Amraoui Missoum. Le local se situait au sous-sol de la rue Marengo à la Casbah. Sur ce même palier de ce sous-sol, se trouvait un minuscule studio où le regretté dramaturge algérien Mustapha Kateb travaillait. Bien qu'épris de musique, H'ssissen menait discrètement une activité militante au sein du PPA et du MTLD. «Il saisissait toutes les occasions pour évoquer la cause nationale et la nécessité de s'affirmer. Il s'exprimait à mots cachés, et de toute évidence, malgré son jeune âge, il savait intéresser et convaincre ses interlocuteurs ». Incorporé en février 1949, il est vite démobilisé en raison de son statut de fils unique. Bien qu'âgé de vingt ans, H'ssissen suivait de près l'actualité politique. A l'orée des années 1949, H'ssissen décide d'obtenir les textes poétiques et ce, auprès de personnes crédibles. Conscients que ces textes étaient d'une valeur inestimable pour la culture algérienne, il se rapproche dans un premier temps du maître Cheikh Abdelghani Bouchicha, spécialisé dans le genre musical chaâbi. Il se familiarise très vite avec des textes de hawzi et des meddihs dini de Sidi Benkhelouf. H'ssissen transcrivait ces textes et les apprenait par la suite. Il eut l'opportunité de rencontrer de grandes figures de la culture algérienne telles que, entre autres, Cheikh Khelifa Belkacem, El Hadj Mrizek, El Hadj Menouar, El Hadj Omar Mekraza, Moh Seghir Laâma, Abderrahmane Aziz et Mahieddine Bachetarzi. Pour les besoins de ce travail laborieux, il fait appel à son ami Cheikh larbi El Moghrabi. Ce dernier lui corrigeait les textes en apportant toutes les définitions et les différentes explications. Il se lance dans le jeu de scène en 1949 en animant un mariage. Le succès fut fulgurant. Cheikh H'ssisen meurt en septembre 1958 d'une occlusion intestinale en Tunisie. Son corps fut rapatrié en juin 2012 en Algérie. Il repose aujourd'hui au cimetière d'El Kettar à Alger. Il est à noter qu'un documentaire a été réalisé en 2010 sur l'œuvre et la vie de cheikh H'ssissen lors du Festival de la chanson chaâbi.