Au deuxième jour du mois de ramadhan, ni le jeûne ni la chaleur de ce jour ne les ont empêchés de descendre dans la rue d'Alger centre et dans d'autres villes du pays. Fidèle à leur cause, les étudiants sont sortis hier par des milliers pour réclamer pour la énième fois le départ définitif des figures restantes du pouvoir, rejetant ainsi tout dialogue et négociation autour de l'avenir de l'Algérie avec le système en place. La jeunesse algérienne représentée par les étudiants s'est résolument retournée vers son avenir, à travers la persévérance dans sa lutte. « Nous appelons à une assemblée constituante guidée par des symboles nationaux et intègres », c'est notre revendication la plus légitime, estime Yacine, étudiant en droit qui se dit prêt « à manifester tous les jours jusqu'à ce que la volonté du peuple soit respectée, loin de tout subterfuge et malversation politique ». Cette jeunesse oubliée et longtemps discréditée par ses aînés semble aujourd'hui tenir indiciblement à sa liberté et à son émancipation dans une Algérie nouvelle et démocratique. Comme à chaque mardi, les universitaires ont honoré leur engagement et se sont rassemblés devant le lieu mythique de la contestation populaire, la Grand Poste. Depuis la matinée, un bouclier des forces de l'ordre s'est emparé de cette agora afin de les empêcher de prêcher et de rassembler les étudiants.11h00, le cordon sécuritaire cède à la pression et laisse place aux étudiants qui ont retrouvé leur pupitre, du haut des escaliers de la Grande Poste, le signale est lancé. Les étudiants brandissent leurs slogans et leurs affiches sur lesquelles, nous pouvons lire des citations différentes, ironisant et caricaturant certaines personnalités politiques, en deçà. Cependant le message est unique, « purger le pays de tous les symboles du système de Bouteflika », et appeler à « un état de droit, libre et démocratique, loin de toutes les tendances anarchiques, hypocrites et capricieuse de ceux qui tentent de récupérer le mouvement populaire ». Cette onzième sortie des étudiants témoigne de l'attachement de la jeunesse algérienne longtemps oubliée aux principes posés et clamés par le mouvement du 22 février. Ils ont bravé la chaleur et le jeûne et marché tout au long des boulevards principaux d'Alger centre, allant de la rue Didouche Mourad jusqu'au boulevard Amirouche, avant de revenir au lieu de départ qu'est la Grand Poste. Dans cette foule juvénile, les portraits de martyrs et de figures emblématiques de la guerre d'Algérie flottaient dans les airs. « Gloire à nos martyrs, vous pouvez vous reposer, la relève est assurée », s'était le slogan crié par les étudiants qui hissaient ces portraits. « Honte à toute personne œuvrant pour l'embrasement de la situation dans le pays », balance Ghani, tenant à la main une bougie. « Cette flamme ne s'éteindra jamais » riposte une camarade à lui, sourire au visage. Contrairement aux adultes et aux marcheurs de la dernière marche du vendredi, gagnés par le scepticisme, les étudiants quant à eux gardent espoir. « Nous sommes nombreux et nous nous organisons de manière à gagner le combat et non la bataille », commente Rami qui se dit « épuisé par la succession des événements politiques ces dernières semaines, mais résolu à poursuivre la lutte». Un mouvement en pleine maturation, qui jusqu'à maintenant déterminé à débusquer le pays de toutes les personnes appartenant au pouvoir « sans exception », dira Ania, étudiante en philosophie, qui a laissé pour manifester, comme des centaines de ses camarades les bans de l'université. « La victoire s'arrache, avec des sacrifices », a-t-elle ajouté avant de se joindre à la foule. Une casquette sur sa tête et un drapeau sur le dos, Kahina arrive à 12h30, le visage pâle et tout essoufflée, mais ravie de participer à cette onzième sortie estudiantine. Une action collective, une marche sous le signe du pacifisme, sans aucune embrouille constatée avec les forces de l'ordre, fortement présentes. « Nous voulons nous débarrasser de ce pouvoir corrompu et qui nous a longtemps soumis au culte de la maigreur », signifie Riham, qui plaide à l'instar de ses amis « pour l'édification d'un Etat de droit qui jugera les corrompus et restituera au pays ses richesses et sa jeunesse qui fuit l'injustice et se perd dans les profondeurs des océans ». Finissons avec ce triste rappel de la réalité, mais aussi avec la détermination des étudiants à sortir s'il le faut tous les jours pour faire pressions sur le pouvoir en place.