Le Vietnam a inauguré dimanche sa première raffinerie, un projet longtemps controversé mais ultra-symbolique et vital, a réaffirmé le Premier ministre, pour la «sécurité énergétique» du pays. «C'est un projet clé, d'importance nationale», a déclaré le chef du gouvernement vietnamien, Nguyen Tan Dung, devant plus de 1 000 invités présents sur le site de Dung Quat, dans le centre du Vietnam. Ce complexe de plus de 2,5 milliards de dollars (1,95 md EUR) construit par un consortium mené par le Français Technip, est essentiel «à plusieurs égards - politiquement, économiquement, pour la défense et la sécurité nationales», a-t-il poursuivi. La cérémonie de lancement, organisée sous haute sécurité, était aussi retransmise en direct par la télévision nationale. Dung Quat devrait permettre au pays communiste de produire 6,5 millions de tonnes par an, ou 148 000 barils par jours, soit le tiers de ses besoins en produits raffinés. Le géant public PetroVietnam, qui exploitera le site, espère le voir tourner à pleine capacité en août. Pour le Vietnam, qui possède d'importantes réserves de brut mais devait jusqu'ici importer tout son pétrole raffiné, le pas est d'autant plus important que ses besoins explosent à mesure de son développement. En 2008, selon des chiffres du gouvernement, Hanoï a certes gagné 10,45 milliards de dollars (8,15 mds EUR) en exportations de brut. Mais il a dû en débourser 10,88 autres (8,49 mds EUR) en importations de produits raffinés. «La raffinerie de Dung Quat est l'une des plus modernes du monde», s'était plus tôt félicité Dinh Van Ngoc, responsable de l'unité en charge du site chez PetroVietnam. «Elle est très importante pour le Vietnam, à la fois d'un point de vue pratique et spirituellement. Elle montre à la nation entière et au peuple vietnamien que le Vietnam peut construire une raffinerie». Le projet est pourtant loin d'avoir été sans heurts. Lancée dans les années 90, Dung Quat n'a vraiment émergé qu'en 2005, année du choix du consortium et des premiers coups de pioche. Entre temps, les coûts avaient flambé - le budget enflait de plus d'un milliard de dollars - et plusieurs partenaires étrangers potentiels avaient jeté l'éponge, dont le français Total. L'aspect le plus controversé: la localisation à Quang Ngai, une province sans tradition industrielle, loin des gisements off-shore du pays et de son poumon économique Ho Chi Minh-Ville, l'ex-Saïgon (sud). Mais, expliquent les experts, Hanoï voulait faire émerger, au centre et dans une région pauvre, un nouveau pôle industriel pour faire contrepoids à l'ex-Saïgon et à la capitale Hanoï au nord. Les autorités espèrent voir se développer plus de 20 000 emplois dans la zone économique qui entoure la raffinerie. Construire le complexe à Quang Ngai a relevé d'une «décision politique», reconnaît Bruno Le Roy, l'ingénieur de Technip responsable du chantier. Dung Quat était la première raffinerie du pays. Mais une deuxième, au nord, est déjà en chantier et une troisième est aussi envisagée. Le Vietnam a certes enregistré un ralentissement économique l'an dernier: une hausse de 6,2% de son Produit intérieur brut (PIB), la plus faible performance en près de dix ans. Mais le Premier ministre espère voir la tendance s'inverser prochainement.