La reprise qui intervient à l'orée d'un été qui n'a rien d'exceptionnel, sauf d'être le théâtre d'une Coupe du monde africaine qui n'a rien à voir avec la vie politique, suggère que ce n'est pas le moment qui est particulièrement propice à cette reprise, mais plutôt un calendrier de décisions présidentielles que le chef de l'Etat entend mettre en branle présentement. En tête de cette liste de décisions présidentielles annoncées, le remaniement ministériel et le contenu du programme quinquennal. Pour la première, l'encre a coulé à flots des mois durant, réalisant sur les colonnes de la presse, plusieurs remaniements imaginaires, dont on n'a pas vu la couleur à ce jour. Cela même si sur la scène politique, les uns et les autres se désignent mutuellement comme les futurs remaniés, et même si on a fini d'épuiser la liste des initiés dont on a servi, à maintes reprises, les noms pour crédibiliser un remaniement qui reste encore à venir et sur la probabilité duquel il ne faut pas parier sa dernière chemise. Et puis les questions qui portent sur ce remaniement ne risquent pas de trouver leurs réponses au sein des formations politiques au pouvoir, puisqu'elles seront, si remaniement il y a, les premières à en faire les frais ou à en récolter les bénéfices politiques. D'ailleurs, il fut, un certain temps, question dans la presse d'une guerre entre formations politiques, préparant, semble-t-il, un changement important au sein de l'Alliance présidentielle, et ce n'est pas la générosité des premiers concernés, comme ce fut le cas du MSP et du PT, qui affirmerait le contraire. Pour la seconde, et qui se trouve au cœur de la politique publique et la matière même de toute l'action de développement des dix dernières années, elle toucherait le programme quinquennal d'investissement dont il est dit qu'il passerait des 150 milliards de dollars, tel qu'annoncé à la veille et au lendemain de la réélection pour un troisième mandat du président Bouteflika, à pas moins de 280 milliards de dollars ; une manne qui servirait l'effort de développement économique et de construction. Cette manière de sorties présidentielles est une façon pour le chef de l'Etat de rompre avec la gouvernance par le discours, préférant gouverner par la gestion et par la décision dont l'espace privilégié est le Conseil des ministres, qui semble retrouver grâce auprès du Président Bouteflika, après qu'il l'eût boudé près de six mois durant. Ce qui plaide davantage pour l'idée que le prochain conseil des ministres, ainsi donné comme exceptionnel, pour être le second en quinze jours, après six mois d'absence et pour avoir été programmé un lundi au lieu de la périodicité habdomadaire du mardi, ne sera qu'un conseil comme les autres, c'est le fait que celui du 12 mai dernier, qui pouvait, à juste titre, être le théâtre de cette dramatique politique, ait été un conseil de ministres tout ce qu'il y a de plus ordinaire. Ne faut-il pas reconnaître, dans tous ces signes, la volonté présidentielle de secouer un exécutif qui a fini par dormir sur ses lauriers ? Gageons que sans un ordre du jour précis sur la convocation inhabituelle du lundi, et après un conseil très ordinaire, les membres de l'exécutif Ouyahia vont tout faire pour ficeler leurs dossiers avant le rendez-vous d'après-demain, du moins les plus sérieux d'entre eux. Enfin, il ne faut pas perdre de vue qu'en Algérie, un peu plus qu'ailleurs, les rentrées sociales sont très fragiles, cela surtout qu'elles sont précédées ces dernières années par le mois du Ramadhan, très éprouvant pour la majorité des couches sociales. C'est d'ailleurs l'occasion de bilans institutionnels, de redditions de comptes sectorielles, d'escales d'évaluation de l'état d'avancement et de la qualité d'exécution des grands projets. Bref, c'est une mise à l'épreuve décisive pour l'exécutif qui doit commencer à préparer sa rentrée. C'est, après tout, peut-être pour cela que le chef de l'Etat accélère donne le ton, à travers cette reprise, à une mobilisation qui aura désormais en ligne de mire, la rentrée sociale ?