En apportant de nombreux éléments nouveaux et en révélant au grand jour la face cachée de pratiques politiques jusqu'ici insoupçonnées mais pendant longtemps partagée par tous, ou presque, l'élection presidentielle française marquera l'histoire La possible victoire de Emmanuel Macron, en dernière heure, n'est pas l'unique surprise de cette élection, lors même qu'elle aura été un exploit sur lequel très peu avaient parié. A l'évidence, un candidat, qui nourrit l'ambition de gagner une élection quelle qu'elle en soit la nature, peut créer la surprise sans que, initialement, il ait été destiné à se trouver propulser au sommet. Les exemples dans le cas d'espèce font florès : Donald Trump, par exemple. Si Emmanuel Macron est élu, après tout, ce n'est donc pas une surprise en soi. D'autres bouleversements et autres éléments majeurs, tout aussi imprévisibles, marquent cette élection, étant soit une conséquence directe de la montée fulgurante du mouvement En Marche !, ou alors d'inévitables impondérables politiques, subséquents aux échecs et aux lendemains qui ont dû déchanter, ou encore dus simplement à la réalité de la vie politique française. Conjuguée aux échecs répétés dus aux promesses non tenues, la déliquescence de la classe politique [ de gauche comme de droite ], déconnectée des réalités citoyennes et ayant totalement perdu le sens des valeurs, a fini, l'autre élément nouveau, par jeter des pans entiers de la population dans les bras de l'extrême droite. Aujourd'hui, en France, donner son suffrage ou appeler à voter Front national est devenu un acte tout à fait banal, dans certains cas un acte de fierté nationale. Près d'un quart des électeurs, une indication du premier tour à laquelle devraient s'ajouter tous les suffrages, et ils sont très nombreux, du second, ont donné et donneront de la voix avec enthousiasme. Décomplexés, ils affichent ostensiblement leur appartenance et assument clairement les thèses du Front national : la sécurité, l'immigration et la préférence nationale, essentiellement. Dans la france de 2017, un maire apparenté Front national, Robert Ménard en l'occurrence, peut avoir déclaré qu'« il y avait trop d'enfants musulmans dans les écoles de Béziers », ville dont il est maire et risqué une amende dérisoire de 2000 euros. A l'opposé de Jacques Chirac, qui avait refusé, en 2002, tout débat avec son concurrent d'alors, Jean-Marie Le Pen, Emmanuel Macron accepte la confrontation face à sa rivale. Il n'y a pas d'alternative, s'il se défausse, cela aurait été contreproductif et pourrait le conduire tout droit à l'échec. De plus, bien que la quasi-totalité des tendances poltiques appellent à voter en faveur de Emmanuel Macron, néanmoins, d'anciens ministres et autres grandes figures de premier plan, Christine Boutin, la fondatrice du Parti chrétien démocrate et ancienne ministre sous la présidence Sarkozy, Françoise Hostalier, ancienne secrétaire d'Etat et coordinatrice de la campagne de François Fillon pour le département Nord, ou encore Eric Cioti, député et l'incarnation de la droite dure, appellent ouvertement à soutenir et à glisser le bultin en faveur de la députée européenne. Ils sont nombreux à ne pas exclure la possibilité d'une cohabitation Front national-Les Républicains (FN-LR). Victime d'une primaire, un exercice qui n'est pas une tradition chez la droite et qui a cadenassé tout, fermant toutes les portes de sortie d'une éventuelle crise, Les Républicains se sont retrouvés dans une telle « impasse », disait Alain Juppé, induite par les révélations concernant leur candidat, qu'ils sont réduits mains et pieds liés [ par la primaire ] à assister impuissants au cataclysme qui s'annonce, incapables d'arrêter l'histoire en marche. D'une élection imperdable, ils sont passés à une élection ingagnable, par l'entêtement du candidat. Si pour l'instant l'on n'en est pas aux épées et aux couteaux, en coulisses, les stratégies main basse sur le parti s'affûtent. Les soutiens explicites et à titre personnel de certains ténors en faveur de Emmanuel Macron contrastent avec le communiqué du bureau politique qui invite à ne pas voter au profit de l'extrême droite, tout en indiquant que l'abstention n'est pas la solution. La réalité est que le parti traverse une crise profonde. Contrairement aux apparences où l'on affiche une unité de façade, le risque d'une implosion à très court terme est latent. Car, les courants qui animent la droite, allant de Sens Commun, émanation de la Manif pour Tous et farouche soutien du candidat François Fillon et, désormais, du front national, qui refuse ouvertement de voter au profit d'Emmanuel Macron, au Centre en passant par la droite sociale et humaniste, sont irréconciliables. Pour l'heure, les uns et les autres sont dans l'expectative, en attente de s'adapter à ce qu'il adviendra de la nouvelle configuration du paysage politique français.