Lorsque j'étais enfant, j'ai côtoyé sur les bancs de l'école un garçon qui s'appelait Abdessamed. Il était Palestinien. Abdessamed était un enfant comme tous les autres : farceur, rêveur, intelligent avec de grands yeux noisette, pétillants de malice. Abdessamed n'avait pas d'accent étranger quand il parlait l'arabe car il ne connaissait que l'Algérie où il est arrivé alors qu'il était encore bébé. Mais, tout en lui respirait son pays d'origine, sa Palestine. Cet enfant, d'à peine six ou sept ans, affichait d'ailleurs son identité comme un étendard, n'hésitant pas à dire à tous ceux qui l'approchaient pour mieux le connaître : «Ana min Falastine». Enfants, nous nous demandions, pour notre part, pourquoi Abdessamed était si loin de ce pays qu'il chérissait tant ? En fait, nous ignorions tout de l'horreur d'une guerre, nous qui vivions dans la paix et la sérénité. Les parents de Abdessamed ont tout fait pour inculquer à leur fils l'amour du pays. Tous les jours, ils lui ont raconté la Palestine et son tragique destin. A son tour, il venait nous conter le quotidien de ceux qui étaient restés chez eux, ceux qui n'ont pas choisi l'exil. Ils étaient, par ailleurs, des milliers à avoir été accueillis par l'Algérie et grâce à l'hospitalité légendaire des Algériens, ils s'étaient parfaitement intégrés à notre mode de vie. Si beaucoup sont restés jusqu'à aujourd'hui, en Algérie, car se sentant désormais Algériens, d'autres ont opté pour le chemin du retour. Tout comme ces derniers, Abdessamed est retourné chez lui et…qui sait ce que sont devenus sa famille et lui ? Sont-ils toujours vivants ? Ou ont-ils été sacrifiés sur l'autel de la barbarie israélienne ? Certes, le contact avec Abdessamed s'est perdu dans les méandres du temps et des années qui passent mais son souvenir ressurgit à chaque fois que la guerre reprend ses droits en terre de Palestine. Depuis plusieurs jours, l'horreur fait rage à Ghaza. Près d'un millier d'enfants, de femmes, de vieillards et de victimes innocentes ont été arrachées, cruellement, à la vie. Israël continue sa politique génocidaire à Ghaza et le monde observe, impuissant, car ceux qui ont le pouvoir d'arrêter ce nettoyage ethnique tergiversent. Pendant ce temps, Ghaza se meurt. Ghaza est martyre. Ghaza est terre de martyrs.