L'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) a décidé de réduire, nettement, son offre de 1,5 million de barils par jour, pour tenter d'enrayer la chute des prix pétroliers en pleine crise financière internationale. L'Opep va «réduire sa production de 1,5 million de barils par jour» (mbj) à partir du 1er novembre, a annoncé le ministre saoudien, et chef de file du cartel, Ali al-Nouaïmi, à l'issue d'une très brève réunion d'urgence à Vienne. Les 11 pays membres de l'Opep soumis au système des quotas (l'Irak en est exclu) vont, donc, réduire leur cible de production commune de 28,8 mbj actuellement à 27,3 mbj. Les «durs» du cartel, Iran et Libye en tête, souhaitaient une coupe massive de deux millions de barils jour, les modérés hésitaient à accepter plus de 1 mbj. Ils ont, donc, opté pour une solution médiane. Le ministre algérien du pétrole, Chakib Khelil, actuel président de l'Opep, a souligné que la baisse n'était pas «seulement de 1,5 mbj» mais de «1,8 mbj» d'ici «la fin de l'année», car «300.000 barils/jour sont déjà en train d'être retirés du marché par les pays membres». Lors de la conférence de presse de clôture, il a précisé qu'une autre «réunion était possible avant celle prévue le 17 décembre» à Oran (Algérie), si nécessaire. Les ministres s'étaient réunis en réaction à la chute des prix du pétrole, qui ont perdu plus de la moitié de leur valeur depuis leur record de 147,50 dollars, le 11 juillet. Cependant, le baril a continué sa dégringolade après l'annonce de l'Opep : il a fini en baisse de plus de trois dollars, à 62,45 dollars à Londres, après un nouveau plus bas à 61 dollars, dans la foulée d'une panique des marchés boursiers. Le marché «craint que la baisse ne soit pas suffisante pour compenser le ralentissement de la demande», a commenté Peter Fertig, analyste de Dresdner Kleinwort. La baisse de production de l'Opep sera répartie entre les pays membres en fonction de leur niveau de production. L'Arabie saoudite y contribue, ainsi, à hauteur de 466 000 barils/jour. «La crise financière a déjà un impact manifeste sur l'économie mondiale, réduisant la demande d'énergie, en général, et de pétrole en particulier», justifie l'Opep dans son communiqué, jugeant que l'effondrement «sans précédent» des cours du brut «met en danger de nombreux projets pétroliers» et «pourrait causer des pénuries d'offre à moyen-terme». Le cartel ne s'est fixé ni fourchette ni cible de prix à défendre, toujours selon son président. Pour David Kirch, de PFC Energy, certains pays veulent officieusement défendre un seuil de 100 dollars, d'autres de 80 dollars, 50 dollars étant «inacceptable» pour tous. L'Opep fait face à «son plus gros défi», selon l'analyste, depuis la crise asiatique de 1997, lorsqu'après qu'elle eut tardé à baisser sa production, le prix du baril s'était effondré à moins de 10 dollars. Actuellement, elle doit stopper la chute des prix pétroliers sans aggraver pour ses clients, les pays consommateurs, l'impact de la crise financière la plus grave depuis 1929. L'Agence internationale de l'Energie, qui défend les intérêts énergétiques des pays consommateurs, a espéré que la décision de l'Opep n'allait pas «exacerber ce qui est déjà une situation très fragile de l'économie mondiale» mais précise qu'il faut encore voir quels pays vont réellement «couper de combien» leur production. Le Premier ministre, Gordon Brown, s'est dit «déçu» de la décision de l'Opep, en rappelant que les choix du cartel jouent «un rôle crucial dans la relance de l'économie mondiale», tandis que la Maison Blanche a dénoncé une baisse de production «contraire au marché». Le ministre allemand de l'Economie, Michael Glos, a, lui, appelé à «la responsabilité» des pays producteurs de pétrole de «ne pas affecter davantage l'économie». La Norvège a, elle, opposé une fin de non-recevoir à la demande de l'Opep de participer à l'effort de stabilisation des prix.