La situation en Libye, en proie à un chaos politique grandissant, a abouti à un vide sécuritaire sur son flanc sud, où se redéployent les réseaux transnationaux terroristes combattus dans le Sahel. La situation dans la ville de Derna, en Cyrénaïque, s'est encore détériorée au cours des derniers jours, avec les combats meurtriers menés entre les miliciens islamistes et l'armée libyenne. Celle-ci, positionnée autour de la ville, a lancé des assauts, notamment à partir des faubourgs de l'est. Rappelons que le Conseil consultatif de la jeunesse islamique à Derna, dont la formation a été annoncée le 12 décembre dernier, est constitué de groupes ayant fait allégeance à l'Etat islamique (EI). Ce dernier, qui tente d'étendre son influence en Libye à partir de Derna, serait dirigé par Soufiane Ben Qoumou (55 ans), naguère considéré comme l'émir d'Al-Qaida en Cyrénaïque. Les services de renseignements occidentaux évaluent à environ 2 400 hommes les effectifs djihadistes, un nombre qui ne cesse d'augmenter, vu l'afflux de combattants venus de Syrie. Au cours des dernières semaines, ces groupes auraient financé leurs activités grâce au pillage de la banque al-Jumhuriya, en novembre 2014, qui leur aurait permis de mettre la main sur un butin de trois millions d'euros, cinq millions de dollars et huit millions de dinars libyens. L'EI a réussi à établir une tête de pont à Benghazi, dans la zone d'Al-Laythi, afin de contrer l'offensive de l'armée libyenne sur cette ville. S'appuyant en particulier sur Mohamed Dursi, le terroriste libyen libéré par les autorités jordaniennes au printemps dernier. La constitution d'une branche de l'EI dans la capitale de la Cyrénaïque a été annoncée le 2 janvier dernier et cette organisation s'emploierait à étendre son influence vers le sud de la Libye. A cet effet, des contacts auraient été noués avec Mokhtar Belmokhtar, le chef du mouvement djihadiste, les Signataires par le sang (groupe dissident d'Al-Qaida au Maghreb islamique). Des observateurs s'attendent donc à l'annonce prochaine de la formation d'une nouvelle branche de l'EI dans le Fezzan, qui pourrait être basée dans la région d'Ash Shati, non loin de Sebha. Sur un autre plan, le contrôle du Conseil militaire de Tripoli et des milices de Misrata (« Aube de la Libye ») sur la capitale libyenne est menacé par l'irruption récente de groupes armés plus radicaux, se réclamant de l'Etat islamique (EI) ou d'Ansar al-Islam. Près de 200 membres d'Ansar al-Charia auraient notamment pénétré dans Tripoli, avec l'aide de la Chambre d'opérations des révolutionnaires de Libye, un groupe armé commandé par Abou Obaida al-Zawi. Le commandant militaire de Tripoli, Abdelhakim Belhadj, mène donc une campagne contre ces nouveaux venus, dont la présence risque de faire voler en éclats la sécurité relative qui règne dans la capitale.