Après le lot de terrain situé dans l'enceinte du centre de Seraïdi détourné par des mains expertes en la matière pour servir d'assiette de terrain à la construction d'une bâtisse appartenant à un particulier, c'est au tour d'un autre acte lié au dossier du foncier de la wilaya d'être mis au-devant de l'actualité. C'est le wali, Mohamed Mounib Sandid, en personne, qui est à l'origine de la mise au jour de cette affaire en se déplaçant au début de cette semaine sur le site. En ordonnant la mise en place d'une commission d'enquête pour situer les responsabilités dans l'établissement de l'autorisation de lotir ce terrain, le wali confirme la gravité des faits. Situé entre la cité Boukhadra et la RN44 à hauteur du complexe sportif du 19 mai, ce terrain avait fait l'objet d'une multitude de convoitises. Les responsables locaux de l'époque avaient toujours refusé de l'intégrer sur les différents plans d'occupation du sol. Il s'est finalement avéré que ces refus étaient des écrans de fumée pour éviter la réaction de certains moins disant en termes de «chipa». Tel est en tout cas l'interprétation que l'on accorde à la procédure appliquée pour avantager les uns par rapport aux autres demandeurs qui, intéressés par la réalisation d'une promotion immobilière, d'un super marché, d'un show-room pour concessionnaire de véhicule et qui par un hôtel ou établissement privé de santé. La visite impromptue du wali sur le site a fait l'objet d'un cheveu sur la soupe. Des premiers éléments de l'enquête, il ressort qu'à travers une de ses directions, la Seata est directement impliquée dans l'octroi d'une importante partie de ce terrain ayant servi pour le passage de deux conduites principales d'adduction en eau potable d'un diamètre de 800 et 600 mm desservant les communes d'Annaba et El-Bouni et une autre pour l'assainissement. Alerté, le premier magistrat de la wilaya a ordonné l'extension de l'enquête sur d'autres dossiers similaires. Ce qui va certainement faire bouger les choses, y compris du côté de la cité du 1er-Mai à El-Bouni. La convocation d'une trentaine de ses cadres par la brigade économique et financière de la sûreté de la wilaya d'Annaba fait actuellement l'objet de toutes les discussions sur la place publique locale. A l'exception de la chef de département parachutée, il y a quelques mois, au poste d'assistante du DG chargée du commercial, tous ont répondu présent. Entretemps, le chef de la mission d'enquête dépêchée par le ministère des Ressources en eau n'est pas resté inactif. Il s'est rendu à la cour de justice mardi dernier pour, selon nos sources, confirmer la plainte déposée par la Seata. Il ressort des premiers éléments de l'enquête menée par cette commission qu'outre l'important détournement de fonds de la caisse de la Ménadia, on a créé une incohérence entre les activités du département commercial et celui de la comptabilité financière, tel qu'il était pratiquement impossible de suivre les mouvements des recettes. Et ce n'est pas fini, car il faudrait également expliquer comment avec un niveau scolaire primaire, moyen et rarement secondaire, certains agents se sont retrouvés à des postes de conception de la stratégie de l'entreprise. Et c'est bien là le mal de la Seata où les deux tenants successifs de la direction générale ont imposé à des jeunes universitaires des postes d'exécution sans réel impact sur le développement de l'entreprise. Ils leur ont préféré de simples agents sans compétence administrative ou technique aucune dont un jardinier. Rififi aux œuvres sociales A mesure que les investigations de la commission d'enquête dépêchée par le ministère des Ressources en eau et celles de la brigade économique et financière de la sûreté de wilaya et de la Gendarmerie nationale progressaient avec des découvertes d'autres méfaits préjudiciables, la situation s'est aggravée de plus en plus à la Société des eaux et assainissement d'El-Tarf et Annaba. Oubliant les fautes graves commis par les gestionnaires dans la gestion de l'entreprise, les salariés ont entamé des mouvements de protestation. C'est d'abord ceux de l'unité d'El-Tarf qui, depuis mardi, ont débrayé pour, ont-ils affirmé, appeler les enquêteurs à étendre leurs investigations aux activités du Comité de participation (CP). Le même débrayage pour le même motif a été entamé par ceux de la direction d'unité de Annaba et de la direction générale. Les griefs reprochés aux membres du CP sont similaires à ceux des cadres gestionnaires à savoir le détournement de fonds, la dilapidation des deniers publics, l'utilisation des moyens financiers, matériels et roulants pour des besoins personnels... Comme pour les cadres gestionnaires accusés d'avoir prémédité et appliqué à dessein l'incohérence dans les activités du département commercial et celui de la comptabilité, il est aussi reproché aux membres du CP l'absence de bilan moral et financier attestant de l'opportunité des dépenses des 240 millions de DA/an issus de la masse salariale de l'entreprise. Ces griefs ont été dénoncés au lendemain de l'annonce faite quant à un improbable don social de 10 000 DA à accorder par le CP à chaque salarié pour l'acquisition du mouton de l'Aïd El-Adha. Le CP a assujetti ce don à un apport d'argent frais de la DG. Ce qui, en l'état actuel des difficultés que rencontre cette dernière, n'est pas possible puisque même les salaires du mois de septembre seront tardivement virés. Cette situation a imposé aux salariés de demander des comptes sur la destination prise par les 240 millions DA/an. Il faut en effet savoir qu'à l'exception des 10 000 DA de don du mouton et de quelques rares aides humanitaires, le CP n'accorde aucun autre avantage social depuis la création de la Seata en 2008. Sur leur lancée, les salariés ont dénoncé des prêts sociaux s'élevant à plusieurs centaines de milliers de DA à certains élus du CP et à des cadres gestionnaires privilégiés. Ces prêts, non remboursés à ce jour par les bénéficiaires, auraient servi à des dépenses de prestige. Tout porte à croire que les salariés avaient préféré ménager la susceptibilité de leur hiérarchie et des syndicalistes plutôt que de dénoncer des situations préjudiciables. Il a fallu qu'un chef de service commercial consciencieux et courageux donne un coup de pied dans la fourmilière pour que le ministère de tutelle réagisse même tardivement. D'autres reproches argumentés pourraient être adressés aux décideurs du ministère que l'en a assez peu entendu. A l'exemple de cette décision d'accorder, même par intérim, la responsabilité d'une entreprise en charge d'une activité aussi stratégique que les ressources en eau à un ancien agent formé sur le tas, d'un niveau d'instruction élémentaire et qui, plus est, a eu déjà des soucis avec la justice. Les travailleurs se sont étonnés de la relative indulgence du président du conseil d'administration. La soixantaine d'âge largement dépassée, ce dernier n'a pas une seule fois réagi à la mise à sac du patrimoine de l'entreprise. Le commissaire aux comptes en charge des activités de la Seata auraient-il donné son quitus annuel de gestion sans émettre des réserves sur les anomalies comptables relevées par ses auditeurs ? Certes, l'on dira que le directeur de la wilaya de l'hydraulique n'a pas d'emprise directe sur la gestion de l'entreprise, il a pourtant un droit de regard sur la distribution de l'eau. En attendant que les enquêteurs décident de la tournure à donner à ce dossier, les salariés ont interpellé le procureur de la République près la cour de justice de Annaba. Ils ont appelé à l'ouverture d'une enquête judiciaire sur les activités du CP. Notamment, les 240 millions de DA que versait annuellement aux œuvres sociales la direction générale et dont ils ne profitent presque jamais. Rappelons, enfin, qu'après le détournement d'un lot de terrain propriété de la Seata à Séraïdi, le wali d'Annaba, Mohamed Sendid a mis en place une commission d'enquête. Celle-ci a pour mission de situer avec précision les responsabilités de la Seata quant à l'octroi d'une autorisation permettant à des privés d'ériger locaux, bâtiments, parcs à matériels et autres sur le passage de trois grosses canalisations d'eau potable et assainissement sur le terrain de Boukhadra, également propriété de la Seata.