I) L'année 2010 a vu les ondes de choc de la crise mondiale d'octobre 2008, qu'en est-il pour l'Algérie ? L'année 2010 a vu continuer les ondes de choc de la crise mondiale d'octobre 2008 à l'instar du krach d'octobre 1929 consécutif à une bulle spéculative amplifiée par le nouveau système d'achat à crédit d'actions, les investisseurs pouvant acheter des titres avec une couverture de seulement 10 %, le taux d'emprunt étant fonction du taux d'intérêt à court terme et la pérennité de ce système dépendant, donc ,de la différence entre le taux d'appréciation des actions et ce taux d'emprunt, mais à la différence qu'il y a une interdépendance accrue des économies et, donc, que la crise est devenue mondiale. Cependant, nous sommes passés d'une crise bancaire à une crise de l'endettement excessif des Etats avec les crises grecque et irlandaise, qui risquent de se propager à d'autres pays fragiles de la zone euro comme le Portugal, l'Espagne et l'Italie, les pays résistant le mieux étant la France et surtout l'Allemagne, locomotive de cette zone. Après la politique de déficit budgétaire renvoyant à la théorie keynésienne de courte durée, les gouvernants sont revenus à une orthodoxie monétaire. La leçon à tirer est qu'une politique monétaire sans liens avec la sphère réelle et donc une régulation globale, posant d'ailleurs la problématique de la suprématie du dollar déconnecté vis-à-vis de l'or depuis 1971, comme monnaie de transaction internationale (60 % en 2010 contre 26 % pour l'euro), dont la valeur, bien qu'ayant diminué selon les fluctuations entre 30 et 40 % par rapport à l'euro depuis 2000, tient surtout aux fonds souverains déposés par la Chine (plus de 700 milliards de dollars sur un total de réserves de changes chinois dépassant 2.600 milliards de dollars en septembre 2010). Les Etats-Unis, quant à eux, continuent par l'importance de leur déficit budgétaire à se comporter comme une banque d'investissement qui se finance massivement en émettant de la dette et en investissant de façon colossale en actifs risques étrangers (stocks, investissements directs). Cependant il faut éviter l'utopie. Certes, la Chine, avec 1,3 milliard d'habitants, étant devenue la deuxième puissance économique mondiale en termes de produit intérieur brut (PIB) en 2010, mais avec un PIB par habitant à un niveau des pays pauvres de la planète, avec de profondes disparités de richesse, tout dépendant à l'avenir de l'évolution du pouvoir d'achat (extension de la demande solvable) fonction de l'extension des couches moyennes. Elle a un marché intérieur potentiellement important mais réellement encore limité avec un taux de croissance tiré par la dépense publique qui dépend fortement pour ses exportations d'une reprise économique de l'Europe et des Etats-Unis, ce qui explique qu'elle s'est portée au secours de certains pays d'Europe comme la Grèce, l'Espagne et le Portugal et d'autres pays de l'ex-camp communiste membres de cette zone, non par philanthropie mais pour des raisons économiques, 60 % de ses exportations allant vers la zone euro. D'une manière générale, l'année 2010 a vu la prise de conscience d'une nouvelle gouvernance mondiale avec des institutions supranationales de régulation comme en témoigne le poids grandissant des pays émergents comme la Chine, l'Inde le Brésil qui préfigure de profonds bouleversements géostratégiques entre 2015 et 2020 au vu du passage du G8 au G20. A-t-on tiré les leçons de cette crise ? Or, outre le fait de se poser la question si face à la crise mondiale, qui est structurelle et non conjoncturelle, le prix Nobel d'économie de 2001 Joseph Stiglitz estime que ces actions ne sont qu'une solution à court terme les comparant à «une transfusion sanguine massive à une personne souffrant d'une grave hémorragie interne». Par rapport à cette situation, l'Algérie, dont le système financier est totalement déconnecté du système financier international étant une économie de rente, 98 % de ses exportations provenant des hydrocarbures et important 75 % de ses besoins , a un effet limité de la crise mondiale et a continué à favoriser la dépense publique. La crise a un effet indirect via les hydrocarbures et le placement de nos réserves de changes à l'étranger (environ 80 %), les taux directeurs des banques centrales étant bas et, avec le taux d'inflation, les rendements étant presque nuls. Les prix du baril du pétrole se sont légèrement redressés en 2010 non pas à cause des facteurs essentiellement économiques mais surtout spéculatifs tandis que le prix du gaz, du fait de la révolution du gaz non conventionnel, plafonne toujours entre 4/5 dollars le million de BTU, le prix de cession du gaz étant totalement déconnecté vis-à-vis du prix du pétrole. L'Algérie étant avant tout un pays gazier et non pétrolier (moins de 1% des réserves mondiales contre 3 % pour le gaz), cela aura un impact sur le rythme futur du financement, la rentabilité des installations gazières en Algérie s'étendant jusqu'à 2016/2017, tant pour les canalisations (GN) que les unités GNL dont la rentabilité varie entre 10 et 14 dollars le million de BTU, les coûts de Sonatrach étant supérieurs à la moyenne de l'OPEP sans compter la faiblesse du management des ressources humaines. Se posera donc un véritable problème aussitôt les contrats à moyen terme arrivant à expiration horizon à l'2013/2014.
II) L'année 2010 a vu des scandales de corruption à répétition Sonatrach étant l'Algérie et l'Algérie étant Sonatrach, l'année 2010 a vu le scandale financier de Sonatrach qui n'est pas terminé. Mais cela touche presque tous les secteurs comme ceux de l'autoroute est-ouest dont le coût prévu était d'environ 7 milliards de dollars en BOT et qui arrivera à plus de 14 milliards de dollars sur les fonds publics, les banques, ce qui se répercute négativement sur l'image du pays, tout cela étant lié à une corruption socialisée. L'Algérie est classés au niveau international 2010 avec un niveau de corruption élevé qui démobilise la population et favorise le divorce Etat-citoyens. Cela renvoie à une gouvernance mitigée et à l'urgence de la démocratisation de la gestion économique et politique concernant tant la gestion de la rente des hydrocarbures, propriété de toute le peuple algérien, que la gestion des réserves de changes et une plus grande transparence dans l'octroi des crédits des banques primaires qui ne sont que l'effet indirect de cette rente. Sans cela, les mesures telles que l'installation de l'observatoire sur la lutte contre la corruption, la réhabilitation de la Cour des comptes, le recours à la monnaie scripturale (chèques ou cartes bancaires) pour tout paiement supérieur à 500.000 DA, qui entrera en vigueur le 31 mars 2011, cette date ayant été retenue de sorte à garantir que les banques soient entièrement en mesure de répondre à la demande du public pour l'ouverture d'un compte et pour l'obtention rapide d'un chéquier, seront d'une portée limitée. Il s'agira donc pour rendre opérationnelles de telles mesures d'avoir des informations et des réseaux d'information fiables transparents connectant notamment la douane, la fiscalité, les banques et de nouveaux mécanismes de régulation aux niveaux central et local des entreprises puisque les walis sont en charge de bon nombre de projets. Il en sera de même pour les deux lois relevant du domaine du commerce adoptés à l'APN le 12 juillet 2010 relatives aux textes amendant et complétant les anciennes législations énumérées dans la loi 05-02 du 23 juillet 2004 et liées aux pratiques commerciales et celle du 19 juillet 2003 relative à la concurrence, mettant en avant la nécessité d'une intervention plus efficace des pouvoirs publics à travers, notamment, les mécanismes de contrôle dont dispose le ministère du Commerce afin de limiter les effets de la spéculation sévissant dans le domaine de la pratique commerciale et ayant un impact négatif sur le pouvoir d'achat du citoyen. En effet, la difficulté d'appliquer cette mesure réside en le fondement de la sphère informelle ne pouvant isoler cette sphère de la sphère monétaire avec la dominance en Algérie des mécanismes de régulation, des institutions et des pratiques informelles. Les chiffres en Algérie, faute d'enquêtes précises, sont les plus contradictoires 40 à 50 % de la masse monétaire en circulation hors banques, avec une intermédiation financière informelle limitant la politique monétaire globale de l'Etat, mais beaucoup plus si l'on inclut les transactions en nature. Cette dualité de l'économie algérienne rend difficile la régulation tout en pouvant favoriser également la fausse monnaie dont l'année 2010 a permis de mettre en relief l'ampleur. L'efficacité d'une telle mesure doit fondamentalement reposer sur une plus grande cohérence et une visibilité dans la politique économique et sociale. (A suivre) Pr Abderrahmane