Avec une conception particulière du théâtre katébien, une grande compréhension de l'esprit de l'auteur et une volonté claire de dynamiser et d'actualiser la mise en scène des textes de Kateb Yacine, le metteur en scène Mohamed Frimehdi a réussi à impressionner autant le public que les critiques. En compétition au 9e Festival national du théâtre professionnel (FNTP), le metteur en scène a présenté jeudi soir «Les ancêtre redoublent de férocité» (1959), produite par le Théâtre régional Kateb-Yacine de Sidi Bel-Abbès. Dans ce spectacle, très bien accueilli par le public et les critiques de théâtre, l'approche du texte de Mohamed Frimehdi s'est basée en priorité sur une réécriture scénique de l'œuvre de Kateb Yacine, adaptée aux impératifs de sa propre conception du spectacle. Réputé «intouchable», ce texte a été revu pour décortiquer les longues tirades des coryphées que le metteur en scène a jugées «impossible à reproduire», afin d'en faire des dialogues inspirés des textes «Le cadavre encerclé» et «Le Vautour» de Kateb, pour, dit-il, «créer plus d'action dramatique à même de captiver le spectateur et d'alléger le spectacle». Sur scène, l'esprit du théâtre populaire s'est invité naturellement dans la conception de Mohamed Frimehdi qui a évoqué une «modernisation» et une «dynamisation» de la mise en scène par l'utilisation, entre autres, des lumières et de la bande son qui a remplacé le musicien comme élément actif de la scénographie. Un théâtre populaire actualisé Tout en comptant toujours sur le jeu des comédiens - qui ont bien porté le texte - et la symbolique des accessoires, le metteur en scène s'est passé de tout discours direct, ne s'adressant jamais au public durant la pièce, qui aborde la mobilisation des Algériens pour la lutte armée contre le colonisateur. Ainsi, le rôle du narrateur, propre au théâtre populaire de Kateb, a été repensé pour faire tomber les barrières temporelles d'un texte qui peut être joué et interprété différemment aujourd'hui. Autre effort d'actualisation de la mise en scène, l'élaboration, brillante, des costumes et des chorégraphies, deux nouveaux éléments introduits dans le théâtre populaire, en compensation des éléments du théâtre grec, qui ont été dilués dans le dialogue. Même si réputés «difficiles», ce genre de textes doit être monté en prenant soin de les mette à jour si nécessaire par une écriture scénique «compatible avec les techniques et le public du théâtre contemporain», a estimé le metteur en scène. Fort de ce premier succès, Mohamed Frimehdi espère pouvoir «capitaliser» cette première expérience pour se lancer dans «une lecture sérieuse» de toute l'œuvre théâtrale de Kateb Yacine et en tirer encore d'autres spectacles. Né en 1964 à Massacra, Mohamed Frimehdi est diplômé de l'Institut supérieur des arts, du spectacle et de l'audiovisuel d'Alger (Ismas). D'abord comédien, il compte également à son actif d'autres mises en scène dont «Souvenirs d'Alsace» grand Prix de la précédente édition du Fntp. Son adaptation de l'œuvre Kateb Yacine est la deuxième à avoir été jouée au Festival, après la pièce «Le cadavre encerclé» du Théâtre régional de Béjaïa, présentée mercredi dernier. Dix-sept spectacles en compétition au Théâtre national Mahieddine-Bachtarzi (TNA) et neuf autres en «off» à la salle El Mouggar, sont au programme du 9e FNTP qui se poursuit à Alger jusqu'au 8 septembre.