L'ONG publie ce mercredi un rapport jugeant que les naufrages qui ont eu lieu après la fin de l'opération Mare Nostrum auraient pu être évités si une véritable opération de recherche et de sauvetage avait été mise en place. A la veille du sommet extraordinaire du Conseil européen à Bruxelles et après une série noire de naufrages, Amnesty International (AI) a dévoilé ce mercredi, avec une semaine d'avance, son rapport Europe: naufrages de la honte. Absence de protection des réfugiés et des migrants en mer. Voici les cinq principaux points à retenir. L'augmentation du nombre de morts en mer est liée à la fermeture des routes terrestres... «Ce rapport, c'est un peu l'ensemble des mauvaises pratiques que l'Union européenne (UE) ne devrait plus mettre en œuvre», juge Jean-François Dubost, responsable du Programme personnes déracinées à AI France. Selon la synthèse, la situation actuelle -nombre record de migrants tentant de rallier l'Europe par la mer, et du nombre de morts lors de naufrages-est la conséquence de la fermeture successive des frontières terrestres européennes -en Grèce, en Espagne (enclaves de Ceuta et Melilla), en Bulgarie... «La Méditerranée, malgré tous ses dangers, est désormais la seule voie d'accès. Il faut donc non seulement sauver des vies en mer, mais aussi ouvrir des voies d'accès sécurisées pour que ces réfugiés puissent atteindre l'UE en toute sûreté», martèle Jean-François Dubost. ... et à l'abandon de Mare Nostrum, l'opération humanitaire de la marine italienne Le nombre de réfugiés et de migrants essayant de rejoindre l'Europe par la mer a augmenté depuis fin 2014, date de la fin de l'opération Mare Nostrum, infirmant «le mythe selon lequel Mare Nostrum a agi comme un "facteur d'appel"» pour les migrants. Seule conséquence confirmée : l'augmentation du nombre de morts. Le taux de mortalité parmi ceux tentant la traversée est en effet passé de 1/50 en 2014 à 1/23 pour les trois premiers mois de 2015. Non, Triton ne remplace pas Mare Nostrum Après la fin de Mare Nostrum (octobre 2013-2014), l'opération Triton de l'agence Frontex a pris le relais. Mais ce n'est pas une opération de recherche et de sauvetage, souligne le rapport: son mandat -contrôler les frontières de l'UE-, ses ressources ou son rayon d'action ne sont pas adaptées. En 2014, 25% des sauvetages ont été assurés par des navires marchands Dès lors, la responsabilité des opérations de recherche et de sauvetage échoit en grande partie aux gardes-côtes et aux navires marchands -légalement tenus de porter assistance à tout vaisseau en détresse à proximité. Cependant, ils ne sont pas conçus ni équipés et leurs équipages ne sont pas formés pour les sauvetages en mer, entraînant de nombreux risques supplémentaires, pour eux comme pour les rescapés. Jean-François Dubost par ailleurs souligne que ces navires commencent à se détourner des routes commerciales classiques pour éviter d'avoir à offrir ce secours. Des mesures concrètes et urgentes sont à prendre au niveau européen Après l'annonce lundi du plan d'action européen, AI souhaite la mise en place d'une opération de recherche et de sauvetage de grande envergure, efficace et coordonnée au niveau européen. «Nous souhaitons qu'une solution concrète soit trouvée dès jeudi, même si nous avons encore des doutes quant à la réelle volonté de mettre en place une telle opération», explique Stephan Oberreit, directeur général d'AI France. L'organisation scrutera en particulier le détail de cette opération: rayon d'action, ressources (financières, logistiques, navales et aériennes), date de mise à disposition de ces ressources... «Nous avons l'impression que des choses vont enfin être faites, mais nous restons suspicieux», note la présidente d'AI France, Geneviève Garrigos. «Mare Nostrum sera pour nous le point de référence minimum pour jauger l'opération lancée par l'UE», prévient Jean-François Dubost.