Les Etats-Unis d'Amérique étant la première puissance économique mondiale, l'objet de cette contribution est d'analyser la coopération algéro-américaine face aux nouveaux enjeux géostratégiques, notamment en Afrique. Les USA et l'Europe misent également sur les économies d'énergie, l'objectif étant un mix énergétique en développant parallèlement les énergies renouvelables, notamment en Europe et pour les USA, la majorité des démocrates y sont favorables contrairement aux républicains. Et dans le même temps, les Américains consomment de moins en moins de pétrole (9% de moins qu'en 2007), ce qui est lié à la fois à la crise économique des dernières années, à la forte hausse des prix des carburants et au fait que les Américains commencent à échanger leurs 4X4 contre des voitures plus petites et beaucoup plus économes. Selon le ministère américain de l'Energie, en février 2013, la production aurait dépassé les 7 millions de barils par jour, soit une hausse spectaculaire de 16% en un an. L'augmentation de la production est telle que l'Agence Internationale de l'Energie (IEA), dans son dernier rapport annuel («World Energy Outlook»), paru le 12 novembre 2012 prévoit que les Etats-Unis deviendront entre 2017/2020 le premier producteur mondial de pétrole devant l'Arabie Saoudite et la Russie. L'autosuffisance énergétique annoncée de la première puissance mondiale aura sans nul doute des conséquences géopolitiques mondiales. En premier lieu, la politique américaine au Proche et Moyen-Orient subira probablement quelques infléchissements stratégiques dans la mesure où le facteur «dépendance énergétique» ou, plus précisément, «sécurisation des accès et de l'approvisionnement en énergie» deviendra moins sensible. Cela entraînera une redéfinition des objectifs nationaux américains, où les Etats-Unis, qui étaient les plus grands importateurs de pétrole au monde, n'avaient pas hésité à déclencher ou favoriser des guerres ou conflits en Afrique, au Proche et Moyen-Orient ou en Amérique latine, dans le but de sécuriser leur approvisionnement en énergie. Désormais bientôt autosuffisants, leur interventionnisme dans ces régions, dont l'Algérie, se fera en fonction de nouvelles considérations et notamment de celle liée à l'influence grandissante de la Chine. Cette nouvelle donne ne peut qu'entraîner de profonds bouleversements géostratégiques tant politiques qu'économiques, notamment sur l'économie algérienne. Le développement des gaz non conventionnels en Amérique du Nord a fermé ce marché aux exportations algériennes à partir de 2009 et pesé sur les cours (marchés spot), ce qui pose la question de la rentabilité des exportations de GNL. Le «prix rentable» du MBTU, l'unité de mesure de l'industrie gazière, serait pour la Sonatrach de 9 à 11 dollars pour le gazoduc et de 13 à 15 pour le GNL. En perdant le marché américain, les recettes de Sonatrach provenant des USA fluctuant entre 15/20 milliards de dollars par an, selon les cours mondiaux, où l'Algérie comblera t-elle le différentiel de ses exportations d'hydrocarbures ? Dans un rapport publié par The Wall Street Journal le 6 juillet 2013, citant l'Administration US de l'énergie et de l'information où pour un dollar perdu, l'Algérie perd l'équivalent de 800 millions de dollars par an, les exportations du Nigeria et de l'Algérie à destination des Etats-Unis ont fortement diminué de moitié entre avril 2011 et avril 2012. Les exportations du Nigeria vers les USA ont chuté de 16% pour s'établir à seulement 12,2 millions de barils, alors que les exportations de l'Algérie ont connu un recul de 38%, s'établissant à 4,8 millions de barils, ce qui explique la chute des exportations algériennes vers les USA, mise en relief précédemment. Et le marché naturel étant l'Europe avec la concurrence notamment du géant russe Gazprom, (expliquant le gel du gazoduc via l'Italie Galsi) de l'entrée de nouveaux concurrents dès 2017, qu'en sera-t-il si la crise mondiale persiste, car ce n'est pas seulement une question d'offre mais de demande et surtout de coût pour être compétitif, pouvant découvrir des milliers de gisements non rentables par rapport aux valeurs internationales ? L'Algérie qui a des unités de GNL de moyennes dimensions avec des coûts relativement élevés par rapport à ses concurrents, nécessitant d'importants coûts de transport pourra-t-elle concurrencer pour approvisionner l'Asie, la Russie, l'Iran et le Qatar ? 3.La visite de John Kerry s'inscrit dans le cadre géostratégique et sécuritaire de la région La visite du secrétaire d'Etat US, John Kerry, s'inscrit surtout dans le domaine stratégique et non en vue de soutenir tel ou tel candidat, toute déstabilisation de l'Algérie ayant des répercussions sur tout le Moyen-Orient et l'Afrique. Les USA ne connaissent comme tout grand Etat que leurs intérêts et en politique comme dans la pratique des affaires, il n'y a pas de sentiments. L'on a abordé nécessairement les tensions au Sahel, les relations apaisées auxquelles les USA accordent une importance stratégique entre l'Algérie et le Maroc, dont du Sahara Occidental, et surtout les perspectives des réformes économiques et politiques en Algérie comme condition de la stabilisation, dépassant le statu quo actuel qui inquiète tant la Russie, l'Europe et les USA. Le nouveau directeur du FBI, James Comey, a affirmé le 14 novembre 2013 devant le Congrès qu'Al Qaida au Maghreb Islamique (Aqmi) constituait une «forte menace» aux intérêts américains et occidentaux dans la région de l'Afrique du Nord et du Sahel, ajoutant que ce groupe a démontré sa capacité à cibler ces intérêts à travers les enlèvements contre rançons essentiellement. Pour le directeur du Centre américain du contre-terrorisme, Matthew Olsen, dont les services dépendent du Directeur du renseignement national des Etats-Unis (DNI), devant la commission sénatoriale que si l'intervention militaire conduite par la France au Mali a permis de chasser Aqmi et ses alliés des villes qu'ils contrôlaient auparavant, ces groupes arrivent, cependant, à trouver refuge dans les zones les moins peuplées du nord du Mali et en Lybie, et continuent à commettre des attaques de représailles. Un rapport du Forum économique mondial (WEF) en date également du 14 novembre 2013 révèle que fortement secoués depuis deux ans par des crises politiques à répétition, les pays d'Afrique du Nord, dont fait partie l'Algérie, sont une source d'inquiétude pour le monde. En effet, la guerre en Syrie et la polarisation des sociétés en Afrique du Nord figurent en tête des « préoccupations » des décideurs pour 2014. Les relations entre l'Algérie et les Etats-Unis entrent dans le cadre de ces préoccupations. Elles ont pris une telle intensité que les dirigeants des deux pays ont décidé de les structurer dans un cadre formalisé et de conférer un caractère régulier aux concertations bilatérales, pour une meilleure organisation et visibilité des rapports entre les deux pays. C'est dans cet objectif que le dialogue stratégique Algérie-USA a été établi et dont la première réunion s'était tenue en octobre 2012 à Washington, après la 5ème session du Dialogue militaire conjoint algéro-américain. Les Etats-Unis considèrent ce dialogue stratégique comme «le fondement» sur lequel les Etats-Unis et l'Algérie ambitionnent le renforcement de leurs relations futures dans les domaines politique, économique, culturel, scientifique et sécuritaire. Ce rapprochement entre l'Algérie et les Etats-Unis se traduit donc par la convergence des vues sur des dossiers d'intérêt régional et international. Les USA reconnaissent que l'Algérie est la puissance militaire et économique dominante dans la région du Maghreb. Elle représente un partenaire-clé des Etats-Unis dans la lutte contre le terrorisme, selon un document composé de 6 chapitres du service de recherche en sécurité du Congrès américain, qui traitent essentiellement de la question du gouvernement et de la politique en Algérie. Abordant les relations entre l'Algérie et les Etats-Unis, le rapport note que l'Algérie est un pays de plus en plus important dans les efforts américains pour lutter contre le terrorisme international et représente un partenaire-clé dans la lutte contre les groupes liés à Al Qaîda. Les USA qui ont une stratégie planétaire qui ne se différencie pas fondamentalement de celle de l'Europe (existant certaines divergences tactiques) avec pour fondement ses intérêts économiques, insistent sur l'intégration du Maghreb, sous segment du continent Afrique dont le contrôle économique à travers les rivalités, notamment de la Chine, constituera un enjeu majeur du XXIe siècle. Les récents événements en Egypte, en Libye, au Mali, au Sahel, en Syrie (les importantes découvertes de pétrole et surtout de gaz en Méditerranée expliquant les divergences USA-Russie) et la sécurité d'Israël à laquelle les USA accordent une importance stratégique préfigurent d'importantes recompositions géostratégiques au niveau de la région avec certainement un apaisement des tensions avec l'Iran, grand producteur pétrolier et recelant plus de 15% des réserves mondiales de gaz naturel. Les USA entendent jouer un rôle majeur dans cette reconfiguration, et l'Algérie, sous réserve d'une meilleure gouvernance et plus de réalisme dans les nouvelles relations internationales, est un acteur incontournable pour la stabilisation de la région. Bon nombre de projets en commun, permettant le transfert du savoir-faire technologique et managérial, en dehors des hydrocarbures brut et semi brut, peuvent être initiés entre l'Algérie et les USA comme facteur de stabilisation. La puissance d'une nation n'a jamais été fonction d'une rente éphémère mais se mesure au poids de son économie productive fonction d'une planification stratégique tenant compte de la mondialisation, processus non encore achevé et d'une nouvelle donne, la protection de l'environnement. Cela pose, pour l'Algérie, la problématique de la transition d'une économie de rente à une économie hors hydrocarbures elle-même tributaire d'une bonne gouvernance et de la transition énergétique prenant en compte la forte consommation intérieure (risquant d'atteindre horizon 2020/2025, le même niveau que les exportations actuelles) reposant sur l'entreprise et son fondement, le savoir.