Bien des sujets communs, qu'ils soient d'ordre économique, politique ou sécuritaire, ont en effet atteint une phase de maturité qui nécessite, entre les deux pays, un débat pragmatique en vue de leur gestion optimum. Ce qui peut être dit des relations bilatérales entre l'Espagne et l'Algérie, qui sont très denses, peut aussi être dit des relations entre l'Algérie et l'Union européenne dans le cadre de l'Accord d'association. Une Union européenne dont l'Espagne assure la présidence depuis le début de cette année et avec laquelle l'Algérie s'apprête à faire un bilan de 5 années d'application de l'accord. Entre les deux pays et même entre l'Algérie et les pays du Sud de l'Europe, le volet énergétique demeure le plus important, le protectionnisme européen empêchant l'Algérie de concrétiser des ambitions commerciales sur le Vieux continent. Les divergences, sur le sujet, ont d'ailleurs été nombreuses entre Algériens et Espagnols, et l'on s'acheminerait, selon les observateurs, vers une solution à laquelle la visite de M. Bouteflika à Madrid, pourrait apporter un coup de pouce déterminant. Ce qui aurait pour effet de permettre le début de réalisation du gazoduc qui doit approvisionner l'Europe en gaz depuis Béni-Saf jusqu'à Almeria, d'un coût global estimé à 900 millions d'euros, avec une capacité initiale de 8 milliards de m3/an extensible ultérieurement à 16 milliards de m3/an. L'importance du volet énergétique tient au fait que sur ce sujet, l'Europe s'enfièvre à l'idée de dépendre, dans sa structure d'approvisionnement en gaz, de la seule Russie qui commence, de plus en plus, à développer un discours où l'on retrouve, en filigrane, le concept de l'arme énergétique. Son importance pour l'Algérie, qui n'inscrit pas ses rapports avec l'Europe dans une logique de force ou de chantage énergétique, tient au fait que notre pays entend concrétiser les meilleures conditions de commercialisation de cette ressource en Europe, ambitionnant même une commercialisation directe en Espagne notamment, où il est même dit qu'un accord verbal aurait été donné côté espagnol s'agissant également de la commercialisation de l'électricité. La nouvelle stratégie de valorisation de ses ressources énergétiques a poussé l'Algérie, ces dernières années, à développer un discours souverain qui consiste à opposer à l'hermétisme du collectivisme européen, une intransigeance à toute épreuve, à travers laquelle transparaît le refus de brader des richesses dont le pays dépend, aujourd'hui plus que jamais, pour relancer la machine économique et le développement social. Au-delà du pragmatisme européen consistant à évacuer les accords commerciaux de la sphère des négociations politiques, le volet énergétique est à ce point stratégique qu'il ne peut être confiné dans son seul volet commercial, l'Algérie ayant la ferme intention d'intégrer ce cadre à l'ensemble des points de divergence entre notre pays et l'UE, dont celui, et non des moindres, concernant les conditions de circulation des Algériens au sein de l'Union européenne. Toutes ces questions font l'objet de perceptions différentes que la visite du Président Bouteflika en Espagne pourrait rapprocher, cela en sachant que les deux pays sont parfaitement sur une ligne politique similaire quand il s'agit de la question du Sahara occidental, de même qu'en matière de gestion sécuritaire dans le cadre de la lutte contre le terrorisme transfrontalier, surtout avec les derniers faits terroristes perpétrés, contre des intérêts espagnols dans la région, par l'aile maghrébine d'Al-Qaïda. Quoi qu'il en soit, l'Algérie a eu le loisir de comprendre, depuis la signature de l'Accord d'association avec l'Union européenne, qu'il n'y a rien à négocier avec cet ensemble économique absolument protectionniste, travaillant exclusivement à la promotion de ses propres intérêts dans un cadre strictement commercial. La brèche est dans les relations bilatérales entre l'Algérie et les pays du sud de l'Europe qui, s'ils entendent promouvoir des relations mutuellement profitables avec l'Algérie, doivent faire des concessions égales à celles que leur fait notre pays, sans prétexter, dans un quelconque cadre sécuritaire, économique ou autre, avoir cédé leur souveraineté à l'UE. L'UE ne fait pas de politique, alors que tout accord économique a besoin de base politique pour asseoir ses raisons d'être sociales, humaines et autres.