Amoins d'un mois de la tenue du scrutin présidentiel du 9 avril prochain, et même si les jeux semblent, comme le répercute la vox populi, d'ores et déjà faits, rien n'empêche, cependant, de tenter de réexaminer, à tête reposée, comment se présentent concrètement les choses sur le terrain, histoire d'envisager, en ce qui concerne principalement le camp dit des démocrates réticents, une possible stratégie d'action concertée nettement plus profitable, probablement, que cette attitude obsessionnelle limitée à ce duel «camp pro-Bouteflika présidentiable - camp anti-troisième mandat illégal» dont on sait d'avance qui en sortiront les gagnants avec les félicitations des plus puissants pays démocrates de ce monde !... Si l'on voudrait s'en tenir à une considération des choses, relativement indépendante par rapport aux positions des deux camps, ne constaterait-on pas, qu'on est là, en fait, en présence d'un faux débat concernant des enjeux particuliers, à l'exclusion du reste, comme l'ont signalé déjà auparavant certains observateurs politiques connus du pays ? Ne voit-on pas, en effet, diverses tendances se livrer à une bataille de surenchère politique dont le perdant majeur est, comme d'habitude, l'infortuné et malheureux peuple algérien, toujours pris de vitesse par ceux-là-mêmes auxquels il a confié l' «Amen» de sa confiance ? Ainsi, il y a d'une part les partisans du troisième mandat de M.Bouteflika, dont la cause est entendue et qui jurent que leur homme providentiel a déjà beaucoup fait mais qu'il lui reste des programmes à parachever, n'ayant pas eu, auparavant les coudées franches pour tout mener à terme ; et d'autre part, les adversaires de cette option, pour qui cette perspective constituerait une véritable calamité pour l'Algérie, menaçant sérieusement ses espoirs de développement et de démocratie. Deux positions diamétralement opposées, comme on le voit, mais qui, quoique étant totalement antagonistes, ne sont pas moins tributaires d'une même logique exclusiviste imposante du «oui avec / non contre» manichéen, et qui veut que le destin de la nation se joue sur la reconduction de Bouteflika ou de sa non reconduction à la présidence. Une bien étroite vision des choses que l'ancien secrétaire général du FLN, M. Abdelhamid Mehri a eu l'occasion de fustiger, en reprochant à ses tenants, partisans et opposants de la candidature de M.Bouteflika, de «priver ainsi le pays d'un véritable débat qui lui aurait permis d'identifier les causes réelles de l'impuissance, des erreurs, du marasme, des déviations et des dépassements subis par lui». Renvoyant, ainsi, dos à dos panégyristes et détracteurs de Bouteflika, l'homme s'est dit convaincu que «la prolongation du mandat du Président, sans changement radical du système de pouvoir, conduit le pays au minimum à une impuissance plus marquée à résoudre ses problèmes et à faire face aux grands défis qui l'attendent à l'intérieur et à l'extérieur. De même que l'intronisation d'un nouveau président, quelles que soient ses qualités, sans changement radical du système, conduira aux mêmes résultats». Malheureusement cette vision pragmatique des choses en vue de diagnostiquer le mal qui menace l'avenir politique du pays par la perduration d'un système vacillant, n'a retenu l'attention, «ni du pouvoir en place, dont la préoccupation n'est pas de rompre avec le système incriminé et duquel il procède, ni par les courtisans thuriféraires de Bouteflika qui voient dans la reconduction de celui-ci, la pérennisation des promotions et autres privilèges acquis durant ses deux précédents mandats, ni par ceux qui, sous couvert de la défense de principes démocratiques menacés par le maintien de Bouteflika à la présidence, mènent en fait un combat contre l'homme uniquement». ( cf. Kharroubi Habib, in la chronique - analyse publiée dans «Le Quotidien d'Oran» du 28/01/2008). Ainsi, du point de vue de certains observateurs, le changement sociopolitique radical de la société algérienne semble moins importer que les enjeux particuliers de la plupart des protagonistes : les uns soucieux surtout d'imposer une candidature pour un 3è mandat présidentiel, garant du maintien en l'état actuel des choses des pratiques de gouvernement et de leurs intérêts, et parmi les autres opposants démocrates il y a ces tendances qui prônent exclusivement cet objectif majeur se limitant essentiellement à barrer la route à la reconduction d'un président dont les mandatures semblent avoir contrarié, ou leurs ambitions ou leurs intérêts. Attitude qui semble, en outre, tendre à faire croire naïvement qu'un simple changement d'homme à la tête de l'Etat équivaudrait à un changement de système ! Alors que les choses sont de loin beaucoup plus complexes que ça et nécessitent, au contraire, de profondes restructurations à divers niveaux sociopolitiques, économiques et culturels, etc., passant par la nécessité d'un grand débat démocratique national, engageant tous les représentants de la société civile à se prononcer sur l'avenir de la nation. Esquisse de perspective évoquant, à bien des égards, les débats populaires de l'ex-Charte nationale de 1976, et qui en ces temps nouveaux de la consécration du pluralisme et du contexte international de la mondialisation, en appelle à la mise en chantier concerté d'une charte pluraliste moderne, plus appropriée, autrement dit envisager un pacte démocratique pluraliste national. Quant au simple citoyen, il est souvent pris à témoin de la polémique suscitée par les deux camps antagonistes, arguant, chacun de son coté, de la nécessité de s'en remettre aux hommes de leur sérail et leur candidat copté, ou de leur mouvance prônant boycott et résistances frontales, pour le salut de l'Algérie, propagent-ils, mais que l'homme de la rue entend comme étant le leur surtout : celui aspirant à une gouvernance convoitée pour leur mainmise d'intérêts privilégiés et idéologie monopolistique, totalement coupés des réalités du peuple, l'avenir de la «populace» du bled ou de l'Algérie profonde, hors des salons des manigances politiciennes et affaires juteuses, important peu, visiblement! Sinon, comment s'expliquer ces refus d'engagements de débats indispensables, de part et d'autre et à tous les niveaux, d'une manière générale, pour pouvoir tenter d'amorcer, un tant soit peu, le changement salutaire du système ? A ce jour, l'on continue, toujours, malheureusement, à se complaire inconsidérément, par-ci et par-là, sur l'art des faux fuyants politicards, alors que le pays n'en finit pas de connaître des régressions, à divers niveaux, hélas, au point que l'ensemble de la composante humaine du paysage politique algérien en est venu à sérieusement se discréditer, et devant l'opinion publique nationale et devant la communauté internationale. Ne répercute- t-on pas qu'en Algérie il n'y a ni pouvoir viable ni opposition fiable? Et que l'on se méprenne pas, ces propos ne sont pas dans le but de fustiger le camp de l'opposition, et notamment celui des démocrates, pour leur attitude frileuse devant un pouvoir trop souvent dédaigneux des droits citoyens, pour ne pas dire parfois démissionnaire, comme il le leur est reproché par de larges pans de la population algérienne. Mais il s'agit, ici, surtout de discuter ouvertement de l'attitude qui laisse à désirer de certains membres influents de la Mouvance démocratique nationale qui, pour le mentionner au passage, est très vaste, et de ce fait n'en sont pas les responsables-représentants nationaux exclusifs, tant qu'ils n'ont pas été désignés au niveau d'un conseil de coordination nationale du front populaire représentatif large de tous les démocrates algériens. Ceci, sachant que la mouvance nationale des démocrates algériens est fort complexe, et ne se limitant point à quelques partis ou associations au niveau de quelques grandes villes, mais qui, bien au contraire, est très vaste. Tout comme le paysage politique national, qui, contrairement à ce qu'on a tendance à répercuter par voie de presse des intéressés, est loin d'être restreint à la simple répartition, par trop schématique, des mouvances «nationalistes», «démocrates», «islamistes», «indépendants»,etc., sur le terrain. Ainsi, et pour en donner l'image d'un tableau global de cette complexité intrinsèque propre à chaque mouvance, il sied, peut-être, d'évoquer l'exemple édifiant de la grande diversité qui caractérise les courants se réclamant de l'Islam comme il en est de même pour les tendances diverses se réclamant de la Démocratie. Car, s'il est vrai que l'Islam caractérise des musulmans de tendance modérée, des musulmans sunnites et chiites, des musulmans de rites malekite, hanafite, chafi'ite, hanbalite, des musulmans traditionalistes, des soufis maghrébins perpétuant les Touroq des zaouia, ou des musulmans prônant le modernisme, le réformisme, etc., sans omettre les violents extrémistes, d'un autre age, etc., il est non moins vrai que la Démocratie, revêt, elle tout autant de multiples facettes, y compris dans notre pays, et n'est absolument l'apanage d'aucune tendance particulière qui prétendrait en détenir le monopole : les responsabilités au niveau national nécessitant la large concertation inter-démocrates en vue de l'émergence, par exemple, d'un Conseil de coordination et de solidarité du front national des démocrates des Algériennes et Algériens, ou tout autre instance démocratique populaire large, librement éligible, apparaissant, de la sorte, comme l'organe approprié pour toutes décisions cruciales, collégialement concertées lors des situations exceptionnelles, présentes ou à venir, et engageant le devenir de l'ensemble des éléments nationaux tributaires de la mouvance démocratique algérienne, répartis à travers tout le territoire national. Dans le respect, naturellement, des positions pluralistes et des choix libres de chaque tendance, ou éléments singuliers de la vaste mouvance démocratique populaire nationale. Ainsi, et contrairement à ce qu'établit la classification coutumière depuis l'avènement du pluralisme dans notre pays, le paysage politique algérien fort complexe, donc, ne se réduit pas simplement à ces mouvances de démocrates, des nationalistes, des islamistes et des indépendants, etc., sans précision des contours, et des caractéristiques autres, voilant des divergences d'ordre doctrinal ou de réorientation idéologique fondamentale, etc. En effet, rien ne se concevant à l'état pur, concernant la particularité de quelque courant qu'il soit, ce dernier n'existe dans les faits que par la diversité de ses sensibilités, très variées à l'intérieur de sa mouvance globale, génératrice : ainsi, si la mouvance islamiste, comme indiqué ci-dessus, se répartit en différents courants, de même que la mouvance nationaliste se compose en éléments nationalitaires se réclamant de l'option socialiste, d'autres de la tendance baathiste arabo-islamique, d'autres de la tendance amazighe maghrébo-musulmane, ou berbéro-francophone, d'autres de la tendance laïque toutes langues confondues, etc., il en de même pour la mouvance démocrate nationale qui se caractérise par la composante pluraliste de ses éléments, comptant parmi ses rangs : des démocrates laïcs libéraux, des démocrates laïcs tendance gauche, des démocrates musulmans pro-laïcisme, des démocrates prônant la spécificité algérienne, des démocrates indépendants, des démocrates appartenant à divers partis ou institutions nationales et internationales, etc., etc. Comme on le voit les choses sont plus complexes qu'elles ne le paraissent, et il existerait d'autres mouvances en Algérie encore : celle des indépendants incluant tout autant parmi ses rangs des indépendants de divers horizons, à savoir des francophones, des berbérophones, des arabophones, des bilingues, etc., tendant à prôner de façon relativement autonome, des positions divergentes, non seulement par rapport à celles des autres camps mais aussi par rapport à celles des divers indépendantistes de leur propre camp : ainsi ces indépendants démocrates libéraux, ces indépendants d'idéologie centre-gauche, d'autres prônant la démocratie spécifique, d'autres l'islamisme modéré et tributaire, ou pas, de certains courants musulmans modernistes, etc. (on ne pourrait pas tout énumérer ici, ceci n'étant pas l'objet de la présente réflexion dont l'auteur se doit d'insister sur la particularité de cette libre opinion autonome, relevant de ses strictes convictions personnelles tenant constamment en haute considération l'éthique de la libre pensée et liberté d'expression). Certains points nécessaires clarifiés, revenons, à présent à notre sujet de départ, en l'occurrence la perspective des présidentielles du 9 avril prochain, même si, encore une fois, à l'heure actuelle, l'on répète partout «le match est arrangé» ( «El match mab'you'e»), c'est l'expression galvaudée dans la rue . Cependant, et face à l'appel du vote massif des uns, ou à celui du boycott général des autres, pourquoi les démocrates Algériens, à tous les niveaux de la vaste mouvance populaire nationale, ne tenteraient-ils pas, via des représentants ou délégués désignés à un Congrès national, d'envisager d'autres options moins maximalistes et restrictives que celles prônant, de façon unilatérale par quelques responsables démocrates, le retrait général, le boycott avec tous les risques potentiels de heurts qui ne profiteraient, qui ne le sait, qu'aux extrémistes islamistes à l'affût de la moindre occase de confusion ? Pourquoi, donc, ne pas envisager des voies de recours moins porteuses de risques aventureux, attisant les haines entre les partisans de camps antagonistes et à même d'encourager partout la saine culture démocratique pacifiste et de solidarité citoyenne entre Algériens, contre le calcul égoïste antipopulaire des apprentis sorciers des coulisses, tentés par les fraudes et contre ceux qui se sont obstinément déclarés contre l'éventualité d'un troisième mandat de M. Bouteflika que seul le peuple aurait à décider souverainement de sa reconduction ou pas ? La vérité oblige à dire aujourd'hui que les candidats potentiels qui pouvaient rivaliser avec le président sortant avaient cherché à éviter la confrontation avec ce dernier, et l'histoire retiendra certainement qu'ils avaient manqué d'audace pour se présenter à ce tournant présidentiel, ratant, vraisemblablement, une sérieuse opportunité que n'a pas laissé échapper la responsable du Parti des Travailleurs, Mme Louisa Hanoun, qui est loin d'être un suppôt du pouvoir, comme le soutiennent certains. Cette dernière semble plutôt témoigner d'une certaine stratégie de déploiement, en situation de vase clos, contrairement à la réaction de retrait qui risque fort de discréditer le front des démocrates, ce centre mou, qui attend souvent que les miracles de félicité démocratique pleuvent du ciel ! Quoi qu'il en soit, la responsabilité des Algériennes et des Algériens de bonne volonté en appelle, à l'heure actuelle, à leur conscience pour tenter d'envisager pacifiquement, la concertation entre représentants démocrates nationaux à même de se prononcer collégialement sur la participation (avec consignes de vote) ou pas, au scrutin du 9 avril prochain. Et si le boycott général est décidé, qu'il soit observé de manière pacifiste, les songeurs à un «grand boucan» devant s'interdire d'encourager les misérables enfants du peuple à s'aventurer dans la rue dans la perspective d'un spectacle tout en couleurs, suivi à distance par les siens pouvant crier, en toute quiétude, à l'abri et avec enthousiasme «vive la démocratie !» Très franchement, n'y a-t-il pas d'autre alternative à adopter par les partisans de l'abstentionnisme, autre que celle envisagée ? Ces derniers ont tout à fait le droit de ne pas voter, comme ils l'entendent, et personne n'a le droit de les contraindre à opter pour le contraire. Mais, il faut se rendre à l'évidence : d'une façon comme d'une autre le vote va avoir lieu, et comme l'a écrit un chroniqueur d'un grand quotidien national, la candidature pour un 3è mandat présidentiel se soucie peu du taux de pourcentage réduit pour sa consécration programmée, l'essentiel étant la reconduction aux commandes du vaisseau Algérie. Et si les choses promettent d'aller dans ce sens, alors plutôt que d'adopter une attitude totalement négative de repli ou d'auto-cloisonnement chez soi, (cet acte abandonnique de résignation étant curieusement qualifié de résistance ?), pourquoi ne pas tenter d'adopter une autre stratégie de réaction nettement plus positive ou dynamique, passant par l'urgente convocation de débats inter-démocrates et patriotes nationaux, appelant de façon pacifiste au changement ? Les autorités n'ayant pas, pour leur part, à refuser de telles initiatives de réunions de discussions et concertations démocratiques en vue d'entrevoir la possibilité de négociations d'apports de voix à d'éventuel candidat potentiel, en contrepartie de promesses de réalisations de projets démocratiques... à moins que les pouvoirs centraux ne soient tentés de tirer le diable par la queue si jamais ils s'aviseraient à frapper d'interdictions pareilles providentielles réunions de débats, de loin préférables aux risques de heurts, ou spectre d'une massive abstention au prochain scrutin qui les discréditeraient grandement ? Ne convient-il pas, dès lors, de décider du choix entre l'option pour une voie peu honorante prêtant le flanc aux dérives imprévisibles, ou celle tolérant l'espace ouvert pour les sages concertations démocratiques ? L �'avis étant valable aussi bien pour les partisans durs du pouvoir que les intransigeants du camp anti-Bouteflika opposé. Cette alternative de négociations-débats reste du domaine du possible, si jamais le pouvoir ne ferme pas les voies d'accès, et sijamais également les concernés par le boycott décidé de façon restreinte, (prônant une abstention populaire au vote qui risque de n'être pas aussi large qu'ils l'espèrent) se déclarent favorables à pareille initiative présentant, vraisemblablement, un choix autre que celui d'un repli, qui a tout l'air de se présenter sous des auspices négatives pour la mouvance démocratique...le prétexte des «jeux faits d'avance» ne devant pas servir, d'un certain point de vue, d'alibi pour justifier l'immobilisme, alors qu'avant la consécration électoraliste, dont l'issue ne fait pas de doute pour beaucoup, il est possible à l'ensemble du front coordonné des démocrates nationaux, de s'organiser et de négocier,en position de force, en cette phase électorale cruciale, des possibilités de «contracter» avec des candidats potentiels de choix, la promesse de projets démocratiques communs. Et avec les décideurs, «contracter» en contre partie d'appel de participation des démocrates à un non abstentionnisme au scrutin prochain pour un vote libre du choix de chacun (ou consigne de vote en faveur du candidat allié des démocrates) des promesses de promulgations davantage de droits citoyens en matière de libertés et droits humains en suspens. Le pouvoir ayant intérêt, pour le répéter encore une fois, à tolérer l'ouverture de ces voies de négociations-débats, afin d' éviter le risque d'un boycott massif. Même si, comme l'on s'y attend, le camp pro-Bouteflika ne se gênera nullement d'un taux d'électeurs réduit pour légitimer sa reconduction. Les gouvernances de pays occidentaux le seront encore moins, mais pareille situation ne fera que davantage ternir l'image du pouvoir et de l'Algérie dans le monde. Déjà que le tout récent rapport de «The Economist» classe l'Algérie (entendre la politique du régime de M. Bouteflika) à une peu reluisante place de pays autoritariste brimant libertés citoyennes et liberté d'expression, etc. Et si cette étude est peu fiable que ne dirait-on du rapport de Transparency International qui enfonce davantage le pays dans les affres de la corruption et atteintes aux libertés citoyennes ? Même si ces constats sont jugés exagérés, ils reflètent tout de même une triste réalité caractérisant la situation socioculturelle du pays, alors qu'il n' y a guère très longtemps, l'Algérie était en passe de devenir un modèle dans les pays arabes et africains en matière de promotion démocratique dans un pays émergeant, voilà que l'Algérie est positionnée, en 2008, parmi les pays qui ont accusé un net recul sur le plan du développement social, et une inquiétante avancée sur celui peu enviable de l'autoritarisme, la corruption, le musellement des libertés,etc. Juste pour un aperçu, l'étude internationale de la revue «The Economist», portant sur «l'indice de démocratie 2008» concernant 167 pays de par le monde, classe donc l'Algérie à la peu glorieuse place de 133è, et ce dans la catégorie des pays à régime autoritaire, proche de la catégorie des pays à régimes hybrides, qui elle-même est proche de la catégorie des pays à démocratie incomplète, et qui elle-même est talonnée pour cette raison par la catégorie supérieure, en tête des pays à démocratie complète ! (La Suède et la Norvège y étant classés premiers dans le monde, l'Afrique du Sud premier pays en Afrique, et le Liban premier dans le monde arabe, dans la catégorie pays à démocratie incomplète). On voit de là l'énorme gouffre qui sépare les premiers des derniers, en matière de respect des droits humains essentiels, comme la liberté d'expression et d'information, la liberté de religion,la liberté d'association et de réunion, le droit à un juste processus judiciaire,etc. Et même si une telle étude ne revêt pas un caractère totalement scientifique, et n'est pas dénuée de relents idéologiques, il n'en demeure pas moins qu'elle révèle maintes tendances significatives, ses critères de classification s'inspirant directement de la Charte des Nations Unies et des accords internationaux (notamment l'Acte final d'Helsinki) (Voir détails et chiffres dans l'article «Les enjeux d'un scrutin», de Smail Goumeziane, El Watan du 21/02/2009). Et nul doute que des pratiques gouvernantes nationales ne rompant pas avec ce cycle de contradictions sociales et d'atteintes continuelles aux libertés fondamentales et citoyennes ne feraient qu'enfoncer, internationalement et nationalement le pouvoir dans l'enclos apparatchik sourd et aveugle aux aspirations des larges couches populaires qu'il persiste à construire lui-même avec sa politique répressive. C'est pourquoi, l'appel à l'ouverture de l'espace d'expressions démocratiques larges, se devrait d'être favorisé par le pouvoir, pour cette mise en pratique d'une perspective constructive encourageant l'inaugurations de débats démocratiques, ou concertations avec les représentants des démocrates et nationaux susceptibles de se prononcer pour l'option-négociations, plutôt que l'option-boycott, si jamais le feu vert est donné à ces possibles voies de négociations politiques (les démocrates seraient libres, dès lors, d'opter pour le ou les candidats de leurs choix, conditionnant les apports de voix à la réalisation d'un certain nombre de promesses). Aussi, dans les circonstances des fils complexes des conjonctures politico-sociales qui se tissent actuellement, et en vue de marges d'issues autres que celle escomptée, la balle est désormais, et dans le camp du pouvoir et dans celui des opposants réticents pour qu'ils puissent, tous deux, envisager d'adopter sereinement, une nouvelle politique de rapports citoyens responsables-gouvernances responsables, avec notamment la proposition d'un amendement constitutionnel prenant acte de l'officialisation d'un mandat présidentiel maximal n'outrepassant pas le troisième... sous risque de dévier la RADP des révolutionnaires novembristes, des contestataires octobristes, des forces patriotiques, militants démocrates garants de la continuité républicaine et citoyens du peuple résistant aspirant à une authentique justice sociale, en une forme d'imposition de pouvoir totalitariste, ou de type «monarchiste autoritariste» qui ne dit pas son nom ! Toujours cet atavisme qui nous colle comme une malédiction et ne laisse le choix à la jeunesse de ces malheureuses contrées arabo-musulmanes de ne tenter son envol que par la voie de la désespérance. Mais jusqu'à quand cette calamité ? Ne sommes-nous pas, que diable, au troisième millénaire des hyper technologies sophistiquées, des multi communications et satellites spatiaux, des contacts civilisationnels-culturels inter-continentaux propagateurs, entre autres des hauts idéaux de libertés et droits citoyens, phase ou ont réussi à se distinguer de petits pays, hier encore talonnés par l'Algérie, alors que nous en sommes nous, encore, avec ces attitudes arbitraires et autarciques rétrogrades relevant franchement de l'ère médiévale féodale, et qui font dire de nos contrées que nous n'en finissons pas avec nos mentalités de l'exclusion tribale, clanique, népotiste, etc., etc. ?. Nous sommes nombreux à nous demander à quand donc la mutation pluraliste démocrate tant attendue, et pourtant enclenchée il y a plus de vingt ans en octobre 1988, espoir que tout un peuple a longtemps entretenu jusqu'à désespérer, rompu qu'il est par, entre autres, la tragédie noire qui l'a lassé des drames, des deuils et souffrances, séditions, jacqueries, émeutes multiples, etc. Et pour cause: les revirements, entre autres, de situations, ont profité, surtout conjoncturellement, - il faut le dire- à d'autres acteurs, qu'à ceux légitimement escomptés, pour avoir été partie prenante des grands changements structurels fondamentaux d'octobre 1988, mais que les décideurs mal avisés de l'époque ont fait supplanter par ceux qui se sont retournés, le plus naturellement du monde, contre des acquis pluralistes auxquels ils étaient, dès le départ étrangers... Mais l'honnêteté intellectuelle oblige à dire, que la stratégie de «l'homme providentiel» appelé à la rescousse, par un pouvoir de l'époque soucieux de gérer sans des démocrates au sommet pour ménager les affaires et alliances de groupes d'intérêts douteux, a fini, par son refus d'un commandement aux trois-quart, par se retourner, en dernière instance, contre ceux-là mêmes qui lui ont fait appel, et qui, soit dit en passant, méritent bien cet ébranlement institutionnel prenant de court d'ex-décideurs qui se sont eux-mêmes piégés en écartant auparavant des candidats-dirigeants potentiels et hommes de terrain avérés, par faux calculs politiciens, bien sur, trahissant leur évidente culture antidémocratique et antipopulaire. De ce point de vue, d'aucuns s'étaient attendus à ce que le président Bouteflika continue sur sa lancée, en assainissant le système par, notamment l'instauration progressive d'un pouvoir entièrement civil et d'une démocratisation structurelle poussée du système, mais au bout de dix ans de gouvernance, force est de constater, que sur le plan de l'autoritarisme autarcique, El Hadj Moussa a succédé à Moussa El Hadj : une déplorable situation d'enfermement que rien ne justifie, en cette ère inaugurale du pluralisme national, sinon le culte de l'autoritarisme car jamais connu du temps même de l'âpre lutte antiterroriste pour la glorieuse sauvegarde historique de l'Algérie démocratique Républicaine. Ceci dit, la pratique démocratique s'opère sur le terrain et non par les déclarations oiseuses, et l'histoire du pays est là pour nous fournir l'exemple pionnier, peut-être dans le monde arabo-musulman, de vénérables démocrates algériens qui devraient inspirer les démocrates nationaux dans des démarches constructives et bénéfiques pour l'avenir du pays. Aussi, concernant la situation politico-sociale actuelle, il appartient aux démocrates et autres patriotes de divers horizons de bien réfléchir, également, aux données événementielles du terrain qui s'annoncent. Et, à l'occasion, envisager sérieusement la possible alternative esquissée de débats-négociations, déjà dans l'air, mais abordée,ici, avec en plus un point de vue suggestif de la tenue de conseils de coordination inter-démocrates pacifiste, susceptibles d'émerger à la faveur de larges concertations initiées entre démocrates, et qui pourraient, être amenés, ainsi, à l'issue d'un débat démocrate national, à décider librement, sans contraintes et pressions aucunes, d'opter démocratiquement à l'approbation collégiale générale, soit pour un vote jugé utile, soit pour une abstention jugée nécessaire ! En d'autres termes, décider du boycott général des démocrates, ou en cas d'option pour le vote, envisager le choix concerté du candidat au profit duquel se fera l'apport substantiel des voix considérables du front coordonné des démocrates Algériens, en contrepartie, bien entendu, d'engagements mutuels à respecter, et en veillant au passage à la surveillance sans relâche du bon déroulement du scrutin, en dépit de ce qui se dit déjà à propos de l'issue finale de ce vote... Et il convient d'insister sur le fait le fait que l'option pour l'alternative de la participation au vote du front des démocrates, s'il vient à unifier et coordonner ses rangs, se doit d'être liée à des promesses officielles des pouvoirs centraux appelés, en la circonstance à parapher des accords officiels spécifiant clairement les requêtes du front des démocrates en matière de réalisations de projets pluralistes démocratiques : en d'autres termes, la participation des démocrates au scrutin du 9 avril en contrepartie d'exigences à honorer susceptibles d' éviter le boycott redouté, condition qui requiert du pouvoir son entière disposition à témoigner d'un esprit d'ouverture démocratique franc-jeu à l'avenir, l'engageant conséquemment à souscrire officiellement aux points d'entente généraux des accords contractés avec les éventuels représentants désignés d'un possible front national des démocrates algériens! (tout comme, à certains égards lorsque les conseillers de Boumediene avaient fait appel, en leur temps, à des militants algériens de gauche pour consolider la réorientation d'une nouvelle démarche d'assainissement politique inaugurale). Ceci, si jamais des voies de négociations officielles sont ouvertes entre représentants du pouvoir-représentants des démocrates, et encore, si jamais ces derniers soient prêts, également, à approuver pareilles suggestions afin d'envisager résolument de se prononcer majoritairement en faveur de concertations-négociations démocratiques. Car les réticents des positions dures sont présents dans les deux camps, mais ils doivent tous deux envisager, soit l'éventualité d'un boycott électoral important qui ternirait, sans nul doute, le visage de l'Algérie, soit celle d'une participation considérable, qui constituerait, contre toute attente, un affront aux partisans de l'abstentionnisme populaire... Aussi, ces ouvertures de négociations-concertations, si jamais elles pourraient être envisagées pour leurs tenues légales, - la presse pourrait, à cet effet, contribuer d'une façon importante à cette perspective de débats nationaux, et pourquoi la bouderait-elle alors que du temps des années vingt de la colonisation on permettait à nos aïeuls «indigènes» de relatifs libres propos ?- elles pourraient figurer à l'ordre des discussions publiques, divers points cruciaux de leurs choix. Et à titre indicatif, il y a parmi les points galvaudés par la vox-populi et dans les milieux culturels, en général, ces éléments les plus cités et qui pourraient être suggérés lors de ces débats préliminaires aux négociations, en cas de décision officielle, souhaitable de part et d'autre des deux camps concernés : à titre d'exemple, de ces points les plus répercutés donc par les échos de rue, et susceptibles d'être étudiés, débattus, corrigés, supprimés, remplacés, modifiés ou enrichis, pour les joindre, le cas échéant, aux autres points des éventuelles négociations-débats prônés ici, entre «représentants officiels du pouvoir-délégués désignés du front des démocrates nationaux», en vue de possibles accords engageant la tenue d'un scrutin présidentiel transparent, propre et régulier, et l'appel à la participation des démocrates au vote tactique de leur choix, en contrepartie officielle contractant la réalisation ultérieure de promesses, portant, entre autres, sur: - l'instauration d'une justice indépendante dans le pays ; l'élaboration d'un programme pragmatique de constructions d'unités industrielles, centres informatiques, domaines agricoles dotés de la technologie moderne du froid, ateliers d'arts et métiers, pour offrir du travail aux innombrables jeunes chômeurs qui végètent; la poursuite d'édification des barrages et l'acheminement de l'eau dans les foyers, de même que pour l'électrification et la procuration du gaz de ville; poursuivre la politique de construction de logements et fournir une aide raisonnable à l'auto-construction, notamment aux occupants des chalets préfabriqués à échéance limitée et présentant des risques de contamination pour la santé ; encourager le partenariat public privé dans divers secteurs et autoriser l'investissement privé, notamment dans le Sud déshérité... - Sur le plan culturel, répondre au voeu ardent d'officialisation de l'Amazighité, ce qui renouerait l'Algérie avec ses racines profondes affirmant ce paramètre identitaire berbère national aux cotés de l'Arabité-Islamité-Africanité-Méditérraneité de l'Algérianité plurale ; entreprendre la libéralisation des medias lourds en promettant notamment l'institution d'une télévision privée et radios privées ; envisager le feu vert à une université autonome et des écoles privées ; entreprendre la construction de bibliothèques, de médiathèques et centres culturels de quartiers avec le concours des citoyens, et la réalisation de salles de cinéma, de cinémathèques, de théâtres régionaux, parallèlement à l'aide consentie aux journaux et revues régionaux concrètement appuyés par un fonds de soutien décentralisé. Sur un autre plan, répondre aux attentes légitimes d'officialisation des syndicats autonomes ; et, entre autres, la promulgation des statuts du journaliste, de l'enseignant, de l'écrivain, de l'artiste ; sans omettre le rétablissement dans leurs droits de tous celles et ceux en attente de leur régularisation, que ce soit dans le cadre de la politique de réconciliation nationale, ou autre... Et si par bonheur les démocrates accueillent favorablement les suggestions émises ci-dessus, il sera du devoir des décideurs de répondre à l'effort de ce témoignage de bonne volonté responsable des citoyens démocrates nationaux qui seraient en droit de s'attendre à une attitude d'ouverture pareille de leur part. L'auteur de la présente libre opinion, pour le répéter encore une fois, a tenu à émettre ouvertement ces suggestions, en tant qu'humble citoyen indépendant, travaillant hors-circuit public (où il a été lésé dans ses droits par les abus d'autorité d'un règlement de comptes personnels irresponsable, exploitant entre autres, mon activisme solidaire lors des grèves dans le secteur éducatif ), et hors circuits privés aisés, subsistant, Dieu merci, grâce au très modeste apport d'une activité culturelle, journalistique et artistique autonome, et qui soumet ces présents avis dans un but essentiellement constructif. Ne demandant rien, et ne convoitant rien, et ne faisant ici que traduire des idées personnelles qu'il a jugées socialement utiles peut-être, sans aucune prétention de sa part, que celle aspirant à voir la quiétude et le développement authentique s'étendre en Algérie, et sans allégeance aucune à l'une ou l'autre des diverses sensibilités nationales, l'intérêt suprême du devenir de la nation primant par dessus tout. Et si les principaux concernés des deux camps n'ont que faire de pareilles opinions, alors qu'ils assument tout simplement leurs responsabilités face à l'éventualité d'une situation qui risque fort d'être d'un goût amer pour un chef d'Etat qui serait réélu par moins des trois quart de sa population et pour le reste des non votants abstentionnistes, la probabilité de ne tien glaner au change, sans écarter, également l'éventualité d'une participation importante au scrutin ?... Aux femmes et hommes de bonne volonté d'être sincèrement conviés à réfléchir un moment à l'avenir des enfants de ce pays. Et à défaut d'y tendre, le soin est laissé à l'Histoire de considérer les responsabilités de tout un chacun, à quelque niveau qu'il soit, dans tout ce qui est entrepris comme actes susceptibles de hâter le développement national ou en compromettre le processus historique. Et c'est honorer la mémoire de tous celles et ceux qui se sont sacrifiés durant la sombre décennie rouge pour une Algérie sereine, pluraliste et démocratique, instauratrice de la justice sociale, que de veiller à réinstaurer un tel climat démocratique général. Ce serait, tout autant se situer dans la perspective de la voie d'édification nationale moderne, telle qu'impulsée par les valeureux théoriciens de la Révolution Algérienne, et aux legs recommandant la poursuite du parachèvement institutionnel de la République Algérienne Démocratique et Populaire dans son cadre spécifique des valeurs musulmanes et universelles, en vue de l'émergence, tôt ou tard, d'un Etat de Droit en Algérie, inscrit depuis Novembre 1954 dans les arcanes de son devenir et annoncé jusque mêmes dans les valeurs tolérantes des droits humains et diversités religieuses, aujourd'hui saluées par la communauté mondiale, de l'Emir Abdelkader, le fondateur de l'Etat contemporain Algérien, réinstauré et modernisé après 1962. Mais que de déboires et d'espoirs déçus depuis !... ------------------------------------------------------------------------ * Auteur - journaliste culturel indépendant