Interpellé par des confrères à la suite d'un incident survenu à l'entrée de l'université Saïd-Hamdine à Alger, le nouveau ministre de l'Enseignement supérieur a présenté ses excuses à la victime. Cet état de fait, une première en Algérie, a surpris plus d'un et a trouvé un écho favorable que ce soit en Algérie où à l'étranger. L'affaire remonte au 9 mai dernier lorsque l'accès à l'université a été interdit à une jeune femme par un agent de sécurité. Ce dernier a motivé son refus en indiquant que le règlement intérieur interdit à tout élève portant selon lui une tenue indécente d'entrer à l'université. Malgré l'intervention de son époux, l'agent de sécurité n'a rien voulu savoir et a empêché la jeune femme d'accéder à l'université. Ne voulant pas que son épouse rate le concours de capa organisé ce jour à l'université, le mari s'est dépêché pour acheter un pantalon à sa conjointe, qui a pu ensuite rejoindre ses camarades au niveau de l'université. Cet incident a provoqué la colère et l'indignation de plusieurs étudiants à travers les 48 wilayas du pays. Plusieurs personnalités et responsables d'associations et organisations à l'étranger se sont solidarisées avec la jeune femme, dénonçant une véritable atteinte à la liberté individuelle et à la vie privée. Toujours et en solidarité avec cette femme, des dizaines de femmes et même d'hommes ont inséré sur les réseaux sociaux leurs photos, les jambes nues. «Ma dignité n'est pas dans la longueur de ma jupe» lancé sur Facebook a été également suivi par des centaines d'internautes qui n'ont pas également manqué d'apporter leurs soutiens aux femmes non voilées en Algérie. Plusieurs autres slogans ont été également insérés sur les réseaux sociaux en solidarité avec les femmes algériennes. «Mes jambes ? Qu'est-ce qu'elles ont mes jambes ? Si elles ne te plaisent pas ou que tu n'arrives pas à te contrôler, tu n'as qu'à détourner ton regard, ce n'est pas à moi de me soumettre à votre vision de la femme.» Nous avons donné ici un message de plusieurs femmes qui se sont exprimés à travers les réseaux sociaux. En réplique aux messages de soutien avec la jeune femme de l'université, certains responsables proches des mouvements islamistes n'ont pas manqué de retirer des anciennes «notes» à partir des archives avant de les placarder à l'entrée des facultés, campus et même dans les lycées et les collèges. Certaines associations islamistes n'ont pas manqué également d'instrumentaliser l'incident de l'université pour lancer une campagne sans précédent contre les femmes non voilées en Algérie. «Sois un homme et voile ta femme», tel était le slogan de la campagne lancée par les islamistes quelques heures seulement après cet incident. Ce n'est pas uniquement au niveau des universités et des écoles que l'accès est interdit aux femmes portant des jupes et aux jeunes enfilant des pantacourts. Plusieurs citoyens ont pris attache avec la rédaction, indiquant que ces mesures sont également appliquées par plusieurs administrations publiques dans le pays. Nos interlocuteurs ont indiqué qu'ils ont rencontré ce genre de problème à l'entrée des sièges de wilaya, tribunaux et même pour certains parents qui se sont présentés devant la porte de pénitenciers pour rendre visite à leurs proches. Les agents de sécurité et les gardiens de ces administrations et édifices publics ont interdit l'accès aux jeunes femmes portant des jupes et aux jeunes hommes qui enfilé des pantacourts, bermudas, shorts et autres tenues jugées selon eux indécentes. L'ensemble des responsables de ces institutions avec qui nous avons pris attache à ce sujet ont nié avoir donné des instructions à ce sujet. Finalement, ce fut le nouveau ministre de l'Enseignement supérieur qui a eu le courage de présenter ses excuses à la jeune femme. Abdelkader Hadjar qui s'est exprimé au micro d'un confrère a déclaré : «Je dis à travers vous (la presse) à cette dame que si elle s'est sentie offensée ou privée de ses droits, je lui présente mes excuses. Ce n'était pas une politique de l'université ou à cause d'une directive, mais d'une pratique purement personnelle des mis en cause.» Les excuses du ministre ont été bien accueillies par les étudiantes non voilée et même par les citoyens algériens. Ces derniers ont salué le courage de M. Hadjar indiquant que c'est la première fois en Algérie qu'un haut responsable s'est permis de présenter des excuses publiques. Certains ont même commenté : «Bravo pour M. Hadjar. D'habitude, nous écoutons de telles formules qu'à travers la presse venant de hautes personnalités et ministres des pays les plus développés.»