Le Président réélu, M. Abdelaziz Bouteflika, prêtera serment ce matin. Cette cérémonie inaugurale de son troisième mandat sera marquée par le discours qu'il adressera à la nation en la circonstance, dans lequel il définira très certainement le cap vers lequel s'orientera la gouvernance du pays pour les cinq années à venir. L'on sait, pour avoir entendu le candidat Bouteflika pendant sa campagne électorale, ce que vont être les priorités du Président réélu. Elles sont les mêmes que celles qui ont été la trame du programme mis en oeuvre durant son second mandat. Bouteflika n'a en effet rien promis de nouveau dans son discours électoral. Si ce n'est de poursuivre, une fois réélu, les politiques et les actions engagées durant ses deux précédents mandats. De toute évidence donc, le Président réélu mettra l'accent sur sa volonté de persévérer dans la continuité de ce qu'il a entrepris au long des dix années qu'il vient de passer à la magistrature suprême. Ce qu'il traduira par son engagement à rester fidèle à sa vision d'une réconciliation nationale, point de passage obligé de son objectif global qui est le redressement national en tous ses aspects. Poursuite également des grands chantiers qui, en parallèle, ont été ouverts durant cette période, consistant en la réforme de l'Etat et des modes de son fonctionnement. C'est pourtant sur le terrain économique que la donne risque de contraindre le Président réélu à rompre avec la continuité dont il s'est réclamé pendant sa campagne électorale, pour la raison que l'impact qu'est en train d'avoir la crise économique mondiale sur le pays l'obligera à réviser la stratégie économique qui a servi de corpus à l'action gouvernementale en la matière. Le troisième mandat est menacé d'être une période de «vaches maigres» en terme d'aisance financière. Ce qui va faire obligation de restreindre les financements d'investissements étatiques. Tout indique en effet que le pays va voir pour longtemps ses rentrées financières amoindries par la persistance de la déprime qui caractérise en ces temps de crise les marchés pétroliers. Il sera impossible dans ces conditions que l'Etat puisse en même temps assurer, avec ses ressources financières, et les équilibres budgétaires des approvisionnements indispensables au quotidien national et la poursuite d'un programme de développement ambitieux. Les 150 milliards de dollars que Bouteflika a promis de mobiliser pour poursuivre celui-ci risquent de faire défaut et l'obliger ainsi à mettre sous le boisseau un certain nombre de ses promesses électorales. Il est une certitude que, dans ce contexte, le troisième mandat de Bouteflika risque de ne pas être ce «long fleuve tranquille» que la neutralisation du champ politique national peut laisser augurer. La continuité a pu servir d'argument de campagne. Elle pourrait devenir l'impasse pour le pays si celui qui l'incarne ne se montre pas réactif et novateur face aux défis qu'impose une conjoncture économique et financière défavorable pour le pays. Bouteflika le sera-t-il en son troisième mandat ?