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Combattre la corruption, produit du système bureaucratique et de la dominance de la sphère informelle
Publié dans La Nouvelle République le 05 - 07 - 2019

L'objet de cette présente contribution qui fait suite à différentes contributions internationales d'autres est le fruit des différentes audits réalisées sous ma direction entre 1973/2018 concernant différents secteurs économiques qui ont relaté des surcoûts exorbitants par rapport aux normes internationales - mauvaise gestion ou corruption recommandations qui n'ont pas été suivies car s'attaquant à de puissants groupes d'intérêts, les différents régimes étant donc au courant de ces malversations puisque eux-mêmes ayant commandé ces études - et donc réconfortant l'action récente de la justice qui a été accompagnée par le Haut- Commandement de l'ANP. Mais s'il faut saluer les actions actuelles de lutte contre la corruption qui conduisaient le pays à la dérive du fait de leur ampleur et du niveau des responsables impliqués, qui étaient supposés protéger les deniers publics, pour une action pérenne, il faut s'attaquer à l'essence et non au secondaire car les mêmes pratiques dans une même organisation, reproduisent à terme les mêmes effets négatifs. Avec cette corruption socialisée, selon la majorité des rapports internationaux, il était utopique de parler d'une véritable relance économique.
Le système des investissements publics comporte plusieurs lacunes : Premièrement, les coûts des projets sont importants ; Deuxièmement, la préparation technique du personnel d'exécution et la qualité des projets sont généralement faibles et inégales, les projets contribuant ainsi faiblement à l'atteinte des objectifs stratégiques sectoriels ; Troisièmement, de nombreuses faiblesses trouvent leur origine dans l'urgence qui accompagne la préparation de projet à cette échelle, la myriade de demandes spécifiques auxquelles les projets sont supposés répondre.
Aussi les enjeux institutionnels et de gouvernance contribuent aussi largement à limiter les impacts malgré d'importantes dépenses monétaires. D'une manière générale, l'administration fiscale se contente de recenser ces exonérations sans déterminer les dépenses fiscales associées aux régimes dérogatoires, et ce, en raison des retards qu'elle accuse dans la mise en œuvre d'un système d'information complet et intégré comportant les différents avantages octroyés.
Le total des exonérations fiscales sans analyser les impacts, selon les informations de la direction générale des impôts (DGI) et la direction des grandes entreprises, diffère du montant figurant dans le rapport de présentation de l'avant-projet de loi de règlement budgétaire,, les dépenses fiscales comportant des risques élevés, liés principalement à l'absence de suivi des avantages accordés par les services de l'administration fiscale, en particulier le manque de respect des promoteurs des projets d'investissements de leurs engagements durant la période d'exonération.
Concernant les obligations de déclaration et de paiement des cotisations de sécurité sociale de certains ministères, contrairement aux dispositions de la loi n°83-14 du 2 juillet 1983 relative aux obligations des assujettis, modifiée et complétée, certains ministères n'ont pas, procédé à la souscription d'une déclaration annuelle des salaires et des salariés Ainsi, l'examen des situations relatives aux cotisations de sécurité sociale élaborées par la CNAS, les déclaration des ministères ainsi que la trésorerie centrale d'Algérie, a mis en en évidence l'existence d'écarts substantiels et des incohérences entre les chiffres présentés.
Tout le constat précédent qui montre un contrôle limité montre l'urgence de dynamiser le système financier, poumon du développement, afin qu'il ne soit plus un acteur passif de la redistribution de la rente des hydrocarbures dans le sillage des sphères de clientèle. La réforme bancaire doit toucher fondamentalement la nature du système et donc la propriété et pas seulement la rapidité de l'intermédiation financière (aspect purement technique), rapidité qui paradoxalement pourrait faciliter des détournements plus rapidement si l'on ne s‘attaque pas à la racine du mal qui ronge le corps social. Ainsi se pose la question suivante : combien de banques ont-elles une comptabilité décentralisée selon les normes internationales, seules condition d'audits internes sérieux.
Le système financier algérien est actuellement dans l'incapacité d'autonomiser la sphère financière de la sphère publique, cette dernière étant totalement articulée à la sphère publique. La totalité des activités quelques soient leur nature se nourrissent de flux budgétaires c'est à dire que l'essence même du financement lié à la capacité réelle ou supposée du trésor via la rente des hydrocarbures. On peut considérer que les conduits d'irrigation, les banques commerciales et d'investissement en Algérie opèrent non plus à partir d'une épargne puisée du marché, éventuellement un reliquat du travail mais par les avances récurrentes (tirage : réescompte) auprès de la banque d'Algérie pour les entreprise publiques qui sont ensuite refinancées par le trésor public sous la forme d'assainissement.
La bourse d'Alger, qui aurait pu dynamiser le secteur productif, création administrative en 1996 est en léthargie, les plus grandes sociétés algériennes comme Sonatach et Sonelgaz et plusieurs grands groupes privés n'étant pas cotées en bourse. L'important pour une bourse fiable est le nombre d'acteurs fiables au niveau de ce marché pour l'instant limité. Imaginez-vous un très beau stade de football pouvant accueillir plus de 100.000 spectateurs sans équipe pour disputer la partie.
C'est que la richesse ne peut apparaître que dans le cadre de la transformation du stock de monnaie en stock de capital, et là est toute la problématique du développement. Le recours à la planche à billets pour financer le déficit budgétaire doit être maîtrisé et destiné aux secteurs créateur de valeur ajoutée pour éviter un impact négatif à terme.
4- Avoir une vision stratégique et projeter le développement de l'Algérie horion 2030
Réformer en profondeur le fonctionnement de la société algérienne, implique d'analyser avec lucidité les relations dialectiques de la production de la rente (Sonatrach) et de sa redistribution (système financier), de quoi bouleverser fortement les intérêts, les gagnants d'aujourd'hui n'étant pas forcément ceux de demain. Paradoxalement, lorsque la valeur de la rente des hydrocarbures s'accroît, les réformes sont freinées et l'on assiste à une redistribution passive de la rente pour s'assurer une paix sociale éphémère, avec l'extension de la corruption et une concentration excessive du revenu national au profit d'une minorité rentière.
Ce couple antagonique des forces politiques, économiques et sociales, l'un défendant la rente et l'autre les réformes, explique fondamentalement l'instabilité juridique et le manque de cohérence et de visibilité dans la réforme globale.
D'où l'importance des solutions concrètes de sortie de crise. J'ai eu dans différentes contributions entre 1980/2019 mis en garde les gouvernements successifs sur l'incohérence de leur politique et des pistes de redressement national mettant en relief les liens entre réformes politiques, sociales, culturelles et économiques et une nécessaire vision stratégique, malheureusement non appliqués et aujourd 'hui nous en payons le prix, comme le démontre.
Al Harak du 22 février à ce jour qui a permis de dévoiler l'énorme gâchis avec cette corruption, étant une menace pour le développement et la sécurité nationale, de responsables aux plus hauts niveaux qui demandaient au peuple de se sacrifier, ce qui a crée une névrose collective. Or je n'ai pas attendu les évènements récents pour proposer des solutions concrètes de sorite de crise pour liant la moralité au développement et la sécurité collective au développement.
Je rappelle que venant d'une tournée aux Etats- Unis d'Amérique avec des informations précises des institutions internationales que j'ai rencontrées, sur la situation financière du pays, j'ai eu un débat houleux en 1993 à l'Aurassi avec le ministre Délégué au trésor devenu en 1994/1996 ministre des Finances (c'est Mr Ahmed Benbitour) de l'époque qui clamait que l'Algérie n'irait pas au rééchelonnement et qu'il avait des solutions toutes prêtes pour sortir l'Algérie de la crise.
Plus récemment, faisait suite au débat tenu que j'ai tenu à RFI Paris, le 12 novembre 2014, avec le Pr Antoine Halff, ex-économiste en chef du gouvernement Barak Obama et directeur de la prospective à l'AIE, sur «les perspectives de la chute du cours des hydrocarbures et leurs impacts sur l'économie algérienne», j'ai donné une conférence devant le Premier ministre et les différents membres du gouvernement au Palais des Nations, le 26 novembre 2014, où j'avais alerté le pouvoir politique et qui se sont malheureusement concrétisés alors que certains soi disant experts organiques annonçaient que tout va bien.
Mais l'on doit éviter la sinistrose, n'étant jamais trop tard pour bien faire, en évitant également l'autosatisfaction démagogique et destructrice, l'Algérie possédant toutes les potentialités de sortie de crise, sous réserve d'une réelle volonté politique de profondes réformes structurelles. D'où l'urgence d'une transition courte avant la fin de l'année 2019, afin d'éviter la déflagration économique et sociale de l'Algérie ce qu'aucun patriote ne souhaite. Comme je viens de le souligner dans une interview à Jeune Afrique (Paris France) le 24 juin 2019, une longue période de transition que certains proposent, le temps ne se rattrapant jamais en économie, conduira à la régression économique et sociale avec des réserves de change tendant vers zéro et le retour à la tutelle du FMI dans moins de deux ans.
Comme conséquence, nous aurons des incidences géostratégiques, politiques, sociales et économiques aboutissant à une déstabilisation de l'Algérie : privatisation des secteurs stratégiques, dévaluation du dinar, gel des salaires et processus inflationniste, réduction du budget de la fonction publique, de l'ANP et des forces de sécurité, impact sur les positions diplomatiques de l'Algérie, etc.… Aussi l'Algérie se trouvera-t-elle de plus en plus dépendante, quels que soient le Président et le gouvernement qui arriveront – car ne soyons pas utopiques, les lois économiques sont insensibles aux slogans politiques. Al Hirak autant que l'opposition sont traversés par différents courants idéologiques contradictoires, étant impossible qu'ils puissent s'entendre sur un programme de gouvernement. Car qui représenterait qui ? Nous l'avons constaté lors des différents débats sur les plateaux de télévision : l'opposition n'a pas un plan cohérent de sortie de crise (divergences idéologiques) et l'actuel pouvoir a retardé les réformes, ce qui a abouti à la situation actuelle.
Car les partis du pouvoir et de l‘opposition, avec leurs organisations satellitaires, sont rejetés par la majorité de la population, n'étant pas représentatifs de la société, ce qui annonce d'ailleurs une nouvelle reconfiguration sociale et politique produite par la nouvelle dynamique sociale, économique et politique. Il faut donc aller rapidement avant fin 2019 à une élection du Président, libre et transparente, en évitant ces slogans «dégagez tous» que certains utilisent dans un but de déstabilisation, la majorité des cadres algériens de 1963 à nos jours, pivot de son développement étant honnêtes.
Devant éviter à tout prix un vide constitutionnel, seul un président légitime peut réviser la constitution et aller vers de profondes réformes politiques et économiques, dissoudre les assemblées élues devant éviter à tout prix un vide constitutionnel.( voir les sept scénarios de sortie de crise du Pr A. Mebtoul www.google.com avril/mai 2019). Les structures actuelles qui, selon la rue et l'opposition, ont favorisé «la fraude électorale», le gouvernement actuel et les personnes décriées par l'opinion publique à tort ou à raison, n'ont-ils l'autorité morale pour superviser des élections propres et honnêtes ?Je préconise la mise en place d'une commission indépendante, présidée par une personne morale le ministère de l'Intérieur, de la Justice, et les walis, les présidents d'APC, assurant seulement la logistique, n'étant pas concernés par la supervision et les résultats des élections, la centralisation et la vérification se faisant au niveau de cette commission avec des réseaux décentralisés Parallèlement il est impératif la mise en place d'un gouvernement de compétences nationales (techniciens neutres non partisans), qui géreront les affaires courantes pour ne pas bloquer le pays jusqu'à l'élection présidentielle.
Espérons en la sagesse de chacun, privilégiant les intérêts supérieurs du pays. Venant d'une tournée en Europe en ce mois de juin 2019, la majorité des observateurs internationaux reconnaissent la maturité et la sagesse de la population algérienne et la maîtrise des événements par toutes nos forces de sécurité qui ont fait l'admiration du monde entier. Il s'agit de projeter l'Algérie à l'horizon 2020-2030 comme facteur de stabilité et de prospérité, tant interne que de toute la région méditerranéenne et africaine, et afin que notre pays devienne un pays pivot, car il en a toutes les potentialités. Attention à ceux qui ont toujours combattu les réformes, et qui veulent maintenant récupérer cet immense élan pour des intérêts personnels dont le seul objectif – sans propositions concrètes, et sachant qu'ils ne peuvent être élus, leur seul souci étant de se placer par décret autoritairement est de continuer dans l'ancienne trajectoire destructrice pour la Nation, celle de la distribution de la rente : objectif : remplacer l'ancienne oligarchie financière rentière par leurs propres réseaux.
(A suivre)
Professeur des universités, expert international Dr Abderrahmane Mebtou


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