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«Je mets en garde le gouvernement contre cette voie suicidaire du gaspillage des ressources financières»

Dans le prolongement de ma contribution parue sur le site Maghreb Emergent le 30 mars 2014 et l'interview que j'ai donnée à la télévision internationale Africa24, le 31 mars 2014 (1), le problème qui se pose pour l'Algérie est le suivant : peut-on continuer dans la voie actuelle de privilégier les infrastructures qui concentre la majorité de la dépense publique ?Il ne faut pas sortir de Saint Cyr : sans gouvernance, la facilité est de dépenser sans compter, clefs en main grâce à une ressource non renouvelable, les hydrocarbures. Même un analphabète pourrait faire ce travail. Le plus difficile est de mettre en place le management stratégique afin de suivre les projets, de réduire les coûts, d'améliorer la qualité des ouvrages, de favoriser l'intégration, condition d'un développement durable. Le secteur industriel, composé à plus de 90% de PMI-PMI, peu initiées au management stratégique et à la concurrence internationale, représente moins de 5% du produit intérieur brut. C'est la dominance de la tertiarisation de l'économie, représentant plus de 85% du tissu économique, mais en majorité de petits commerce-services, avec la dominance de la sphère informelle marchande dépassant 50% du tissu économique global (contrôlant 40% de la masse monétaire en circulation avec une intermédiation financière informelle) où se cote le dinar qui, au cours des trois derniers mois (janvier à mars 2014) est passé de 140 dinars un euro à 155 dinars un euro. Les discours euphoriques ne doivent pas cacher l'amère réalité : après 50 années d'indépendance l'Algérie n'a pas d'économie : l'économie algérienne est donc en 2014 une économie fondamentalement basée sur la rente des hydrocarbures.
3.Bien qu'ayant une position très critique par le passé concernant les surcoûts, l'actuel ministre des Travaux publics semble ne pas avoir tiré les leçons des résultats très mitigés de son prédécesseur, continuant dans la lancée où la route Est Ouest, avec tous les scandales financiers relatés par la presse internationale et nationale, programmée initialement à 7 milliards de dollars devant se terminer fin 2010, non encore terminée en ce mois de mars 2014 avec des affaissements réguliers, dépassera les 13 milliards de dollars. Son coût par rapport aux normes internationales (main d'oeuvre, utilités, matières premières, expropriation d'un coût d'environ 50% moindre par rapport aux pays développés, devant comparer le comparable) est supérieur entre 25/35% selon le contraint et le non contraint. Or, en ce mois de mars 2014, le ministre des Travaux publics vient d'affirmer la mobilisation pour la route des Hauts plateaux le dédoublement de 10.000 km, la modernisation de 4.000 km, 265 km pour la 4e rocade d'Alger, 500 ouvrages d'art, la réalisation de 7 ports de plaisance et le réaménagement de 24 ports pour une enveloppe financière estimée à 60 milliards de dollars. Le secteur du bâtiment, travaux publics, hydraulique (BTPH) moteur de la croissance actuelle, a mobilisé plus de 70% des 600 milliards de dollars (part dinars et devises) de la dépense publique entre 2000/2013, le capital argent de ces segments provenant des hydrocarbures. Les infrastructures ne sont qu'un moyen de développement. Les piliers du développement sont l'entreprise et son soubassement, le savoir marginalisés. L'expérience montre une faible capacité d'absorption dans ce segment (divorce entre objectifs et moyens de réalisation), nécessitant le recours massif aux entreprises étrangères souvent clef en main sans la mise en place d'instruments de suivi des projets (solution de facilité et source de corruption) expliquant le gonflement du poste servies au niveau de la balance des paiements. Et que deviendront les centaines de milliers de travailleurs aussitôt les chantiers terminés. Et s'il ya chute du cours des hydrocarbures, pourra-t-on continuer à cette cadence et où trouver l'argent ? A-t-on analysé objectivement en termes de projets concrets les impacts économiques de la route Est-Ouest ? A-t-on analysé également les impacts de cette nouvelle dépense en termes d'opportunités ? Dans la même foulée de la dépense sans compter l'assainissement des entreprises publiques en Algérie a coûté au Trésor public plus de 60 milliards de dollars entre 1971 et 2013, sans résultats probants, 70% des entreprises publiques étant revenues à la case départ, alors que ces montants auraient pu être consacrés à la création de nouvelles entreprises dynamiques, de quoi créer tout un nouveau tissu productif et des millions d'emplois à valeur ajoutée. Bon nombre d'institutions internationales avec des classements déplorables entre 2006 et 2013, qui ne reflètent pas les potentialités énormes du pays, et d'experts nationaux ont tous souligné le poids de la bureaucratie, l'instabilité juridique et le manque de clarté dans les nouvelles dispositions du gouvernement algérien. 4. C'est dans ce contexte qu'il y a lieu également de revoir la politique tant du transport où l'on veut généraliser les tram même à des villes insignifiantes, ce qui n'existe nulle par dans le monde, sans compter la compagnie Air Algérie qui est une compagnie des plus chères au monde faute d'une véritable concurrence, que de l'habitat où il n'existe pas une véritable politique qui devra être liée à l'urgence d'un nouveau modèle de consommation énergétique. Pour l'habitat, aucun responsable politique, la fuite en avant, n'ose parler d'un risque majeur. En effet, 70% du pouvoir d'achat des Algériens dépend de la rente des hydrocarbures. Les taux d'intérêts bonifiés dans ce secteur qui tendent à se généraliser ne peuvent continuer que si le cours des hydrocarbures se maintient à un niveau élevé, l'Algérie de 2010/2014 fonctionnant sur la base d'un cours du baril supérieur à 100/110 dollars - sinon l'on risque de se retrouver avec une bulle immobilière comparable à celle des USA car les emprunteurs ne pouvant pas rembourser à la fois la fraction du capital et les intérêts composés en cas de chute du cours des hydrocarbures avec des risques de faillite des banques primaires. Comment peut-on programmer plus de 2 millions de logements selon les anciennes méthodes de construction forte consommatrice de ciment, de ronds à béton et d'énergie, alors que les nouvelles méthodes permettent une économie de plus de 30% ? Or, l'Algérie va à terme vers une pénurie de gaz traditionnel car les réserves se calculent par rapport au vecteur prix international/coût largement influencé par la concurrence internationale et d'autres sources d'énergie. L'on peut découvrir des milliers de gisements non rentables par rapport au vecteur prix international, Hassi R'mel et Hassi Messaoud ayant épuisé environ 45/50% de leurs réserves. La rentabilité au prix constant 2013 pour les GNL doit être de 15/16 dollars le MBTU et 9/11 dollars pour les canalisations. Force est de constater que l'Algérie perd de plus en plus des parts de marché étant passée de 13/14% du marché européen entre 2009/2010 à 9% en 2013. Selon Africa Energy Intelligence du 2 novembre 2013, le méga-champ gazier d'Hassi R'mel connaît une baisse sensible de sa production faute de travaux de développement et d'entretien. Le site gazier en question, qui produisait 75 milliards de m3 en 2008, n'en livre que 55 milliards de m3 en 2012. Les exportations algériennes de gaz seraient passées de 60 milliards de m3 en 2007 à 52 milliards de m3 en 2011 et 55 milliards en 2012, et encore moins, selon certaines sources pour 2013 entre 45/47 milliards de mètres cubes gazeux, alors que la consommation intérieure a été d'environ 35/37 milliards de mètres cubes gazeux. Les réserves de gaz traditionnels ne sont pas de 4.500 milliards de mètres cubes gazeux estimation de BP de l'année 2000 non actualisé mais serait inférieure à 3.000 milliards de mètres cubes gazeux en 2013 (moins de 2% des réserves mondiales). Ainsi sont effectivement posées à la fois les limites des réserves de pétrole exploitables, en termes de prix concurrentiel (en cas de non découvertes rentables substantielles), estimées en 2012 à 12.200.000.000 barils (0,8% des réserves mondiales). Si l'on estime à compter de 2012 une production de 2,2 à 2,4 millions de barils jour, se proposant d'exporter 1,6 millions de barils jour - donnant environ 800 millions de barils annuellement, la durée de vie serait de 15 années, soit 2027, avec ce paradoxe, l'Algérie ayant importé en 2013 au prix international 3,5 milliards de dollars de carburants livrés sur le marché intérieur à un prix subventionné. En Algérie où en 2017, la consommation intérieure risque de dépasser largement les exportations ayant doublé les capacités d'électricité horizon 2017 à partir des turbines de gaz allant ver plus de 70/75 milliards de mètres cubes gazeux, dépassant les exportations actuelles qui peinent à atteindre 50/55 milliards de mètres cubes gazeux. L'on devrait arriver, sauf découvertes exceptionnelles, à un coût compétitif à un épuisement horizon 2030 pour le gaz traditionnel, devant produire plus de 155 milliards de mètres cubes gazeux annuellement, si l'on veut exporter 85 milliards de mètres cubes gazeux. A moyen terme, de nouveaux concurrents sont apparus, tels que les Etats-Unis, des pays de l'Afrique de l'Est (Mozambique, Tanzanie) et dans un proche avenir des pays de la Méditerranée orientale (Israël, Chypre, peut-être le Liban). La souplesse commerciale du Qatar dont la part du marché en Europe approche celle de l'Algérie en 2012 (8/9%), est le concurrent le plus sérieux avec Gazrpom. En effet, pour le court et moyen termes doit être pris en compte la concurrence de Gazprom avec le North et le South Stream, qui contourne l'Ukraine (120 milliards de mètres cubes gazeux, expliquant le gel du projet Galsi 8 milliards de mètres cubes gazeux pour un cout qui est passé de 2,5 à plus de 4 milliards de dollars donc non rentables au vu du prix actuel, 15% plus cher que le South Stream russe. Et également la concurrence américaine avec la révolution du pétrole-gaz de schiste, ce marché représentant 20% (15/20 milliards de dollars par an selon les cours) des recettes de Sonatrach qui devra impérativement horizon 2017 avoir d'autres marchés. Pour le marché en Asie, outre les faibles capacités de GNL, l'Algérie devra contourner toute la corniche de l'Afrique avec des coûts de transport exorbitants pour arriver en Asie. Ce qui n'est pas dû seulement à des difficultés d'approvisionnement après l'attaque terroriste de Tiguentourine, représentant18% des exportations de gaz pour un chiffre d'affaires évalué à environ 4 milliards de dollars, mais pose la problématique des subventions qui expliquent la forte consommation intérieure, le prix de l'électricité étant plafonné depuis 2005 entraînant un déficit structurel de Sonelgaz plus de 44 milliards de dinars en 2012 ; avec ce paradoxe, la consommation des ménages étant plus élevée que celles des segments productifs, expliquant la désindustrialisation du pays. Cette politique des subventions tant pour le marché intérieur qu'extérieur devient intenable (prix intérieur environ le un dixième du prix international). Pour le cas de firmes étrangères, cette politique a entraîné bon nombre de conflits avec des partenaires étrangers. 4. Une croissance durable implique forcément des réformes tant institutionnelles que micro-économiques toujours différées du fait de la neutralisation des rapports de force au niveau du pouvoir. D'où l'urgence d'un nouveau mode de gouvernance et à une réorientation urgente de la politique socio-économique entre 2014/2020 devant réaliser la transition d'une économie de rente à une économie hors hydrocarbures dans le cadre des avantages comparatifs mondiaux. L'Algérie est liée à un Accord
de libre échange avec l'Europe applicable depuis le 1re septembre 2005, le tarif douanier zéro étant prévu à 2020, et désirant adhérer à l'organisation mondiale du commerce. Son espace naturel est le Maghreb, pont entre l'Europe et l'Afrique, dont l'intégration devient une urgence de l'heure et les espaces euro-méditerranéens et africains, l'Afrique continent à enjeux multiples et d'avenir. La situation est d'autant plus inquiétante que des tensions budgétaires peuvent survenir en cas d'un fléchissement du cours des hydrocarbures prévues entre 2015/2017 devant repenser toute la politique socio-économique. Dans ce cadre, la stratégie des secteurs des travaux publics et de l'habitat, par une vision globale maîtrisée, au sein d'une transition énergétique devant réhabiliter la planification stratégique, actuellement naviguant à vue, devant dynamiser le Conseil National de l'Energie paradoxalement gelé depuis des années, réhabilitant l'entreprise créatrice de richesses managée au moyen de nouvelles technologies, devra être profondément repensée. Aussi, je mets en garde le gouvernement actuel contre cette dérive financière dans les infrastructures avec des surcoûts exorbitants pour ne pas parler contre la dérive de la corruption.


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