C'est un bilan qui fait froid dans le dos et qui a été révélé par la direction générale de la Sûreté nationale en matière de violences contre la femme. Selon des chiffres dévoilés par la DGSN, les services de police ont reçu 8 441 plaintes durant les 9 premiers mois de l'année en cours. Selon le bilan présenté par la direction de la Sûreté nationale, les plaintes enregistrées à leur niveau se composent comme suit : 6 080 femmes victimes d'agressions physiques et 2 026 autres de maltraitances. Ce chiffre alarmant est certainement plus élevé, sachant que le bilan ne comporte pas les plaintes enregistrées au niveau de l'autre secteur de sécurité, à savoir la Gendarmerie nationale. Le bilan des violences faites aux femmes pourrait encore être beaucoup plus supérieur du moment qu'en Algérie et surtout dans les régions dites «conservatrices», la majorité des femmes ne portent pas plainte. Interrogé à ce sujet, le docteur Abdelwaheb Djébaïli a indiqué que la majorité des femmes n'osent pas porter plainte contre leurs agresseurs pour différentes raisons. Dans les villes et villages des régions conservatrices, la femme subit la violence de son conjoint sans pouvoir le dénoncer, a-t-il expliqué. Il est vrai que dans ces régions, l'épouse, la sœur sont les plus touchées par les violences émanant d'un époux, père, frère ou proches parents. Dans la majorité des cas de ces violences, les familles interviennent pour réconcilier le couple et parviennent à «camoufler» l'affaire. Même lorsqu'il s'agit de violences contre la femme et que l'homme et la femme ne sont pas de la même tribu, ce sont des intermédiaires qui sont sollicités à se reconvertir en arbitres ou en juges. C'est au tour de plusieurs grands plats de couscous que la fin de ces affaires d'agressions prennent fin au détriment de la femme. Dans l'histoire et jusqu'à ce jour, l'épouse ne doit jamais déposer plainte contre son mari et ce, quelle que soit la gravité de l'agression ou des blessures. Se référant à ce que disent les oulémas et «chouyoukhs» qui citent les versets du coran tout en tentant de les expliquer, indiquant que dans l'Islam, l'épouse est obligée d'obéir à son mari. Il est du droit de l'époux de recourir à la violence contre sa femme dans le cas où elle désobéit, ont-ils expliqué. Lesdits «oulémas» expliquent que la femme qui se dresse contre son mari, lui résiste, le déteste est qualifiée d'une désobéissante et devrait être corrigée. Selon un Imam et cité Ibn Taîmiyya : «Quand l'épouse «fuit» son mari, ne lui obéit pas quand il l'appelle au lit, sort de la maison sans sa permission est considérée comme désobéissante.» «Toute manifestation personnelle de la femme, que ce soit sur le plan sexuel, comme le refus de répondre aux désirs sexuels de l'homme, ou sur le plan du comportement, comme le refus de se soumettre même aux ordres injustes tels que rester à la maison, est vue du point de vue du verset coranique comme un acte d'insubordination», ajoutent les oulémas de l'Islam. Malgré le durcissement de la loi, la violence contre la femme n'a pas diminué, le bilan évoqué par la direction générale de la Sûreté nationale faisant foi. En somme, seul l'investissement dans les mentalités des personnes et la séparation de l'Etat et de la religion pourrait raisonner ceux qui croient toujours que la femme est une personne d'une deuxième catégorie et n'a pas les mêmes droits que l'homme.