« Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est pour le peuple le plus sacré et le plus indispensable des devoirs », dixit Maximilien de Robespierre, à la Convention nationale, le 10 juillet 1794. La prodigieuse œuvre des grands révolutionnaires français désignés sous le nom de Montagnards (1), à savoir la Constitution du 24 juin 1793, demeure toujours méconnue. Cette populaire constitution est délibérément ignorée de l'Histoire. Et pour cause. Parmi les arguments favorables militant pour cette Constitution toujours d'une grande actualité émerge la prééminence accordée au corps législatif. En effet, la subordination du pouvoir exécutif devant le corps législatif est consacrée par ce texte constitutionnel. En matière de gouvernement, la Constitution de 1793 place toute l'autorité réelle dans le corps législatif, émanation de la souveraineté populaire. Cependant, les pouvoirs du Corps législatif sont, à leur tour, bornés par les pouvoirs liés à la souveraineté populaire des citoyens. De fait, les citoyens disposent du pouvoir d'intervenir directement dans l'exercice du pouvoir législatif, matérialisé par leur droit de veto. Toute loi votée par le corps législatif n'a qu'une valeur de proposition, car soumise ensuite à l'approbation tacite des citoyens. La loi doit être « sanctionnée » (c'est-à-dire agréée) par les citoyens. Evidemment, les citoyens ne procèdent pas chaque semaine à l'organisation d'un référendum en vue de se prononcer sur la validité de la loi votée par le corps législatif. Le consentement des citoyens est tacite si la loi votée par le corps législatif ne soulève pas de contestation dans un délai de quarante jours. Dans le cas contraire, un vote doit être réorganisé. Et, dès lors, les citoyens partagent avec leurs députés l'exercice du pouvoir législatif. Il s'agit d'une sorte de « démocratie directe ». Par exemple, de nos jours en France, encadrée par une telle Constitution démocratique, la « société civile » française contemporaine n'aurait jamais toléré qu'une réforme de la retraite, rejetée par 80% des travailleurs (comme l'a rapporté une enquête Elabe), imposée par un pouvoir macronien élu par défaut – pour faire barrage à Marine Le Pen – avec moins de 28% des suffrages exprimés, soit adoptée. Le peuple aurait usé de son devoir de résistance contre l'injustice, de son légitime devoir d'insurrection. À plus forte raison, le peuple n'aurait jamais accepté que le monarque de la France des riches, Macron, finance discrétionnairement la guerre d'Ukraine, arme la maffia gouvernementale de Zelensky, sans passer par un vote parlementaire, voire un référendum populaire. Qui a dit que la France est une démocratie ? En tout cas, le peuple de France aurait appliqué à la lettre cet article constitutionnel : « Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est pour le peuple [...], le plus sacré et le plus indispensable des devoirs ». Une chose est sûre, en ces temps des crises politiques et économiques, des tyrannies financières et étatiques, des dominations des élites politiciennes inamovibles et des experts autoproclamés, des dictatures des pouvoirs exécutifs et présidentiels indéboulonnables, de régression sociale et de marche forcée vers la guerre généralisée, il est du devoir des peuples et du prolétariat mondial d'unir leurs forces pour s'inspirer de cette expérience historique des classes populaires françaises de 1793, entrées en scène par la « gauche » en imprimant à leur soulèvement insurrectionnel une orientation « prolétarienne ». Aujourd'hui, dans cette période troublée, face au système capitaliste qui précipite l'humanité dans la misère pandémique et la conflagration guerrière tsunamique, la destruction de la planète et l'implosion des rapports humains, le prolétariat de France pourrait-il réitérer l'expérience révolutionnaire des années 1792-1794 (et de 1871) en doublant les mouvements populistes petits-bourgeois (adeptes des processions liturgiques syndicales, cornaqués par les partis et syndicats réformistes inféodés au système) par la gauche : c'est-à-dire en imposant son programme radical politique d'émancipation sociale et économique en rupture avec le capitalisme, plate-forme d'une nouvelle Constitution prolétarienne dotée d'articles novateurs insoupçonnés ? Sans nul doute, aujourd'hui, en France comme dans tous les pays, toutes les conditions subjectives et objectives sont réunies pour la Révolution sociale émancipatrice. Contrairement à l'opinion communément répandue, le Nouvel ordre mondial (le nouveau mode de production) sera l'œuvre des peuples et prolétaires (travailleurs salariés de tous les secteurs et de toutes les nations, au chômage ou au travail, avec ou sans diplôme, en activité ou à la retraite, étudiants ou lycéens), non des classes dirigeantes mondialistes décadentes en voie de radicalisation guerrière et de démence politique antisociale, guettées par la disparition avec leur système capitaliste actuellement en plein effondrement. Au vrai, parce que le prolétariat produit presque l'ensemble des richesses qu'indûment la bourgeoisie s'approprie, c'est le seul agent économique légitime apte à devenir le promoteur d'un nouveau mode de production fondé sur la satisfaction des besoins essentiels humains et non sur le profit. À se rendre à bon droit l'Unique maître politique des institutions du pays. Mieux, du Monde, enfin réuni en une communauté universelle sans classe. 1. Pendant la Révolution française de 1789, les Montagnards forment un groupe d'hommes politiques républicains qui siègent à l'Assemblée législative et à la Convention. Les personnalités les plus influentes sont Danton, Marat et Robespierre. Pour sauver la Révolution attaquée de l'intérieur (contre-révolutionnaires) et de l'extérieur (première coalition), les Montagnards, bien que d'origine bourgeoise, acceptent de s'appuyer sur les Sans-culottes parisiens. Pour cela, ils consentent de céder à une partie des revendications politiques, économiques et sociales des Sans-culottes. En outre, les Montagnards sont appelés ainsi, car ils siègent en haut de l'Assemblée. 2. On désigne sous le nom de « Thermidoriens » (ou Thermidor) les vainqueurs de Robespierre, les 9 et 10 thermidor an II (27 et 28 juillet 1794). Le nom recouvre donc à la fois des anciens terroristes (Tallien, Barras, Fréron) et des modérés de la Plaine (Sieyès, Boissy d'Anglas, Cambacérès). Ce sont les Thermidoriens qui ont gouverné la France jusqu'à l'établissement du Directoire et même jusqu'au coup d'Etat de Brumaire de 1799 mené par Napoléon. Les idées politiques et sociales des gouvernants thermidoriens reflétaient celles de la bourgeoisie nouvelle, des acquéreurs de biens nationaux et des spéculateurs sur les fournitures de guerre ou les assignats, que les mesures en faveur des pauvres et la tentative de dirigisme économique des Montagnards, en l'an II, avaient inquiétés. Ils pensaient, comme Boissy d'Anglas, qu'« un pays gouverné par les propriétaires est dans l'ordre social, celui où les non-propriétaires gouvernent est l'état de nature ». Assurer la prépondérance de la bourgeoisie était le principal souci des Thermidoriens. On peut dire que leur œuvre et leur domination se perpétuent encore jusqu'à nos jours en France et ailleurs. Suite et fin