Les Français sont restés les maîtres de la planète handball en gagnant le championnat du monde, dimanche, aux dépens de la Croatie, 24 à 19, cinq mois après leur sacre à Pékin. L'or mondial est sans doute moins prestigieux que la médaille olympique, mais l'exploit signé par les Bleus à Zagreb est au moins aussi monumental que celui de cet été, car remporté chez leurs plus grands rivaux. Il fallait du cran aux Tricolores pour résister à la deuxième meilleure équipe du monde et à ses 15 000 supporteurs, pratiquement tous vêtus du maillot national à damier rouge et blanc dans la superbe et flambant neuve Zagreb Arena. «On leur a un peu gâché la fête. Maintenant, il va falloir qu'ils bossent dur pour nous rattraper et de ça, on en est très fier», s'est exclamé l'ailier de Montpellier Michaël Guigou, meilleur marqueur du match (10 buts). Leur victoire en Chine a gonflé les Bleus d'une confiance inébranlable. Ayant touché le sommet absolu, ils ont aussi l'avantage de pouvoir considérer avec légèreté l'éventualité d'une défaite. «J'ai attaqué ce match en me disant que je n'avais rien à perdre et tout à gagner. ça m'a permis de tenter mes tirs sans aucune pression», a expliqué l'ailier Luc Abalo (2 buts). Le principal danger était celui d'une perte de motivation. Ils l'ont balayé d'un revers de la main en survolant la compétition, leur succès le moins large ayant été remporté avec cinq buts d'écart, si l'on exclut la défaite sans signification, aujourd'hui, contre les Croates dans un match comptant «pour du beurre». Comme prévu, le match a été extrêmement rugueux et dominé par les défenses, entre deux équipes qui se connaissent parfaitement bien. Elles s'étaient déjà affrontées à deux reprises à Pékin, à chaque fois à l'avantage des Français. La tension, alimentée par les cris des supporteurs, est même parfois montée jusqu'à provoquer de petits accrochages, dont un entre les deux stars, Nikola Karabatic et Ivano Balic. Le Français, originaire de Croatie par son père, a d'ailleurs été tout particulièrement ciblé et a reçu quelques rudes coups dès le début du match. Souvent bloqué, il a fait briller les autres. A la pause, les Français étaient menés 12 à 11 après un chassé-croisé durant lequel l'écart n'a jamais dépassé un but, notamment grâce à un Daniel Narcisse auteur d'une entrée fracassante, le Chambérien marquant les quatre derniers buts tricolores de la première période. Ce mano a mano s'est poursuivi jusqu'à huit minutes de la sirène, lorsque les Tricolores ont pris pour la première fois du match deux buts d'avance grâce à Karabatic. Le vacarme est devenu progressivement moins étourdissant, car les Bleus, qui n'ont cessé de dégager une incroyable impression de sérénité, sont parvenus à gérer assez facilement les dernières minutes, jusqu'à remporter un succès qui étonne aussi par l'ampleur du score, face à des Croates jusque-là invaincus. «On leur a mis une bonne petite raclée, ça a dû leur rappeler Pékin», a dit Didier Dinart, qui faisait son retour au cœur de la défense après quatre matches manqués à cause d'une blessure à une cuisse. Sa présence est bien sûr pour beaucoup dans la performance défensive des Bleus, clé principale, encore une fois, de leur succès. «Ne prendre que sept buts en deuxième mi-temps contre les Croates chez eux, c'est énorme !», a lancé Karabatic. Le titre mondial des «Experts» est le troisième pour le handball français après ceux des «Barjots» en 1995 et des «Costauds» en 2001. Six des Bleus de Croatie étaient déjà de la finale de Paris-Bercy il y a huit ans : Jérôme Fernandez, Guillaume Gille, Daniel Narcisse, Didier Dinart, Thierry Omeyer et Joël Abati. Abalo, Guigou et Karabatic, qui n'en étaient pas, rejoignent le club ultra huppé de ceux qui ont gagné tout ce qui compte dans le hand, après l'Euro-2006 et les JO. En enchaînant les médailles d'or olympique et mondiale, les Tricolores signent un enchaînement qui n'avait que deux précédents dans l'histoire, par la Yougoslavie dans les années 1980 et la Russie une décennie plus tard.