La deuxième session de négociations de paix sur la Syrie doit s'achever samedi à Genève sans aucune avancée, les délégations du gouvernement de Damas et de l'opposition campant sur leurs positions malgré les efforts du médiateur international Lakhdar Brahimi. Sur le terrain, une grande offensive des forces du président Bachar al Assad semble imminente contre la ville stratégique de Yabroud, sur les contreforts des monts Kalamoun, non loin du Liban où se sont réfugiés des milliers de civils syriens de crainte des combats. Les Nations unies ont fait part de leur inquiétude. Sur les bords du lac Léman, en dépit du statu quo, Lakhdar Brahimi devrait annoncer une troisième session de pourparlers, dont la date n'a pas encore été fixée. Le diplomate algérien a précisé qu'une séance de discussions aurait encore lieu samedi, avant qu'il ne se rende à New York pour rencontrer le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon. La délégation gouvernementale syrienne, s'en tenant à la ligne qu'elle a définit dès le mois dernier, a fait savoir par l'entremise de son allié russe qu'elle était prête à discuter de la création d'un organisme gouvernemental de transition - mais à condition que l'opposition s'engage officiellement à combattre le «terrorisme», soit tous les insurgés. Le porte-parole des délégués de l'opposition, Louay Safi, a déclaré que ceux-ci ne posaient aucune condition à une troisième session de discussions. «Mais il nous faut bien reconnaître que jusqu'ici nous n'avons obtenu aucun résultat», a-t-il dit. «Je ne dirais pas que les négociations sont dans l'impasse. En fait, elles n'ont même pas encore commencé», a déclaré pour sa part à l'agence Itar-Tass le vice-ministre russe des Affaires étrangères Guennadi Gatilov. «Nous n'avons même pas d'accord sur un ordre du jour», a-t-il constaté. Sur le front, dans la région de Yabroud, les gouvernementaux poursuivent leurs préparatifs pour un assaut qui s'annonce d'envergure contre cette ville de plus de 40 000 habitants. Le contrôle de ce secteur est important car il permettrait aux soldats d'Assad, appuyés par les miliciens chiites du Hezbollah libanais, d'ouvrir un corridor entre Damas et les bastions alaouites de la côte méditerranéenne. Les Nations unies ont dit craindre «une offensive majeure» des forces gouvernementales et ont rappelé l'obligation légale de Damas de laisser partir les civils. «Nous avons reçu des informations venant de Syrie selon lesquelles il y a eu de nombreux bombardements et attaques aériennes parallèlement à une concentration militaire autour de la ville, laissant supposer l'imminence d'une offensive terrestre majeure», a déclaré le porte-parole du Haut Commissariat de l'Onu aux droits de l'Homme (HCR), Rupert Colville. Entre 500 et 600 familles ont déjà fui Yabroud et sont arrivées à Arsal, au Liban, a précisé la porte-parole du HCR, Melissa Fleming. Mercredi, l'électricité a été coupée dans la ville, où les hôpitaux manquent de tout alors que les blessés affluent, a précisé Rupert Colville lors d'un point de presse à Genève. Selon la chaîne de télévision du Hezbollah, Al Manar, l'armée syrienne contrôle désormais la route principale conduisant à Yabroud. L'un des rares résultats concrets des négociations de Genève II, voire le seul, a été le cessez-le-feu conclu pour permettre l'envoi d'aide humanitaire dans la Vieille Ville d'Homs, assiégée depuis plus d'un an par les gouvernementaux. La trêve a également permis, grâce aux équipes de l'Onu et du Croissant-Rouge arabe syrien, l'évacuation de plus de 1 400 personnes. Il s'agit surtout de femmes, d'enfants et de vieillards, mais aussi de quelques hommes en âge de combattre qui ont été regroupés dans une école pour être interrogés. Dans le sud de la Syrie, près de la frontière jordanienne, l'explosion d'une voiture piégée a fait au moins 18 morts vendredi, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). L'attentat s'est produit à proximité d'une mosquée de la ville d'Al Yadouda. Valerie Amos, secrétaire générale adjointe des Nations unies aux affaires humanitaires, a appelé jeudi les membres du Conseil de sécurité à s'accorder au plus vite sur le texte d'une résolution qui renforcerait de manière effective l'accès humanitaire en Syrie. Selon l'ONU, 9,3 millions de Syriens ont besoin d'aide humanitaire. Le vice-ministre syrien des Affaires étrangères Fayçal Mekdad a affirmé que son gouvernement faisait de son mieux pour permettre l'aide humanitaire et il a jugé «tout à fait inacceptables» les critiques de Valerie Amos. Les cinq membres permanents du Conseil de sécurité - Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Russie et Chine - ont entamé jeudi des négociations avec l'Australie, le Luxembourg et la Jordanie pour tenter de rédiger un texte de compromis. Le projet de résolution présenté la semaine dernière par ces trois membres non permanents avait été aussitôt rejeté par Moscou qui l'avait jugé trop critique envers le régime de Bachar al Assad.