Cette année, l'Algérie connaîtra un manque à gagner d'environ 35 milliards de dollars à cause de la baisse des cours du pétrole sur les marchés internationaux. C'est une donnée officielle fournie par le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, qui intervenait, hier, à Alger, devant la communauté universitaire et académique à l'occasion d'une rencontre organisée par le Conseil national économique et social (Cnes). On sait qu'en 2014, les exportations d'hydrocarbures étaient déjà en baisse (58,34 milliards de dollars) par rapport à 2013 (63 milliards de dollars). Ce recul a continué sur les six premiers mois de 2015, les recettes et les finances publiques de l'Algérie ayant été fortement affectées par la chute des prix du pétrole qui s'est traduite par une forte baisse des exportations des hydrocarbures. Ces exportations sont passées de 31,79 milliards de dollars au premier semestre 2014 à 18,1 milliards de dollars à la même période de l'année en cours, soit une baisse de 43,1%, selon les chiffres de la Banque d'Algérie. Et cette situation risque de durer, a souligné le Premier ministre qui a confirmé son impact sur les ressources du Fonds de régulation des recettes (FRR), qui vont se contacter, et la dette publique interne qui va s'accroître. C'est par le rappel de ce constat que le Premier ministre a commencé son discours hier, pour en souligner les conséquences fâcheuses qui appellent des actions de rationalisation de la dépense publique et de développement du marché des capitaux, «ce que le gouvernement fait actuellement», a fait remarquer Abdelmalek Sellal. Il estime, en même temps, que la conjoncture actuelle «certes difficile», reconnaît-il, offre «une excellente opportunité d'introspection et de prise de décisions audacieuses pour construire une nouvelle vision économique et modifier nos modes de fonctionnement et de régulation». Il faut parier sur la croissance, dit-il. C'est dans ce sens, explique-t-il, que le gouvernement avait validé un modèle de croissance de l'économie nationale et un cadrage budgétaire du programme quinquennal 2015/2019, qui prenaient en compte la dégradation possible des cours des hydrocarbures. Le cap de la réponse nationale à la contraction des revenus pétroliers, rappelle-t-il, a été fixé en décembre 2014, par le chef de l'Etat : rationaliser les dépenses, mieux maîtriser le commerce extérieur et les flux de capitaux et poursuivre le développement socioéconomique du pays. Le Premier ministre fait observer que «notre situation macroéconomique est nettement meilleure que celle qui prévalait lors du choc pétrolier de 1986, et notre pays est doté aujourd'hui d'infrastructures modernes et de capacités humaines clairement supérieures ». Il admet que ce n'est pas suffisant et appelle à «opérer une véritable révolution dans nos modes de pensées et nos idées reçues». Comment ? Abdelmalek Sellal donnera quelques réponses à l'adresse du citoyen d'abord : «Nous devons travailler et non aller au travail, apprendre à nous faire mutuellement confiance, refuser la morosité et le pessimisme ; à l'adresse de l'administration qui «ne doit plus être un labyrinthe ou un parcours du combattant, mais une structure d'accueil et d'accompagnement», du banquier qui «n'attend pas son client, il doit aller le chercher parce que son salaire en dépend», des gestionnaires qui «ne sont pas de voleurs que nous n'avons pas encore attrapés, mais les bâtisseurs de l'Algérie de demain que nous devons encourager», de l'agent public qui est « au service du citoyen et non pas son tuteur ou son inquisiteur» ; enfin, en direction de tous, «le bon citoyen ne gaspille pas le pain, l'eau et l'énergie car si ces choses n'ont pas de prix, elles ont quand même un coût». En somme, le Premier ministre souhaite que la société se réforme elle-même. En retour, les directives présidentielles sont claires pour «préserver le pouvoir d'achat et poursuivre l'effort social et les programmes dans les domaines de l'emploi, du logement, de la santé et de l'éducation». Quant à la démarche économique, concentrée dans le budget 2016 qui vise une croissance de 4,6% (+1% par rapport à l'exercice 2015, elle consiste à en cinq points que le Premier ministre a cités dans son discours : «1. Contenir l'évolution des engagements budgétaires de l'Etat par le changement des comportements des ordonnateurs au niveau central et local. 2. Engager concrètement le passage du budget au marché par la captation de l'épargne des ménages, des circuits du Trésor et la bancarisation des liquidités de la sphère informelle. 3. Mobiliser de nouvelles ressources budgétaires et lutter contre les phénomènes de gaspillage et de contrebande. 4. Prioriser les actions impliquant la sphère réelle. 5. Améliorer davantage encore la croissance du PIB hors hydrocarbures.» Dans quel but ? Le Premier ministre insiste sur l'engagement du gouvernement pour «développer notre pays dans la paix et la fraternité et bâtir ensemble une avenir meilleur pour ses enfants».